Malgré l’échec de sa trêve de quelques jours, le médiateur onusien, Lakhdar Brahimi, élabore de nouvelles options à présenter devant le Conseil de sécurité de l’Onu en novembre. Brahimi, qui avait œuvré pour un cessez-le-feu pendant les quatre jours de la fête musulmane du Aïd Al-Adha, de vendredi à lundi, a annoncé qu’il a «
quelques idées d’actions concrètes » pour amener le président Bachar Al-Assad et l’opposition à la table des négociations.
Mais ni le régime ni les rebelles ne semblent prêts à faire taire leurs armes, s’accusant mutuellement d’avoir violé la trêve en premier. Les violences ont fait plus de 35 000 morts depuis mars 2011, selon l’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme (OSDH) et ont forcé des centaines de milliers de personnes à l’exil. L’armée, qui tente de reprendre les bastions rebelles des provinces de Damas et d’Idleb (nord-ouest) avec l’appui de l’aviation, a assuré qu’elle ne faisait que « riposter » aux attaques rebelles, tandis que l’opposition armée a qualifié l’initiative de M. Brahimi de « mort-née », en raison des bombardements incessants menés par le régime.
En avril, un autre projet de trêve, initiée par le prédécesseur de M. Brahimi, Kofi Annan, avait déjà volé en éclats au bout de quelques jours. Mais cette fois, les deux parties avaient prévenu qu’elles riposteraient en cas d’attaque et, au bout de quelques heures, les belligérants se sont mutuellement accusés de violations et les fronts se sont embrasés.
L’armée a une nouvelle fois accusé les rebelles, qu’elle qualifie de « terroristes », d’être responsables de l’échec de la trêve proposée, soulignant qu’en raison des « violations insolentes du cessez-le-feu par les groupes terroristes », elle les « frappait d’une main de fer pour les éradiquer et sauver la nation ». L’opposition, de son côté, nie toute implication dans les premiers combats.
Moscou puis Pékin
Malgré cet échec, l’émissaire de l’Onu et de la Ligue arabe entend continuer sa mission et se rendre cette semaine en Chine et en Russie pour discuter de la situation. A Pékin et à Moscou, l’ancien ministre algérien des Affaires étrangères tentera une nouvelle fois de convaincre les dirigeants de revenir sur leur opposition à une action du Conseil de sécurité de l’Onu.
Accentuant les efforts internationaux pour trouver une issue à cette crise, l’ambassadeur de la Ligue arabe en France, Nassif Hitti, a préconisé, de son côté, un « accord a minima » entre les grandes puissances, indispensable, selon lui, pour parvenir à résoudre la crise syrienne, et qui s’appuierait sur l’accord conclu à Genève le 30 juin dernier et qui prévoyait la formation d’un gouvernement de transition.
« Si nous n’arrivons pas à créer un accord a minima entre les grands, nous ne pourrons jamais démarrer sur une base solide un processus politique de transition ordonnée et accompagnée », a déclaré l’ambassadeur, tout en ajoutant que « s’il n’y a pas de message politique clair et ferme de la part des grands qui sont les alliés d’une part du régime et d’autre part de l’opposition, nous n’avancerons jamais ».
L’ambassadeur a aussi souligné que la guerre en Syrie pouvait durer encore longtemps, la crise syrienne étant prise au piège d’autres conflits dans la région. M. Hitti a déclaré à l’AFP que la base des discussions devait être « l’accord-cadre de Genève pour le faire avancer », rappelant que celui-ci prévoit la formation d’une autorité de gouvernement transitoire où les deux parties seraient représentées pour un vrai changement.
Cet accord avait été conclu lors d’une réunion du Groupe d’action sur la Syrie. Ce groupe rassemble des chefs de la diplomatie des cinq membres permanents du Conseil de sécurité (Etats-Unis, Chine, Russie, France et Grande-Bretagne), des chefs de la diplomatie des pays représentant la Ligue arabe (Iraq, Koweït et Qatar), des représentants de la Turquie ainsi que les secrétaires généraux de la Ligue arabe et de l’Onu et la haute représentante aux Affaires étrangères de l’Union Européenne (UE).
Les participants avaient ensuite divergé sur l’interprétation de l’accord, les Etats-Unis estimant qu’il ouvrait la voie à l’ère « post-Bachar Al-Assad », tandis que la Russie et la Chine, alliées du président syrien, réaffirmaient qu’il revenait aux Syriens de déterminer leur avenir. Aucun détail n’a encore été annoncé sur les options que Lakhdar Brahimi entend maintenant présenter.
Force de maintien de la paix
L’Onu serait en train de mettre au point un plan acceptable pour l’envoi d’une force de maintien de la paix ou d’observation si une trêve était à nouveau décidée. Des équipes et du matériel humanitaires sont également déjà prêts à être envoyés dans les villes d’Alep, d’Idlib et de Homs.
Mais pour faire aboutir ce nouveau plan, le médiateur onusien a une lourde tâche à accomplir. Il doit d’abord persuader les alliés du régime, la Chine, la Russie et l’Iran, de faire pression sur Assad, et de même convaincre les pays qui soutiennent l’opposition, la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar, de faire pression sur les rebelles.
Pour accentuer la pression, la Suisse a adopté, vendredi dernier, de nouvelles sanctions contre la Syrie de Bachar Al-Assad, s’alignant sur les décisions prises par l’UE, selon un communiqué publié par le ministère de l’Economie. La Suisse a décidé d’ajouter 28 nouveaux noms sur la liste des partisans du président syrien dont les fonds sont gelés et qui sont également interdits de visa. En outre, la Suisse a ajouté 2 noms sur la liste des sociétés syriennes faisant l’objet de sanctions.
Les personnes visées par ces sanctions sont des ministres, des ex-ministres ou des proches du président. Les deux nouvelles sociétés désignées, Megatrade et Expert Partners, sont soupçonnées d’avoir acheté des armes ou du matériel pouvant servir à la répression.
L’UE avait décidé, le 15 octobre à Luxembourg, de porter à 181 le nombre de personnes proches du régime et à 54 le nombre de sociétés ou administrations placées sur les listes noires européennes. A ce jour, l’UE a décrété des embargos sur les armes et le pétrole ainsi qu’une série de sanctions commerciales et financières, le gel des avoirs de sociétés, d’administrations et de membres du régime ou de leurs proches, qui sont également interdits de visa. La Suisse s’est ralliée à ces sanctions.
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