Du popcorn au coin de la rue.
L’artiste est toujours là aux aguets, en train de les scruter afin de les représenter de manière dramatique avec une douce ironie. « Ces gens simples sont le pouls de la ville », déclare Rached, ajoutant : « Je favorise toujours le côté humain, l’art qui traite de la société et des petites gens ».
A combien les bananes ?
L’arrière-fond de ses tableaux est fait de rues asphaltées (matériau de revêtement routier). D’où le titre de son exposition Sur l’Asphalte. Sur ce champ chromatique teinté de couleurs grisâtres et entouré d’espaces floues, synonymes de fumée, de brouillard, de malaise social, d’indifférence, de distorsion, de laideur, Rached effectue un travail de Photoshop pour placer des gens simples et laborieux. Le résultat ? Des peintures à l’acrylique sur canevas, à caractère purement égyptien, loin du pop art qui singularisait ses premières expositions.
Les couleurs éclatantes des tenues vestimentaires des personnages sont en contraste avec les couleurs grisâtres de l’arrière-fond des toiles. « J’ai la nostalgie du bon vieux temps de mon enfance, surtout dans notre monde actuel qui ressemble à une farce ridicule », précise Hani Rached, qui ne cesse d’installer ses personnages dans un monde tridimensionnel flou, plein de distorsion. « Créer du mouvement, c’est mon but ultime. Le jeu des dimensions donne l’impression que les personnages sortent littéralement de la toile pour évoquer le temps présent, mais aussi un temps révolu, sans stress, ni anxiété, ni bidonvilles, ni déclin des valeurs sociales, culturelles et morales. Je cherche à donner corps aux paradoxes du passé-présent, en jouant sur la fiction et la réalité. Il nous faut quand même un peu de contraste pour pimenter notre vie, pour surmonter les défis et les obstacles ».
Des zombies dans la rue
En passant d’une peinture à l’autre, Rached soulève plusieurs questions : qu’est-ce qui a mené les Egyptiens à cet état de distorsion ? Qu’est-ce qui a bouleversé les attitudes et le système des valeurs ? « Les Egyptiens ont changé au cours des dernières années. Les gens flânent dans les rues cairotes comme des mannequins sans âmes. Est-ce que c’est la culture de la pauvreté et de l’injustice sociale ? S’agit-il du poids des conditions économiques difficiles qui ont engendré ce genre de comportement au sein d’une société qui a perdu ses idéaux ? », s’interroge Rached.
L’exposition Sur l’Asphalte nous invite à suivre les gestes et les mouvements de tous ces passants qui semblent sortir d’une bande dessinée.
Jusqu’au 9 octobre, de 10h à 20h (sauf le vendredi), à la galerie Misr. 4, rue Ibn Zinki, Zamalek.
Lien court: