37 pièces, panneaux, colonnes, photos, oucheptis et statues forment cette exposition baptisée Néfertari 1904-2014. Se trouvant actuellement dans la salle 44 au rez-de-chaussée du Musée égyptien, l’exposition se rendra ensuite à Alexandrie puis à Louqsor. Organisée par l’ambassade d’Italie, le Centre culturel italien du Caire et les ministères des Antiquités et du Tourisme en collaboration avec l’Université de Toscane, elle retrace 110 ans de travail dans la tombe de Néfertari, de sa découverte par l’égyptologue italien Ernesto Schiaparelli en 1904 à son inauguration dans les années 1990 en passant par les différentes étapes de sa restauration et sa conservation.
L’exposition présente au public, pour la première fois, des photos prises pendant l’exploration du site par la mission italienne. Celui-ci, connu avant 1904 sous le nom de Ta Set Néférou, qui signifie « le siège de la beauté », a été rebaptisé par Schiaparelli la Vallée des reines. Le visiteur peut admirer une vue générale du chantier en 1904, la localisation de la tombe de Néfertari, en plus des ouvriers qui opéraient sur le site. « Parmi les plus belles photos exposées figurent celles qui décrivent la tombe de l’intérieur. Le visiteur peut y voir l’entrée de la tombe ainsi que les salles qui comprenaient le mobilier funéraire qui était dans un état de désordre absolu », explique l’égyptologue Roberto Buongarzone, organisateur de l’exposition. « Bien que la photographie en 1904 ait été un art récent, les photos prises montrent les détails les plus fins », reprend Buongarzone.
L’exposition ne présente pas seulement des photos anciennes, le visiteur peut faire aussi la comparaison entre ces photos et celles prises après la restauration de la tombe en 1994 par l’institut Getty, soit 90 ans après sa découverte. « Les photos sont reproduites dans un format proche de l’original, permettant ainsi de voir des images identiques à la réalité. C’est le photographe Sandro Vannini qui a pris ces photos mettant en évidence la coopération italienne au service du patrimoine culturel égyptien », renchérit Buongarzone.
(Photo : Doaa Elhami)
A travers l’exposition, le visiteur suit la vie de Néfertari, d’abord en tant que reine et épouse royale, puis dans l’au-delà. Le nom Néfertari est inextricablement attaché à celui de son conjoint royal Ramsès II, le plus célèbre des pharaons égyptiens. On ignore ses origines, mais l’on suppose qu’elle descendait de la famille Aï, successeur du roi-enfant Toutankhamon, de la XVIIIe dynastie, d’après ce qu’indique la poignée d’un coffret recouverte d’émail bleu et portant le cartouche du roi Aï. La reine Néfertari pourrait donc avoir été une fille ou une nièce de ce souverain. A la silhouette fine et élégante, Néfertari était la préférée de Ramsès II. Bien qu’il ait eu d’autres épouses et un grand nombre de concubines, elle apparaissait toujours à ses côtés comme «
la Grande épouse royale » lors des cérémonies officielles et religieuses.
Néfertari, dont le nom signifie « La belle des belles, la dame de charme, la grande et douce dans l’amour », était vénérée en tant que déesse à côté de son conjoint. Le temple mineur d’Abou-Simbel, dont la photo côtoie celle du grand temple de Ramsès II à l’exposition, était dédié à Néfertari. L’édification de ce temple a été complétée après le décès de la reine, reflétant l’ultime importance de Néfertari pour son époux, Ramsès II. « Les scènes de ce temple reflètent l’amour de la reine pour la musique et les chansons. Elle avait une voix douce », explique Mahmoud Al-Halwagui, directeur du Musée égyptien.
L’exposition éclaire certains aspects de la vie de la reine Néfertari et de sa tombe. La tombe est d’une grande importance sur le plan touristique. Mahmoud Al-Halwagui s’attend à ce que de nombreux visiteurs de différentes nationalités se rendent à l’exposition pour admirer « la belle des belles » comme on l’appelle. Beaucoup souhaiteraient visiter sa tombe à Louqsor. Mais faute de moyens et de temps, ils n’y parviennent pas. L’exposition est alors une bonne occasion pour rendre visite à Néfertari au Caire. L’exposition doit durer un mois. Néfertari partira ensuite à Alexandrie et terminera son parcours à Louqsor.
Qui est Ernesto Schiaparelli ?
Ernesto Schiaparelli, l’un des pionniers de l’égyptologie dans le monde. (Photo : Doaa Elhami)
Né en 1856 à Piémont au nord-ouest de l’Italie, Ernesto Schiaparelli est l’un des pionniers de l’égyptologie dans le monde. A 22 ans, il décide de partir en France où il approfondit ses études sous la supervision du grand égyptologue Gaston Maspero. De retour en Italie, il devient directeur de la section égyptienne du Musée archéologique de Florence à partir de 1880 jusqu’en 1894. Une première étape, mais pas la dernière. Schiaparelli prend ensuite le poste de directeur du Musée égyptien de Turin, où il reste jusqu’à sa mort en 1928.
Gaston Maspero, directeur des antiquités, confie à la mission du Musée de Turin, présidée par Schiaparelli, la tâche d’opérer à Guiza, à Héliopolis et à Thèbes, notamment dans la Vallée des reines. Ces travaux étaient subventionnés depuis 1902 par le roi d’Italie Victor Emmanuel III.
La vie professionnelle de Schiaparelli était très riche. Il a fait une série d’importantes découvertes ayant bouleversé l’histoire de la civilisation égyptienne. C’est à lui qu’on confie la découverte de toutes les tombes de la Vallée des reines, dont le nombre dépasse les 60. La plus importante est celle de la reine Néfertari-miamut, l’épouse de Ramsès II. Il a de même dévoilé la tombe du prince Khaemwaset, fils de Ramsès III qui a été mise au jour en 1903. « Une tombe connue pour son harmonie et son élégance architecturale, la beauté de ses peintures et la fraîcheur de leur conservation », notait Schiaparelli à l’heure de sa découverte.
La souveraine bien aimée
(Photo : Doaa Elhami)
Dans l’au-delà, ou dans le monde osirien, Néfertari est représentée sur les parois de sa tombe avec les différentes divinités: Osiris, Atoum, Ptah et Thot. On la retrouve aussi sur des scènes funéraires variées, comme les tables d’offrandes, les séries de vaches, et surtout dans les textes du Livre des Morts. De toutes celles-ci, se distingue la scène de Néfertari représentée debout devant la divinité de la Sagesse Thot assis. « Au milieu des deux figures est dessiné un encrier sur lequel est représentée une grenouille, symbole de l’éternité et de la renaissance », explique Mahmoud Al-Halwagui, directeur du Musée égyptien. Cette image religieuse ne représente que la moitié d’une grande scène qui a attiré l’attention non seulement des visiteurs, mais aussi des experts. « La seconde partie représente l’un des chapitres du Livre des Morts, qui réunissait les grandes créations de la théologie égyptienne à Thèbes », explique Ahmad Salem, chef de la section scientifique du Musée égyptien. Pour lui, de tels rituels étaient exclusivement destinés au souverain défunt, dans la nécropole thébaine, pour qu’il puisse renaître. Cette scène montre toujours l’importance de Néfertari et le fait qu’elle est l’égale de son époux, le grand souverain Ramsès II.
Lien court: