Je n’arrive pas à croire que 30 ans se sont écoulés depuis la fondation du journal Al-Ahram Hebdo. C’était en 1994, et j’avais participé, avec mon cher collègue défunt Hosni Guindi, à la création du journal en langue anglaise Al-Ahram Weekly, dont j’étais directeur de rédaction.
Après le succès rencontré par Al-Ahram Weekly, la direction de la Fondation de presse Al-Ahram m’a demandé de créer un journal destiné aux lecteurs francophones. Il me fallait alors trouver une formule différente de celle d’Al-Ahram Weekly, en raison des différences entre les lecteurs anglophones et francophones. La nouvelle équipe de rédaction et moi-même nous sommes retrouvés face au dilemme habituel que l’on rencontre dans le monde arabe : trouver le langage adéquat pour s’adresser au monde extérieur. Cela va au-delà du simple usage d’une langue étrangère ; il s’agit de découvrir ce qui touche le lecteur étranger, ce qui ne l’attire pas ou ce qui pourrait même avoir un effet négatif. Le problème de la plupart de nos communications médiatiques avec l’Occident a été la simple traduction de notre discours local dans des langues étrangères, comme si nous nous adressions à nous-mêmes, mais dans une langue autre que la nôtre.
L’équipe de rédaction a déployé de nombreux efforts pour adopter le langage adéquat. Puis nous sommes passés à l’étape suivante : déterminer comment cela se refléterait dans le caractère du journal. La nature du discours influence la forme du journal et son style journalistique. C’est ainsi qu’Al-Ahram Hebdo a vu le jour sous un format de petit tabloïd, tandis qu’Al-Ahram Weekly était en format broadsheet, plus grand. Al-Ahram Hebdo a commencé en couleur, tandis qu’Al-Ahram Weekly était en noir et blanc.
Al-Ahram Hebdo s’appuyait sur des articles courts, alors que certains articles pouvaient occuper une page entière ou une demi-page dans Al-Ahram Weekly. L’image jouait aussi un rôle important dans Al-Ahram Hebdo. Pendant une longue période, nous avons imprimé des numéros expérimentaux et les envoyions aux ambassadeurs étrangers et aux résidents en Egypte pour recueillir leurs avis.
Mais la plus grande épreuve est survenue lorsque nous avons fait appel à la plus importante société de distribution de journaux en France et dans les pays francophones pour diffuser Al-Ahram Hebdo à l’étranger. Elle a demandé à recevoir plusieurs exemplaires du journal avant d’accepter de le distribuer.
En 1997, je suis allé rencontrer l’ancien ministre français des Affaires étrangères, Hubert Védrine, à son bureau au Quai d’Orsay, et j’ai trouvé Al-Ahram Hebdo sur son bureau. Il m’avait alors dit que notre journal était devenu pour lui la principale source pour suivre l’actualité au Moyen-Orient .
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