« L’Organisme de l’Avenir de l’Egypte pour le développement durable (Future of Egypt for Sustainable Development, FESD), créé conformément à un décret présidentiel en 2022, commencera le développement du lac Bardawil », a annoncé un communiqué du Conseil des ministres, qui a en même temps démenti la rumeur selon laquelle le lac allait être vendu à un investisseur étranger. « Les marinas de pêche seront modernisées pour augmenter la production et le commerce du poisson, ce qui permettra d’augmenter les revenus des pêcheurs et des travailleurs du lac », a souligné le communiqué.
Le lac Bardawil, qui dépendait de l’Autorité de développement de la richesse piscicole puis de l’Autorité de la protection des lacs et des êtres marins, est le deuxième plus grand lac d’Egypte, situé au nord de la péninsule du Sinaï, sur la Méditerranée. D’une longueur d’environ 90 km et d’une largeur d’environ 22 km, il couvre une superficie de près de 700 km² (environ 165 feddans) avec une profondeur de 3 m seulement. Il est séparé de la Méditerranée par un étroit corridor sablonneux, et son importance économique réside dans sa richesse piscicole.
Soulignant l’importance des ressources de ce lac, l’expert en hydrologie Nader Noureddine explique que « Bardawil est un lac désertique qui n’est entouré d’aucune terre agricole, aucun bâtiment résidentiel ni complexe industriel. Ses eaux sont très salées et pures car aucun déchet n’y est déversé. C’est pourquoi ses poissons sont de très bonne qualité et sont exportés vers les pays européens ».
Ce n’est pas la première fois que le gouvernement accorde un intérêt particulier au développement du lac Bardawil. En 2016, il a lancé un vaste plan de développement comprenant la modernisation de quatre marinas de pêche, la mise en place d’unités de réfrigération et de conservation des poissons, ainsi que l’élimination de plus de 3 500 tonnes de débris. Puis, en 2020, le président Abdel Fattah Al-Sissi a ordonné d’accorder une attention particulière au développement du lac dans le cadre des projets de développement du Sinaï.
Revendications des pêcheurs
« Entre 2017 et 2022, l’amélioration des conditions sécuritaires et l’intérêt accordé par l’Etat ont permis une production abondante », explique Cheikh Salem Al-Touny, chef de l’Association du 6 octobre, l’une des six associations non officielles qui soutiennent directement les pêcheurs du lac Bardawil et leurs familles. Il poursuit : « En 2022, il a fallu procéder à une purification du fond du lac par le biais de dragueurs, ce qui a causé la disparition d’une grande partie des alevins et, par conséquent, la production a baissé ».
Les pêcheurs espèrent que l’Organisme de l’Avenir de l’Egypte pour le développement durable pourra résoudre tous les problèmes entravant l’augmentation de la production, qui avait atteint environ 3 000 tonnes par an avant 2022. « L’organisme doit fermement interdire la pêche clandestine des alevins, qui affecte la productivité du lac. Des propriétaires d’élevage piscicole privé pêchent les alevins et les transportent vers leurs fermes », se plaint Cheikh Eid Abou-Regl, chef de l’Association des pêcheurs du Sinaï. « Nous réclamons depuis longtemps l’ouverture de deux détroits fermés parmi les quatre entre la mer Méditerranée et le lac afin de permettre le passage des alevins et d’assurer une diversité et une abondance des poissons cultivés dans le lac, tout en évitant de trop s’approfondir lors des travaux d’évacuation des sables du fond du lac à l’aide des dragueurs », poursuit-il.
3 500 pêcheurs travaillent dans le lac Bardawil, qui constitue l’unique source de revenu pour les habitants de cette région du Nord-Sinaï, encore sous-développée. Ils oeuvrent dans le commerce et le transport du poisson, la fabrication de filets de pêche ou encore dans la réparation de bateaux. En 2020, le gouvernorat du Nord-Sinaï a construit des maisons bédouines dans les villages des pêcheurs de la région d’Eghziwan, au sud du lac, après que le président de la République avait ordonné de les octroyer aux pêcheurs avec une réduction de 55 % de leur prix, dans le cadre du plan de développement du lac, qui comprenait également la prise en charge de l’infrastructure, des routes et des services publics.
Le gouvernorat a également inauguré une école secondaire, d’un coût de 25,3 millions de L.E., qui fournit un enseignement spécialisé aux étudiants intéressés par la pêche et la navigation maritime. « Nous aspirons à ce que l’Etat continue de soutenir les pêcheurs et leurs familles et d’améliorer leurs conditions de vie à travers plus de services », reprend Al-Touny. « Nos recommandations seront mises sur la table. Nous avons, en effet, demandé une réunion avec les responsables de l’Organisme de l’Avenir de l’Egypte, qui ont immédiatement promis d’organiser une rencontre avec les chefs des associations de pêcheurs dans les jours à venir », a-t-il assuré. Entretemps, le Conseil des ministres a signalé que le gouvernement avait donné ses instructions pour accorder des aides sociales aux pêcheurs, afin de les aider jusqu’à ce que le lac retrouve sa capacité de production.
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