Une fois de plus, la bande de Gaza est à feu et à sang. Cette unième spirale de violence entre Israël et le mouvement de la résistance islamique
Hamas trouve ses racines dans la situation interne à chacun des deux protagonistes. Alors que le premier ministre israélien Benyamin Netanyahu, déjà habitué aux ripostes musclées et disproportionnées, subit les pressions, voire la surenchère, de l’extrême-droite et craint pour sa popularité, le
Hamas se trouve en difficulté politique et financière et souffre d’un isolement diplomatique dans la région. Les choix politiques faits ces dernières années par le mouvement islamiste à Gaza se sont avérés catastrophiques. Certes, les développements internes dans les pays arabes qui ont connu des soulèvements populaires depuis 2011 sont grandement responsables de la mauvaise posture actuelle du
Hamas.
Outre la perte du soutien de l’organisation mère en Egypte, désormais déclarée organisation terroriste par Le Caire, l’alignement du Hamas sur la rébellion armée en Syrie a mis un terme au soutien multiforme qu’apportaient le régime de Bachar Al-Assad et son allié stratégique, l’Iran, aux maîtres islamistes de la bande de Gaza. Il restait au Hamas le soutien de deux alliés régionaux, le Qatar et la Turquie. Tous deux sont en difficulté dans la région, notamment après la chute des Frères musulmans en Egypte. Outre la tension avec L’Egypte post-Frères, le Qatar se trouve frappé d’ostracisme par l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et Bahreïn qui ont récemment rappelé leurs ambassadeurs à Doha. La Turquie, pour sa part, paie de sa stature régionale le prix d’une politique et d’une rhétorique hostiles au changement intervenu en Egypte en juillet 2013, face à une coalition régionale menée par Le Caire et Riyad. Pour sortir de son isolement diplomatique et de ses difficultés financières, le Hamas a conclu en avril dernier un accord de réconciliation nationale avec son frère ennemi, le président Mahmoud Abbas.
Pour le Hamas, l’accord était un moyen de retrouver son rôle dans le jeu régional et, surtout, bénéficier d’une partie de l’assistance financière étrangère, notamment américaine et européenne, que reçoit l’Autorité palestinienne, afin de compenser la perte de l’aide vitale de l’Iran. Mais le mouvement islamiste a été déçu par le refus de Mahmoud Abbas de payer les salaires des quelque 50 000 fonctionnaires appartenant au Hamas dans la bande de Gaza. Il en a déduit que l’accord de réconciliation, qui bat de l’aile, ne tiendra pas et qu’il faudra trouver une autre stratégie. Le Hamas l’a trouvée dans l’escalade militaire avec Israël à l’occasion des incidents tragiques qui ont eu lieu récemment. Certes, l’agression israélienne contre les Palestiniens de la bande de Gaza y est pour beaucoup et a poussé le Hamas à chercher à profiter de la situation.
Pour le Hamas, l’escalade militaire lui permettra d’apparaître aux yeux des Palestiniens comme le champion de la résistance à Israël, par opposition à une Autorité palestinienne qui, prêchant des négociations de paix, n’a jamais rien obtenu. Il estime que l’augmentation du nombre des victimes palestiniennes, tombées sous les bombes israéliennes, et la prolongation de l’agression israélienne –favorisée éventuellement par la poursuite des tirs de roquettes – provoqueront une vague de solidarité internationale avec les Palestiniens, des pressions occidentales et arabes sur Israël pour parvenir à une trêve.
Par ailleurs, le Hamas a réussi à accroître la portée de ses roquettes. Ses derniers tirs ont atteint des régions qui n’ont jamais été touchées auparavant, au sud et au centre d’Israël, comme la banlieue de Tel-Aviv ou Jérusalem. Même si ces tirs sont approximatifs et n’ont jusqu’ici pas provoqué de sérieux dégâts, leur effet psychologique négatif est important sur la population israélienne, qui sent le danger du Hamas augmenter et s’approcher de zones jamais atteintes par le passé.
A l’inverse, l’accroissement des rayons d’action des roquettes est positivement ressenti par les Palestiniens, qui croient pouvoir à l’avenir infliger aux Israéliens des pertes plus importantes, et voient ainsi augmenter leur capacité de résistance à l’occupant israélien. De tels résultats, s’ils se confirment, augmenteront la popularité du Hamas parmi les Palestiniens, aux dépens de son rival, le Fatah de Mahmoud Abbas, qui domine l’Autorité palestinienne. Une telle popularité retrouvée sera la très bienvenue en cas d’organisation d’élections législatives et présidentielle, prévues dans un délai de six mois, conformément à l’accord de réconciliation inter-palestinienne.
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