Malgré un nouveau bilan alarmant de l’Onu affirmant que la crise ukrainienne a fait plus de 2000 morts en 5 mois, la guerre d’influence se poursuit de plus belle entre Moscou et l’Occident. Celui-ci semble marquer un point dans sa guerre avec Moscou, quand les autorités ukrainiennes, pro-européennes, ont intensifié leur offensive contre les régions séparatistes de l’est, reprenant le contrôle de la plupart de ces régions. Une avancée qui ne s’est pas faite sans victimes: à Donetsk, 74 civils ont été tués, alors qu’à Lougansk, 22 autres civils ont trouvé la mort sous les obus de l’armée.
N’ayant aucune intention de rester bras croisés, en dépit de leur défaite, les séparatistes, soutenus par Moscou, ont abattu, dimanche à Lougansk (est), un avion de chasse MIG-29 de l’armée ukrainienne. De plus, des blindés russes se sont infiltrés cette semaine dans les frontières ukrainiennes pour soutenir les rebelles à l’arme lourde. Kiev a affirmé que Moscou a introduit en Ukraine 3 lance-roquettes Grad et dénoncé 10 violations de son espace aérien par des drones russes.
Selon les experts, Moscou, qui n’acceptera pas de voir à ses frontières une Kiev pro-européenne où pourraient être implantées des bases de l’Otan, réagira face à cette avancée des autorités ukrainiennes qui pourraient torpiller ses plans de « diviser » l’Ukraine. Ainsi, si jamais Moscou n’arrive pas à garder toute l’Ukraine dans son giron, il en gardera au moins une « bonne partie ». La Russie a commencé par l’annexion de la Crimée en mars, et a poursuivi ses manoeuvres pour annexer d’autres régions au prix de lourdes sanctions internationales.
Face à cet entêtement russe, les ministres européens des Affaires étrangères, réunis à Bruxelles, samedi, ont mis en garde Moscou contre toute incursion militaire en Ukraine, la pressant de « stopper toute forme d’hostilité ». Même appel lancé par la Maison Blanche, qui a incité Moscou à cesser ses « provocations » et à « retirer vite ses troupes ».
Désaccords sur l’humanitaire
Loin de ces évolutions militaires, un autre volet plus humanitaire a creusé de plus en plus le fossé entre Kiev et l’Occident d’une part, et Moscou d’autre part. Face au nombre croissant de morts civils dans l’est ukrainien, Moscou tente depuis la semaine dernière d’y dépêcher un convoi humanitaire, composé de 300 camions porteurs de 1800 tonnes d’aide, pour secourir les Russes de ces régions. Or, l’envoi de ce convoi s’est heurté au refus de Kiev et de l’Occident, de peur qu’il ne serve de couverture à une intervention russe. Une accusation qualifiée d’« absurde » par le ministère russe des Affaires étrangères qui a dénoncé des tentatives, du côté ukrainien, de faire échouer son aide humanitaire.
Après de houleux débats, Moscou et Kiev se sont enfin mis d’accord samedi sur l’entrée du convoi dans l’est ukrainien, à condition qu’il soit inspecté par le Comité international de la Croix-Rouge avant de dépasser les frontières ukrainiennes. Une façon de calmer une situation tendue qui n’augure rien de bon sur les plans militaire et humanitaire. Encourageant ce climat, une réunion quadripartite de crise a eu lieu à Berlin entre les ministres russe et ukrainien des Affaires étrangères, en présence de leurs homologues français et allemand, afin de chercher les moyens d’éviter une confrontation directe plus grave entre les armées ukrainienne et russe. A l’issue de cette réunion, les 4 parties ont affirmé qu’il s’agissait d’une rencontre difficile et qu’une solution politique à la crise était encore loin.
Pourtant, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a affirmé qu’aucun progrès n’a été obtenu sur un cessez-le-feu, ni sur un règlement politique en Ukraine. « Nous avons confirmé notre position selon laquelle un cessez-le-feu (...) doit être sans conditions. Mais nos collègues ukrainiens continuent malheureusement de poser des conditions qui sont en plus assez floues, comme celles d’assurer l’impénétrabilité de la frontière russo-ukrainienne », a regretté le ministre russe. Sergueï Lavrov a également fait état des discussions sur un éventuel octroi de drones aux observateurs d’une mission de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), déployée à une partie de la frontière russo-ukrainienne.
Malgré cette amorce de la diplomatie, plus ou moins précaire, la crise ukrainienne se poursuivra tant que ses deux vrais protagonistes, Moscou et l’Occident, campent sur leurs positions inconciliables. Alors que Moscou persiste à maintenir dans son giron tous les pays qui appartenaient à l’ex-Union soviétique, l’Occident aspire à y étendre ses zones d’influence.
Qui gagnera cette guerre entre les Grands de la planète? Et plus important aussi: quelle facture vont payer les Ukrainiens dans cette guerre qui ne les concerne pas ?
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