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S’adapter à la chaleur, une ingéniosité de l’Ancien Egyptien

Dalia Farouq , Mercredi, 11 septembre 2024

Depuis la nuit des temps, l’homme apprend à s’acclimater avec son milieu. De la civilisation égyptienne à l’architecture islamique, les techniques de construction et les méthodes de gestion de l’environnement ont su affronter les températures élevées.

S’adapter à la chaleur, une ingéniosité de l’Ancien Egyptien

Avec les vagues de canicule qui touchent l’Egypte depuis le début de l’été, une question se pose : comment les Anciens Egyptiens ont-ils affronté la chaleur intense dans un pays connu par son climat désertique sauf sur les côtes ? Selon Magdi Shaker, archéologue au ministère du Tourisme et des Antiquités, les Anciens Egyptiens ont développé des stratégies et des pratiques innovantes pour gérer et atténuer les effets de la chaleur. « L’un des aspects les plus remarquables dans l’architecture de l’Egypte Ancienne est sa capacité à maintenir des températures intérieures fraîches malgré la chaleur extérieure. En effet, la plupart des maisons égyptiennes à cette époque étaient construites en torchis pour ses propriétés d’isolation thermique et de régulation de l’humidité. Les autres édifices comme les palais et les temples avaient des murs épais conçus en grosses pierres et des toits avec des terrasses permettant de protéger les espaces intérieurs de l’excès de chaleur », explique Shaker.

Techniques de climatisation

Selon lui, les Anciens Egyptiens ont inventé des techniques de climatisation, des milliers d’années avant l’invention du climatiseur. Ils avaient une méthode innovante pour capter la « brise ». Les maisons étaient dotées de petites fenêtres, souvent orientées vers le nord pour capter la brise fraîche et assurer la circulation de l’air à l’intérieur et climatiser de la sorte les maisons. Ils utilisaient aussi des « pièges à vent » pour créer un système de ventilation naturelle dans les bâtiments. « Ce sont des tuyaux installés au sommet du bâtiment, avec une ouverture orientée vers la direction du vent dominant, dans le but d’exploiter son énergie cinétique. Ces tuyaux captent le vent depuis le sommet du bâtiment, où il est plus fort et plus frais, puis le dirigent vers l’intérieur du bâtiment », explique Shaker, ajoutant que cette technique est utilisée depuis 1 300 av. J.-C., comme le montrent avec précision les représentations qui se trouvent dans la tombe de Nebamon, actuellement exposées au British Museum.

En effet, les Anciens Egyptiens avaient inventé aussi le « malqaf » aérien pour lutter contre la chaleur et fournir une ventilation naturelle dans les maisons. Les malqafs se composent de panneaux fixés à un cadre en bois orienté vers le vent, permettant à la brise d’entrer, ce qui contribue à humidifier la maison, rafraîchir les pièces, renouveler l’air et introduire de la lumière. Ils sont placés au sommet de la grande salle de la maison, dont le plafond est plus élevé que celui des autres salles, soutenu par des colonnes.

En plus du malqaf aérien, les Anciens Egyptiens utilisaient des éventails pour lutter contre la chaleur. Les représentations sur les parois des temples montrent son utilisation fréquente. Ces éventails étaient fabriqués à partir de plumes d’autruche, spécialement ramenées de Nubie pour les rois. Ils utilisaient des rideaux ou des tissus pour couvrir les fenêtres pendant les heures les plus chaudes de la journée, permettant ainsi de filtrer la lumière directe du soleil tout en favorisant la circulation de l’air. En outre, ils avaient conscience de l’importance de l’eau pour le confort et la survie dans le climat chaud. Ils avaient accès au Nil, qui était une source vitale pour les activités quotidiennes et les rituels. Les piscines et les bassins étaient courants dans les demeures des élites, et les bains étaient utilisés pour se rafraîchir.

D’après Shaker, les Anciens Egyptiens adaptaient leurs activités quotidiennes pour éviter les heures les plus chaudes de la journée. Le travail extérieur, comme l’agriculture et la construction, était effectué soit très tôt dans la matinée, ou en fin d’après-midi, lorsque les températures étaient plus supportables. « Les vêtements jouaient, également, un rôle crucial dans la gestion de la chaleur chez les Egyptiens. Ils portaient des vêtements en lin, légers et amples, pour aider à évacuer la transpiration et permettre une meilleure circulation de l’air. Les vêtements blancs étaient particulièrement populaires car ils reflétaient la lumière du soleil plutôt que de l’absorber, aidant ainsi à maintenir la fraîcheur du corps », explique-t-il.

Des techniques inspirantes

L’architecture islamique est fortement influencée par les pratiques anciennes des civilisations, notamment celle de l’Egypte Ancienne. « Bien que l’architecture islamique ait été façonnée par des influences diverses et des contextes régionaux, son approche de la gestion de la chaleur est très proche des méthodes et techniques utilisées par les Anciens Egyptiens », note l’archéologue Ahmed Amer.

Comme les Anciens Egyptiens, les architectes islamiques ont utilisé des matériaux de construction qui offraient de bonnes propriétés d’isolation thermique. Les murs épais en torchis ou en briques en terre cuite, souvent utilisés dans les bâtiments islamiques traditionnels, sont efficaces pour régler la température intérieure en conservant la fraîcheur pendant la chaleur extrême et en la libérant lentement la nuit.

« Les murs épais des maisons égyptiennes fonctionnaient de manière similaire en tant que tampon thermique, un concept qui a influencé les pratiques de construction dans les régions à climat chaud, y compris dans le monde islamique », rapporte Amer.

Selon lui, l’ingéniosité de l’architecture islamique était bien claire lorsqu’elle met l’accent sur l’aération et l’ombrage pour atténuer les effets de la chaleur. Les cours intérieures, les arcs et les colonnes, ainsi que les moucharabiehs sont des caractéristiques courantes. Les cours offrent des espaces ombragés et frais, les fontaines et les bassins sont aussi une caractéristique emblématique de l’architecture islamique. Ils sont souvent placés dans les cours, les jardins et les mosquées pour offrir un effet de refroidissement par évaporation et créer une atmosphère de fraîcheur toujours comme chez les Anciens Egyptiens qui ont connu l’influence de l’eau dans le rafraîchissement.

Les toits plats et les terrasses sont courants dans l’architecture islamique. Ces espaces étaient utilisés pour des activités nocturnes. En plus, les toits étaient conçus pour refléter le soleil ou pour être recouverts de matériaux réfractaires pour réduire l’absorption de la chaleur.

La civilisation égyptienne a développé une approche multifacette pour affronter la canicule qui combine ingénierie architecturale, utilisation intelligente des ressources et adaptation culturelle. L’architecture islamique partage avec celle pharaonique des principes de conception visant à atténuer les effets de la chaleur et à transformer les défis climatiques en opportunités de confort. Cette continuité dans l’ingéniosité architecturale souligne leur compréhension approfondie de leur environnement, ainsi que l’importance de l’adaptation au climat dans le développement des habitats humains à travers les âges.

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