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Moubarak peut-il être rejugé ?

Mardi, 09 décembre 2014

L'appel du procureur général contre la décision de la Cour pénale d'acquitter l'ancien président Hosni Moubarak et l'ancien ministre de l'Intérieur, Habib Al-Adely, soulève des interrogations. Quelques éléments de réponse.

Moubarak
A l'issue du verdict, les familles des victimes crient justice. (Photo : Moustapha Emeira)

Pourquoi le procureur général a-t-il décidé de faire appel du verdict en faveur de Moubarak ?

— L’acquittement de l’ancien président, de ses deux fils Alaa et Gamal, de l’ancien ministre de l’Intérieur Habib Al-Adely et de six autres hauts responsables de la sécurité par la Cour pénale du Caire, a créé une onde de choc au sein de l’opinion publique et des forces révolutionnaires, qui perçoivent cette décision comme « un coup porté à la révolution du 25 janvier ». A première vue, l’appel du procureur général paraît comme un moyen de calmer l’opinion publique et de transmettre à la population un message selon lequel les autorités actuelles ne soutiennent pas l’ancien président. Cependant, le conseiller Mohamad Eid Salem, vice-président de la Cour de cassation, écarte cette hypothèse. Pour lui, le Parquet est convaincu qu’il y a des failles dans le procès. Le bureau du procureur a souligné d’ailleurs dans un communiqué que le procureur agit « loin de l’influence des différents courants politiques ».

Le procureur général a ordonné la formation d’un comité pour étudier le verdict de la Cour pénale. Concrètement, quel sera le rôle de ce comité ?

— Rien dans les textes de loi actuels ne stipule la formation d’un tel comité, mais étant donné l’importance et le caractère délicat de ce procès, ce comité, formé de quatre conseillers, se chargera de la lecture du jugement de la Cour pénale du Caire relatif à l’acquittement de Moubarak et de ses assistants. Il dressera ensuite les motifs juridiques de l’appel devant la Cour de cassation.

L’appel peut-il être rejeté par la Cour de cassation ?

— Oui. La Cour de cassation peut, en vertu de la loi, accepter ou refuser l’appel présenté par le Parquet après avoir étudié les motifs présentés par ce dernier. En cas de refus, le jugement prononcé par la Cour pénale du Caire sera considéré comme définitif, et dans ce cas, il n’y aura plus de recours possibles, précise le conseiller Mohamad Eid Salem.

Si l’appel est accepté par la Cour de cassation. Devant quelle juridiction le procès sera-t-il examiné ?

— Comme l’explique l’expert constitutionnel et ancien président du Conseil d’Etat, le magistrat Mohamad Hamed Al-Gamal, cet appel devant la Cour de cassation est le second et le dernier recours contre le jugement prononcé dans ce procès. En juin 2012, sous la présidence de Mohamad Morsi, Moubarak avait été condamné à la prison à perpétuité, mais la sentence a été annulée pour vice de forme, et Moubarak a été rejugé. « Si la Cour de cassation, la plus haute juridiction du droit pénal en Egypte, décide d’annuler le verdict et accepte l’appel présenté par le procureur, elle devra elle-même cette fois-ci examiner le procès en vertu de la législation égyptienne », explique le magistrat. Et d’ajouter que dans ce cas, « la Cour de cassation prend les prérogatives complètes de la Cour pénale ».

Quelles procédures suivront dans ce cas ?

— Une fois l’appel accepté, la Cour de cassation rouvrira de nouveau le procès. On recommencera alors toutes les procédures du jugement. « Tous les documents, preuves et enregistrements seront réétudiés par la Cour, et les témoins devront à nouveau donner leurs témoignages », précise Al-Gamal.

Les accusés seront-ils à nouveau arrêtés ?

— Pas nécessairement. L’arrestation des accusés reste la décision de la Cour. Et il appartient au juge de les retenir ou non. « Il faut savoir que le juge est, dans le fond, limité par une période de détention préventive, mais parfois la détention est dans l’intérêt de l’accusé si sa libération expose sa vie au danger. Parfois aussi cette détention est une manière de calmer la colère de la rue », souligne le conseiller Mohamad Salem.

Qu’est-ce qui peut changer au niveau du procès et du jugement ?

— Le procès sera revu de fond en comble par les juges de la nouvelle Cour. Si le procureur parvient à prouver qu’il y a eu effectivement vice de forme, les résultats du procès peuvent totalement changer, et on peut assister à un nouveau verdict.

Combien de temps peut durer le nouveau jugement en cas d’acceptation de l’appel ?

— Personne ne peut le dire, ni la Cour, ni le procureur lui-même. « La durée du procès dépend des documents qui seront présentés à la Cour. Mais si nous voulons un jugement équitable, la Cour doit prendre son temps pour étudier ce procès très délicat », conclut Mohamad Salem.

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