Toute une vie sur la toile.
Elle étale sur les toiles ses créatures étranges, issues d’histoires légendaires, de mythes, de contes de fées, de patrimoine folklorique, de fêtes rituelles, de mythologies, de motifs populaires égyptiens et coptes, de calligraphies arabes ... Tels sont les composants de l’univers artistique mystérieux et surréaliste d’Evelyn Ashamallah dont les peintures exposées cherchent à résumer 50 ans de carrière, de 1970 jusqu’à présent.
Tout y est narré à la manière dadaïste d’Ashamallah, pleine d’effervescence créative, de folie, d’inconscience et de zones mystérieuses. La joie des couleurs bariolées complète la vivacité des lignes.
« C’est ma première rétrospective. Elle comprend 150 peintures à l’huile, à l’acrylique, avec de la cire. C’est le fruit d’une longue carrière et d’une vie que j’ai passée avec simplicité, en laissant libre cours à mon imagination et en contemplant la magnifique nature égyptienne. Je retrouve dans les rues une source inépuisable d’inspiration et de réflexion. Je dessine tous les visages que je connais, et ceux que je connaîtrais éventuellement, toutes les formes que j’ai rencontrées et que je rencontrerais. Les dessins sont ma provision de tous les jours. Je dessine parce que l’étonnement est le chemin de la connaissance. Je dessine encore pour respirer le parfum de la mémoire », écrit Evelyn Ashamallah dans le catalogue de l’exposition. Le centre-ville cairote où elle habite depuis 14 ans est sa tanière. La foule qui y circule et son vacarme l’inspirent. C’est de là que Ashamallah observe les gens, puis les transforme en créatures fantasmagoriques. Sont-ils des êtres humains ou des démons ? Ces gens qui changent de nature bougent constamment dans ce que Ashamallah appelle « le cirque de la vie », celui des temps modernes.
La rétrospective abonde en diseuses de bonne aventure, en charlatans, en personnes envieuses, en marchands de légumes, en enfants qui jouent dans la rue … Bref, tout un monde carnavalesque signé par Ashamallah qui vit dans la joie des couleurs et des histoires humoristiques. C’est une femme mûre qui maîtrise l’art de l’expression narrative.
Des personnages fantasmagoriques inspirés du quotidien.
La fille de Dessouq
C’est dans le Delta, précisément dans la ville de Dessouq, au gouvernorat de Kafr Al-Cheikh, qu’a grandi l’artiste, entourée de paysages champêtres et de verdure. Enfant, elle aimait écouter les contes populaires égyptiens que lui racontaient sa mère et ses tantes, et elle aimait également fréquenter les chapiteaux du cirque, les cercles de zikr (louanges de Dieu), les fêtes foraines et religieuses, notamment celles commémorant des saints, dont Sidi Ibrahim Al-Dessouqi. Ce riche héritage visuel a marqué très tôt le style de Ashamallah, qui excelle à combiner la réalité à la fantaisie. Elle est une disciple de Abdel-Hadi Al-Gazzar et de Hamed Nada, dont les tableaux multiplient des figures naïves et expressives qui volent librement dans le vide. Pourtant, Ashamallah refuse d’appartenir à une école ou à un mouvement artistique spécifique. Son travail s’inspire de ses propres souvenirs, des personnes qu’elle rencontre comme des lieux qu’elle fréquente au quotidien.
Elle fait partie de la génération d’artistes des années 1970 qui, après la défaite de 1967, ont adopté des tendances différentes du réalisme qui dominait l’art visuel égyptien dans les années 1960. Le surréalisme donne à Ashamallah l’occasion de plonger dans l’imagination. « Peindre, cela me réjouit. J’aime sortir des sentiers battus et animer un monde sans barrière ni restriction, un monde joyeux et juvénile », conclut Evelyn Ashamallah.
Galerie Azad. 4, rue Mohamad Anis, Zamalek, de 10h à 21h (sauf le vendredi).
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