En seulement quatre mois, l’exposition « Au sommet de la pyramide : la civilisation égyptienne antique » a attiré à Shanghai 1 million de visiteurs chinois. Regroupant 787 pièces antiques variées, dont 350 provenant du Musée égyptien du Caire et plus de 400 artefacts récemment découverts dans la nécropole de Saqqara. L’exposition, qui met en lumière l’histoire de la civilisation égyptienne, connaît un succès retentissant. « L’exposition offre un voyage unique à travers le temps, montrant les périodes de prospérité de l’Ancien Empire jusqu’à l’époque tardive », explique Mohamed Ismail Khaled, secrétaire général du Conseil Suprême des Antiquités (CSA).
Outre les expositions physiques, une salle dédiée à la réalité virtuelle permet aux visiteurs de découvrir la civilisation égyptienne antique de manière immersive. Intitulée « La disparition du pharaon Chéops », une exposition immersive qui offre aux visiteurs une expérience virtuelle de 45 minutes est proposée par le musée. Grâce à une technologie de réalité virtuelle de pointe, cette expérience permet de plonger dans la vie quotidienne des bâtisseurs des pyramides et des grands rois de l’Egypte Antique.
Selon le site officiel du musée, l’exposition marque la première collaboration entre un musée d’Etat chinois et le gouvernement égyptien, tout en étant la plus grande exposition égyptienne jamais organisée hors d’Egypte, notamment en Asie.
Le 25 novembre, la millionième visiteuse, Hua Jiawen, une étudiante de 21 ans originaire de Changzhou, a reçu un sac renfermant des cadeaux et un catalogue détaillé de l’exposition des mains du directeur du musée de Shanghai. « Nous avions planifié cette visite pour enrichir nos connaissances sur l’Egypte Ancienne, mais je ne m’attendais pas à être aussi chanceuse et à devenir la millionième visiteuse ! », a-t-elle déclaré aux médias. Hua Jiawen, étudiante en art, était accompagnée de plusieurs camarades de classe.
Selon le Musée de Shanghai, 70 % des visiteurs ne sont pas originaires de Shanghai, mais viennent de différentes villes chinoises. Dès son inauguration le 19 juillet, et malgré la chaleur estivale, les visiteurs faisaient la queue devant le musée pour découvrir cette exposition très attendue. Quelques mois avant son ouverture, le musée avait déjà vendu 250 000 billets, garantissant que les deux premiers mois étaient complets. Le jour de l’inauguration, 12 000 visiteurs ont admiré les statues, bustes, sarcophages et momies retraçant l’histoire de l’Egypte Ancienne. Au cours des deux premières semaines, 135 000 personnes ont visité l’exposition.
Pour faire face à cette affluence exceptionnelle, le musée a prolongé les horaires d’ouverture. Les mardis, mercredis, jeudis et vendredis, il accueille désormais les visiteurs en soirée, de 17h à 21h, permettant ainsi à 4 000 personnes supplémentaires par jour d’accéder à l’exposition, notamment pendant les vacances scolaires et universitaires. A partir de décembre, les horaires ont été encore prolongés : tous les vendredis et samedis, le musée est ouvert de 9h à 21h, avec une capacité d’accueil accrue de 3 000 visiteurs supplémentaires pour chaque session nocturne.
En septembre, le musée a également assoupli les conditions d’accès, permettant aux visiteurs de venir sans réservation préalable, avec pour seule condition de présenter leur carte d’identité. « Apportez votre carte d’identité et préparez-vous à être émerveillés par les expositions du musée », annonçait alors le musée.
Jour après jour, l’exposition enregistre une fréquentation impressionnante. Chu Xiaobo, directeur du Musée de Shanghai, a déclaré : « Le précédent record pour une exposition égyptienne à l’étranger a été établi au Metropolitan Museum of Art de New York en 1978, avec 1,36 million de visiteurs. Compte tenu des tendances actuelles, nous sommes sur la bonne voie pour dépasser ce record, avec une estimation de 4 millions de visiteurs d’ici la fin de l’exposition, en août 2025 ».
Le Musée de Shanghai a également rapporté que les ventes de répliques et de produits culturels et créatifs liés à l’exposition ont dépassé les 140 millions de yuans, soit environ 20 millions de dollars américains. A noter que le Musée de Shanghai, considéré comme l’un des plus prestigieux de Chine, abrite une collection de près de 1,02 million d’objets, dont 140 000 sont classés comme trésors nationaux.
Sept musées égyptiens ont collaboré à l’organisation de ce grand événement, dont le Musée égyptien de la place Tahrir, ceux de Kafr Al-Cheikh, de Louqsor, d’Ismaïliya et le Musée national de Suez. « Chaque musée a offert une collection de pièces variées mettant en relief non seulement l’histoire, mais aussi l’art égyptien et le génie de cette civilisation antique », explique Lotfy Ghazy, directeur des affaires archéologiques au Musée égyptien du Caire. Il ajoute qu’un comité spécialisé a sélectionné les pièces, afin que chacune raconte une partie de l’histoire.
Selon lui, les coulisses des préparatifs sont la clé du succès de cette exposition. « Chaque pièce exposée a été soigneusement étudiée, photographiée en 3D et accompagnée d’un rapport détaillé tout au long de son voyage à l’étranger », précise-t-il. Il explique également que le ministère du Tourisme et des Antiquités reçoit chaque semaine un rapport du conservateur égyptien qui accompagne l’exposition, détaillant l’état de chaque pièce et la température de chaque vitrine.
Parmi les objets exposés, variés de par leur genre, leur forme et leur matériau, figurent des statues de pharaons célèbres tels qu’Amenemhat III et Mérenptah. « Le colosse de Mérenptah, fils de Ramsès II, fait partie de la collection en Chine. Cette pièce, autrefois exposée dans le jardin muséal du Musée thébain de Louqsor, pourrait, à son retour de Shanghai, être mise en valeur au Musée du Caire, aux côtés d’une stèle de la même époque », propose Ghazy.
L’exposition présente également une collection de bracelets en or incrustés de pierres précieuses, des statuettes en bronze représentant des divinités de l’Egypte Ancienne comme Osiris, Isis, Bastet, Hathor et Ibis, ainsi que des couronnes royales, des pièces de monnaie, des cartouches royaux et des vases canopes.
Le chat Bastet de Saqarra sous différentes formes.
L’exposition est divisée en trois grandes galeries couvrant un espace total de 3 000 m², chacune ayant un thème spécifique. « Le pays des pharaons » : cette section explore, à travers des pièces antiques, les mythes de la création de l’ancienne civilisation égyptienne ; « Les secrets de Saqqara » met en lumière les dernières découvertes de cette région, qui abrite la Grande Pyramide à degrés et est connue comme la plus vaste nécropole de l’Ancien Empire ; « L’ère de Toutankhamon » porte sur la précieuse collection illustrant la vie légendaire de ce jeune roi et la découverte de sa tombe.
« L’exposition est une excellente occasion pour promouvoir le tourisme sur le marché chinois », souligne Yomna Al-Bahar, vice-ministre du Tourisme et des Antiquités. Elle ajoute que l’Egypte adopte une stratégie ambitieuse visant à attirer près de 3 millions de touristes chinois d’ici 2028. A noter qu’en 2023, l’Egypte a accueilli plus de 200 000 touristes chinois, un chiffre en hausse de plus de 300 % par rapport à 2022.
Le ministère a également rapporté une augmentation annuelle du nombre de touristes chinois visitant l’Egypte, ce qui témoigne de l’importance de l’exposition dans l’éveil de l’intérêt international pour le pays. « Nous sommes ravis de collaborer avec le CSA de l’Egypte pour présenter une exposition majeure en Chine, la première au Musée de Shanghai, dans le cadre de notre initiative intitulée Dialogue avec le monde, qui vise à découvrir et à célébrer d’autres civilisations antiques », déclare le directeur du Musée de Shanghai. Il souligne que la Chine et l’Egypte partagent toutes deux une histoire riche et ancienne. Il rappelle également que l’Egypte a été non seulement le premier pays arabe, mais aussi le premier pays africain avec lequel la Chine a établi des relations diplomatiques.
Sarcophage anthropoïde finement décoré.
Le chat au centre des intérêts
Pour la première fois, des momies d’animaux, notamment de lions et de chats, ont quitté le territoire égyptien pour être temporairement exposées à l’étranger. « Jusqu’à récemment, l’Egypte interdisait la sortie de certaines pièces uniques, telles que les papyrus et les momies », explique Ghazy. Il précise que l’envoi de momies de chats provenant du Bubasteion, un temple dédié à la déesse Bastet, vise à promouvoir le site archéologique de Saqqara sur le plan touristique.
« Le chat est un symbole important tant pour les Anciens Egyptiens que pour les Chinois. Ces derniers accordent une grande importance aux chats : leur population a atteint plus de 120 millions en 2023, faisant des chats les animaux de compagnie les plus populaires en Chine », ajoute le secrétaire général du CSA. Associés à Bastet, déesse de la fertilité, de la naissance et de la protection, les chats étaient considérés comme sacrés dans l’Egypte Antique.
Dans le cadre de l’exposition, le Musée de Shanghai a annoncé l’organisation de nombreuses activités, dont dix événements en soirée où le public est autorisé à venir avec ses propres chats pour rendre hommage à Bastet. Le nombre de chats autorisés par événement est limité à 200. La première séance, qui s’est tenue le 27 juillet, a rencontré un franc succès, marquant un geste rare parmi les grands musées du monde.
Masque en cartonnage coloré.
« Lorsque nous avons planifié l’événement, nous avions prévu les chats comme thème principal, ce qui a donné naissance à l’idée des Meow Nights (nuits des miaulements) », explique Li Feng, directeur adjoint du Musée de Shanghai. Ces soirées immersives plongent les visiteurs dans une atmosphère dédiée à Bastet, avec des effets sonores simulant des miaulements.
Selon les organisateurs, toutes les précautions ont été prises : des vétérinaires sont présents sur place, un véhicule de service médical est stationné à proximité et des dispositifs adaptés aux chats sont mis en place. Après chaque événement, l’ensemble du musée est entièrement désinfecté, stérilisé et désodorisé. « Les nuits des miaulements ont été un grand succès. En marge de l’exposition, ces activités se poursuivront tout au long de l’événement », conclut le secrétaire général du CSA.
Tête du dieu Amon entourée d’autres divinités de l’Egypte Antique.
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