Un nouveau pacte de rapprochement a été conclu entre la Russie et l’Iran, alors que tous deux entretiennent des relations tendues avec l’Occident. Le président russe, Vladimir Poutine, et son homologue iranien, Massoud Pezeshkian, ont signé, vendredi 17 janvier à Moscou, un accord de partenariat stratégique, couvrant de divers domaines : diplomatiques, politiques, militaires et économiques, et marquant ainsi une nouvelle étape dans l’alliance russo-iranienne. « Je suis convaincu que la signature aujourd’hui de notre grand traité donnera un grand élan au développement de nos relations et constituera une base solide pour aller de l’avant », avait souligné, depuis le Kremlin, le président iranien Pezeshkian. Pour sa part, le président russe Poutine a salué un accord « aux objectifs ambitieux », tout en insistant que les liens entre les deux pays « sont considérables et mutuellement bénéfiques ».
Cet accord intervient alors que les deux pays font face à plusieurs défis économiques. Cependant, le rapprochement entre la Russie et l’Iran n’est pas nouveau et il répond surtout à des facteurs géopolitiques. En 2001, un accord stratégique avait été signé entre Moscou et Téhéran, établissant les principes de la coopération entre les deux pays. Il s’agissait d’une période de 10 ans, renouvelable automatiquement tous les 5 ans.
« A la lumière des développements internationaux et régionaux dans lesquels les intérêts de Moscou et de Téhéran se rencontrent, les deux parties ont cherché à élargir les domaines de coopération par le biais d’un nouvel accord visant à développer la coopération, surtout dans les domaines de la défense, du commerce, de l’énergie, de la technologie et de l’exploration spatiale », explique Rania Makram, experte au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. La Russie avait d’ailleurs participé à la construction d’un réacteur nucléaire à la centrale nucléaire de Bouchehr (1995-2010), la seule centrale actuellement opérationnelle en Iran. Moscou fournit également de l’uranium enrichi à l’Iran. « L’Iran cherche à développer le nucléaire civil, et cela fait des années qu’on parle de contrats avec la Russie pour la construction de réacteurs nucléaires », explique à l’AFP Thierry Coville, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (France), spécialiste de l’Iran. « Il est probable que cet accord permette de finaliser certains projets en ce sens », ajoute-t-il.
Aussi, les deux pays travaillent sur un corridor ferroviaire et naval de transport international Nord-Sud, reliant la Russie et l’Inde, via Bakou (Azerbaïdjan) et Téhéran, et permettant de contourner certaines sanctions internationales.
Nouvelle configuration mondiale
Outre les intérêts économiques mutuels, la géopolitique est aussi au rendez-vous. Moscou et Téhéran ont essuyé des échecs et une perte d’influence dans la région du Moyen-Orient, en particulier avec la chute du régime de Bachar Al-Assad. Les deux pays affrontent également des crises avec l’Occident à cause de la guerre en Ukraine pour la Russie, du nucléaire et du rôle iranien dans la région pour l’Iran. Les pays occidentaux accusent également Téhéran d’aider Moscou dans sa guerre en Ukraine en envoyant des drones.
Surtout l’accord est intervenu à quelques jours avant l’investiture de Donald Trump. Ce dernier est très intransigeant à l’égard de Téhéran et entend limiter l’influence russe. C’est ainsi que la signature de cet accord constitue un message à l’Occident, notamment aux Etats-Unis. « L’Iran et la Russie veulent dire, à travers cette alliance, qu’ils sont capables de faire beaucoup de choses malgré les sanctions imposées contre eux », indique Makram.
Reste à savoir quelle sera la réaction des Etats-Unis. Selon la chercheuse, il est tôt d’évaluer l’effet de cet accord avant la mise en oeuvre de ses clauses, d’autant plus qu’il s’étend sur 20 ans. « Les Etats-Unis vont sans doute hausser le ton. On s’attend à ce que Trump impose davantage de mesures strictes contre les deux pays », conclut-elle.
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