Al-Ahram Hebdo : Les Etats-Unis comptent une grande communauté arabo-musulmane. Une bonne partie de cette communauté est frustrée par le soutien continu des Etats-Unis à Israël, fait qui a incité une bonne partie de cette communauté à ne pas s’engager pleinement en faveur d’un candidat à l’élection présidentielle de novembre. Comment percevez-vous cette situation ?
Brenda Abdel-Al : Ces élections ont une grande importance étant donné les facteurs internes et externes qui affectent la société américaine comme le conflit israélo-palestinien et les politiques économiques et sociales qui touchent les groupes marginalisés. L’un des plus importants défis est de regagner la confiance de certaines catégories de la population qui ont été frustrées par les politiques actuelles, comme la communauté arabo-musulmane.
En tant que candidate démocrate, Kamala Harris s’efforce de changer cette frustration, en montrant son engagement à défendre les droits civils et à lutter contre l’islamophobie. La campagne de Mme Harris a fait des progrès significatifs dans la reconstruction des liens avec la communauté arabo-musulmane à la fois en prenant connaissance de leurs préoccupations et en transmettant des messages clairs sur les politiques futures de Mme Harris.
L’une des réalisations les plus importantes a été l’ouverture d’un dialogue avec les dirigeants des communautés arabo-musulmanes dans des Etats critiques comme le Michigan, où Mme Harris a démontré son engagement à les rencontrer directement. La vice-présidente s’est engagée à oeuvrer pour préserver les libertés que nous chérissons tous, d’où son engagement à toujours ouvrir la porte au dialogue et à la communication avec la communauté arabo-musulmane non seulement pendant la campagne, mais aussi de manière générale. C’est ce type d’approche qui fait la spécificité de cette campagne.
Kamala Harris a rencontré des membres de la communauté américano-palestinienne qui ont perdu des proches à Gaza et elle était impatiente d’entendre parler de leurs souffrances et des détails de leurs expériences directes. Il s’agissait d’une réunion très importante qui reflète l’engagement de la campagne à écouter les voix de cette communauté, qui traverse une période très délicate dans le contexte des tensions actuelles.
Mais le plus grand défi pour la campagne de Mme Harris est de faire face aux politiques de l’Administration actuelle, que certains électeurs accusent de ne pas adopter de position ferme sur les questions internationales telles que le conflit à Gaza.
— Mais la communauté arabo-musulmane des Etats-Unis ne forme pas de bloc homogène, elle se caractérise par une grande variété d’intérêts et de priorités. Comment la campagne de Mme Harris entend-elle surmonter ce défi ?
— Certes, la communauté arabo-américaine n’est pas un bloc homogène, mais plutôt une communauté avec des opinions et des priorités diverses, c’est pourquoi nous travaillons sur une stratégie précise de communication avec cette communauté. Trump représente une véritable menace pour cette communauté, que ce soit par ses politiques étrangères ou par ses décisions liées à l’interdiction de voyager dans les pays à majorité musulmane, des questions qui affectent directement la vie des Arabes et des musulmans. Nous voulons délivrer des messages très spécifiques qui répondent aux besoins de ces communautés, que cela se rapporte à la politique étrangère ou aux questions internes. Mme Harris ne se contente pas de réunions formelles. Elle suit également de près les contacts déployés auprès de divers dirigeants des communautés arabes et musulmanes aux Etats-Unis. Lors de sa récente visite à Détroit, la vice-présidente a rencontré les dirigeants de l’Uncommitted, un mouvement émergent d’Américains arabes et musulmans qui ont décidé d’exprimer leur mécontentement à l’égard de certaines politiques antérieures. Cette rencontre n’était que le début d’une série de réunions que la directrice de campagne a tenues avec des dirigeants musulmans, arabes et palestiniens à Détroit.
— Vous dites que les politiques du candidat républicain Trump représentent une menace pour la communauté arabo-musulmane. Quelles sont les réalisations de l’Administration Biden-Harris en matière de soutien à cette communauté ?
— Notre approche est totalement différente. Par exemple, pour la première fois, une catégorie « Moyen-Orient et Afrique du Nord » a été ajoutée au recensement américain. Cette réalisation renforce la représentation des Arabo-Américains dans les statistiques nationales et contribue à l’obtention de données plus précises qui peuvent soutenir la recherche et les politiques futures.
— Cette ouverture à la communauté arabo-musulmane n’est-elle pas temporaire et destinée exclusivement à des fins électorales ?
— Cette ouverture à la communauté arabe n’est pas temporaire, elle s’inscrit, au contraire, dans une stratégie à long terme. La vice-présidente s’est engagée à préserver les libertés que nous chérissons tous, et les portes resteront toujours ouvertes pour entrer en contact avec les communautés arabe et musulmane non seulement pendant la campagne, mais aussi dans le cadre d’une future administration.
— En tant que conseillère de Kamala Harris pour les questions arabes, quel est concrètement votre rôle dans la campagne électorale ?
— Mon rôle est de mettre à profit ma longue expérience pour renforcer les contacts avec les communautés arabe et musulmane au sens large. J’ai travaillé sur les questions de discrimination raciale et religieuse pendant de nombreuses années, et ce rôle me permettra de renforcer ces contacts et de faire entendre les voix arabo-musulmanes et de leur donner de l’influence lors des prochaines élections.
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