L’imposition d’un salaire maximum dans la fonction publique est une demande qui revient sans cesse depuis la révolution de 2011. Il s’agit de remédier aux fortes inégalités qui touchent le secteur public.
Quatre versions d’une loi (voir chronologie) n’ont apaisé aucun des acteurs, qu’ils soient pour ou contre une telle limitation. Samir Radwan, ancien ministre des Finances, a été le premier à critiquer les inégalités qui touchent les fonctionnaires, soulignant que les hauts responsables touchent des revenus parfois 1 000 fois supérieur aux plus bas salaires.
Malgré cela, Radwan s’est toujours opposé fortement à l’imposition d’un salaire maximum. « Il serait beaucoup plus efficace de restructurer le système des salaires dans son ensemble au lieu de se contenter de fixer un salaire minimum et maximum », dit-t-il à l’Hebdo. Pour lui, une restructuration en profondeur aurait engendré des économies tout en sécurisant les cadres à hauts salaires au sein du gouvernement.
La première tentative de réforme remonte à 2011 sous le gouvernement Ganzouri. A l’époque, une décision fixait le plafond à 35 fois le salaire minimum d’un diplômé universitaire au début de sa carrière et au sein d’un même secteur. En pratique, cela pouvait permettre un salaire maximum de plus 100 000 L.E. par mois dans des secteurs comme le pétrole, les télécoms ou les banques.
Radwan regrette que la dernière version soit aussi la plus sévère : « Comment préciser un plafond similaire pour tous les cadres dans toutes les institutions ? ».
Pourtant, l’imposition d’un plafond reste essentielle pour éviter des abus trop fréquents. La dernière version de la loi a toutefois la vertu d’annuler les exceptions généreuses que renfermaient les autres versions, par exemple concernant l’armée, la justice, les banques et le secteur pétrolier.
Doha Abdel-Hamid, experte financière auprès des Nations-Unies, estime que « certains responsables ont longtemps touché des salaires démesurés ». Elle ne craint pas une fuite des cadres qualifiés, qu’elle qualifie « d’illusion ». « C’est le secteur public qui a formé ces cadres et il est capable d’en former d’autres », dit-elle.
Une centaine de fonctionnaires ont déjà quitté leur travail au gouvernement et la plupart ont rejoint le secteur privé, malgré l’interdiction qui les concerne (voir l’article en haut de page). Il est toutefois trop tôt pour parler de véritable phénomène, ramené au nombre total de hauts fonctionnaires, ce chiffre reste peu significatif .
Chronologie de la loi : Les 4 versions
2011. Le Conseil militaire, au cours de la période de transition qui suit la révolution de janvier 2011, promulgue une loi édictant un salaire maximum de 35 fois supérieur au salaire minimum, primes incluses. Chaque institution précise ses exceptions.
2012. Le Conseil consultatif (Sénat) sous le président Morsi présente un autre modèle plus flexible. Le salaire maximum représente 35 fois le salaire minimum, et chaque institution précise ses exceptions. Toutefois, les banques, l’armée, la police, les juges, le secteur pétrolier, l’Organisme du Canal de Suez, la société de construction publique Arab Contractors et enfin les entreprises du secteur des affaires publiques sont exclus de ce texte.
2013. Le dernier modèle présenté par le cabinet Beblawy applique le 2e modèle. Avec une différence : le salaire maximum est fixé à 42 000 L.E., quel que soit le salaire minimum, mais avec une liste d’exceptions.
2014. Le dernier modèle appliqué par le cabinet Mahlab applique le 3e modèle. Avec une différence : pas d’exception. Tous les fonctionnaires, même le président de la République, y sont soumis.
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