
Les coupures de courant sont particulièrement fréquentes en Egypte depuis août 2008. (Photo : Reuters)
On les avait presque oubliées ces fameuses coupures de courant très fréquentes en été. Pourtant, depuis quelques semaines, elles sont récurrentes, malgré la traditionnelle baisse de la consommation d’énergie en hiver. Dans plusieurs quartiers de la capitale, les coupures de courant ont causé des désagréments aux habitants, peu habitués à ce scénario en janvier ou février. « Nous étions habitués à ce genre de coupures en été, mais c’est la première fois que cela se produit en hiver », explique Aliaa, qui habite le quartier de Mohandessine. Outre Le Caire, certaines régions ont également été touchées par le phénomène. C’est le cas notamment à Hurghada, sur la mer Rouge, où les coupures de courant ont été particulièrement gênantes dans les restaurants et les hôtels, car les générateurs électriques ne peuvent pas toujours y remédier.
Les coupures de courant sont particulièrement fréquentes en Egypte depuis août 2008. Cependant, elles se limitaient à l’été où la consommation est plus grande en raison de la canicule et l’usage accru de la climatisation dans les entreprises et les foyers. Durant l’hiver (décembre, janvier et février), la consommation d’énergie se situe aux alentours de 22 000 mégawatts, tandis qu’en été, elle tourne autour de 34 000 mégawatts. Cela n’a pas empêché les coupures. Les raisons ?
« Une pénurie de carburant, spécifiquement de gaz naturel, nécessaire pour faire fonctionner les stations électriques », a affirmé le ministre de l’Electricité, Ahmad Imam, au cours de la réunion du comité de l’énergie tenue le 24 janvier sous la présidence du premier ministre, Hazem Al-Beblawy.
Pourtant, après la destitution de l’ancien président Mohamad Morsi le 3 juillet dernier, l’Egypte avait reçu 6 livraisons de carburant en provenance des Emirats arabes unis, dans le cadre d’une aide pour soutenir l’économie égyptienne. De même, le Koweït a livré à l’Egypte, pour 200 millions de dollars, de pétrole brut et de gasoil, dans le cadre d’un programme d’aide évalué à 4 milliards de dollars. « Le gouvernement devait recevoir également du Qatar 70 millions de pieds cubes de Gaz Naturel Liquéfié (GNL), qui était promis en juin dernier sous le gouvernement précédent. Mais, vu les tensions politiques entre l’Egypte et ce pays, ce convoi a été suspendu », souligne Aktham Aboul-Ela, porte-parole du ministère de l’Electricité. Toutes ces aides à l’énergie n’ont pas suffi à couvrir les besoins des centrales électriques. Les ministères de l’Electricité et du Pétrole envisagent à présent d’importer des quantités supplémentaires de carburant. Selon les spécialistes, les ressources en pétrole et en gaz naturel ne couvrent plus les besoins de la consommation électrique qui augmentent de 12 % par an.
Si cette situation continue, l’Egypte fera face d’ici 2 ans à une grave pénurie. Pour faire face à la hausse exponentielle de la consommation, l’Egypte a besoin d’investissements importants. Une intégration du secteur privé paraît donc indispensable. Le ministre du Pétrole, Chérif Ismaïl, avait réclamé la semaine dernière que « le gouvernement autorise les entreprises privées à importer du gaz, ce qui pourrait aider à faire face à la pénurie d’énergie sans imposer de charges supplémentaires au gouvernement ». Cet avis est partagé par les spécialistes, qui donnent d’autres raisons à la crise, comme l’absence d’investissement dans le secteur électrique, la mauvaise maintenance du réseau électrique et des centrales électriques, et un ralentissement dans la construction des nouvelles stations d’électricité. « Dans les années 1990, et sous la pression de la Banque mondiale, le secteur privé a commencé à participer à construire et à gérer des stations électriques, mais dans les années 2000, le gouvernement a suspendu ce système et a lancé à la place le système BOT, qui permet aux entreprises privées de construire des stations, de les gérer et de vendre l’électricité au gouvernement pendant une période de 25 ans, au terme de laquelle la propriété des stations revient au gouvernement », explique Akram Youssef, expert dans le domaine d’électricité.
En réalité, face à la campagne lancée contre l’entrée du secteur privé dans le domaine des services publics, le fardeau entier est resté sur les épaules du gouvernement, qui a commencé à emprunter auprès des banques pour construire des stations. Cette situation s’est répercutée négativement sur le nombre de stations construites et la durée de leur construction. Aujourd’hui, 92,5 % des stations électriques sont gérées par l’Etat, alors que le secteur privé ne détient que 7,5 %. Une autre solution proposée consiste à réduire la consommation de gaz et de mazout en demandant aux usines de les remplacer par le charbon. Une proposition rejetée par la ministre de l’Environnement, Laïla Iskandar, ainsi qu’un certain nombre d’ONG qui luttent contre la pollution. En attendant une solution, le Centre de contrôle national de l’énergie (CCEN) n’a d’autres choix que de couper le courant dans plusieurs quartiers, afin d’économiser l’énergie.
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