Après la chute de Mohamad Morsi en juillet 2013, le gouvernement s’est attelé à couper les sources de financement des Frères musulmans. Une politique visant à paralyser la confrérie. C’est dans ce contexte que le comité chargé de saisir et de gérer les fonds des Frères, dirigé par le conseiller Ezzat Khamis, avait décidé la semaine dernière de saisir les biens de deux célèbres chaînes de supermarchés appartenant à la confrérie,
Seoudi et
Zad, propriétés respectives de Abdel-Rahman Seoudi et Khaïrat Al-Chater, tous deux membres des Frères musulmans.
La décision a suscité de multiples réactions. Khaled Hanafi, ministre de l’Approvisionnement et du Commerce intérieur, a déclaré cette semaine que les employés des 2 supermarchés ne seront pas lésés. Il a souligné que la Société holding pour les industries alimentaires surveillera le travail au sein des deux supermarchés. La saisie des deux supermarchés fait partie d’une campagne gouvernementale plus large visant à couper les sources de financement de la confrérie, afin de réduire son influence sur le terrain politique et social. Mais selon le politologue Ahmad Ban, cette campagne gouvernementale ne va pas affecter la confrérie. « Jusqu’à présent, les mesures prises par le gouvernement contre les Frères ne constituent pas de danger pour la confrérie, dont les sources de financement sont extrêmement diversifiées », dit-il.
La confrérie des Frères musulmans dispose de fonds sous forme d’actifs immobiliers d’une valeur de 12 milliards de L.E., selon le dissident des Frères, Sarwat Al-Kherbawi. Les Frères possèdent une trentaine d’écoles et une quinzaine de sociétés dont le capital atteint les 3 milliards de L.E. Ils possèdent aussi des terrains dans les villes nouvelles. Tout cela sans compter les cotisations des membres qui versent entre 7% et 10% de leurs revenus mensuels comme contribution financière à la confrérie.
Par ailleurs, les Frères possèdent une fortune à l’étranger sous forme d’investissements et dont personne ne connaît le montant. « Saisir une ou deux sociétés, n’aura aucune influence sur la confrérie, qui possède d’autres sources de financement. Si le gouvernement veut marginaliser la confrérie, il doit procéder autrement. Car si les Frères ont un poids sur le terrain social, c’est parce que pendant des années, le gouvernement était absent de ce terrain. Il faut que l’Etat empêche la confrérie de faire de la propagande sur le terrain social », affirme Ahmad Ban.
Le gouvernement avait décidé il y a quelques mois de placer sous surveillance les finances de 1 000 associations et ONG gérées par les Frères musulmans. Achraf Al-Chérif, professeur de sciences politiques à l’Université américaine au Caire, analyse la situation d’une manière différente. « Le gouvernement ne veut pas anéantir totalement les Frères musulmans. L’Etat aura besoin de la confrérie au cours de la prochaine période pour mettre fin à la violence », dit-il. Dans ce contexte, la saisie des biens des Frères musulmans peut être considéré comme un moyen de pression sur la confrérie, afin de l’amener à faire des concessions au cours d’éventuelles négociations. Le président Abdel-Fattah Al-Sissi avait récemment déclarée que la porte de la réconciliation était ouverte à tous ceux qui n’ont pas de sang sur les mains. « L’avenir devrait apporter plus d’éclaircissements sur la politique de l’Etat à l’égard des Frères », conclut Achraf Al-Chérif.
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