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La région en manque de méga-exportateurs

Névine Kamel, Mardi, 22 avril 2014

Une étude américaine récente montre la maigre performance des exportations de la région Mena. Cette faiblesse est expliquée, en partie, par l'absence des « superstars », ces grandes entités industrielles jugées capables de développer l’économie.

Mena
Les exportations du Mena sont encore inférieures au potentiel de la région.

Le Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord) exporte au tiers de son potentiel. Et cela en dépit d’un nombre important de multinationales basées dans la région, comme Lafarge et Unilever. En 2012, selon les chiffres du Régulateur des investissements de Dubaï, la valeur des exportations de la région a enregistré 1200 milliards de dollars, alors que les importations s’alignent à environ 3000 milliards de dollars. Les exportations pétrolières s’emparent de presque 70% de ce chiffre. « Si on exclut les exportations pétrolières, les exportations de la région Mena sont équivalentes à celles de la Suisse, qui compte moins de 8 millions d’habitants », selon un document de l’USAid datant de 2012.

L’étude récente menée par Caroline Freund, de l’Institut Peterson pour l’économie internationale (Etats-Unis), sur la performance de l’industrie dans la région Mena et le volume des exportations qui en résulte, invite les gouvernements de la région à encourager l’implantation d’importantes entités industrielles, qui seront les moteurs du développement des exportations et développeront l’économie.

« Malgré une amélioration de la performance des exportations dans la région ces deux dernières décennies, en raison de la libéralisation du commerce et des accords commerciaux bilatéraux et régionaux, les exportations restent inférieures à leur potentiel », estime Freund, en soulignant que la part des exportations mondiales du Mena a diminué pendant cette période.

Pourquoi une telle baisse? Freund, dans son étude présentée lors d’un séminaire organisé la semaine dernière au Caire par l’Economic Research Forum (ERF) sur « La diversification des exportations dans la région Mena », l’explique par l’absence de grandes entités industrielles capables d’exporter. « Ces superstars de l’exportation », comme elle les qualifie, sont la locomotive de la croissance et la diversification des exportations. « Quand on parle des superstars, on parle des entités industrielles relativement importantes, capables de réaliser une croissance rapide. Et les pays de la Mena, malheureusement, n’en possèdent qu’un nombre limité. C’est là le noyau de la crise », dit-elle.

Des freins structurels

Freund a traité le volume des exportations et leur évolution dans 32 pays non exportateurs de pétrole au cours de la période 2004-2010. Pour elle, la conclusion est claire. A chaque fois que le nombre de grandes entités industrielles augmente, le volume et les différents segments d’exportation augmentent. Pour le Costa Rica, l’arrivée d’Intel a été déterminante dans la croissance du secteur des technologies, alors qu’il n’existait pas avant dans le pays.

Dans la région Mena, les « superstars » ne représentent au total que 10% au maximum des entreprises de chaque pays. « Et elles contribuent à plus de la moitié de la croissance générale dans ces pays », ajoute l’économiste.

Les entreprises familiales sont un élément commun aux pays de la région Mena. En Tunisie par exemple, 83% des entités industrielles sont familiales. C’est-à-dire de petites entités qui n’emploient que quelques centaines de personnes et qui ne sont pas en mesure de développer l’économie. La situation en Egypte, poursuit Freund, n’est pas meilleure. Il est vrai que ce pays possède un plus grand nombre de « superstars », mais « il est encore limité et incapable de viser des produits de bonne qualité capables d’envahir le marché extérieur », dit Freund, en mentionnant que la création des dernières grandes industries en Egypte remonte à 2002. Sous Moubarak, l’ancien ministre du Commerce et de l’Industrie, Rachid Mohamad Rachid, a été un parrain de ce concept. Mais en raison du chevauchement des intérêts politiques et économiques, la tâche n’a pas été bien menée. « En Egypte, cette affaire n’a pas été correctement gérée. Un petit cercle d’hommes d’affaires s'est toujours partagé les soutiens financiers et les profits, sans prendre en compte le bien de l’économie », note Freund.

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