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De l’isolement germe la réflexion

Hoda Ghali , Mercredi, 14 août 2024

Dans son ouvrage Ahlam Fatret Al-Ozla (rêves de la période de confinement), l’intellectuel et politologue Samir Morcos tente d’ouvrir des horizons nouveaux, livrant ses pensées sur les divers domaines de la vie.

De l’isolement germe la réflexion
Samir Morcos, une pensée complexe et cohérente.

Dans son nouveau livre Ahlam Fatret Al-Ozla (rêves de la période de confinement), Samir Morcos partage ses contemplations et ses réflexions en temps de confinement, pendant la pandémie de coronavirus. Pour beaucoup, l’isolement imposé par le virus, notamment entre 2020 et 2022, a constitué une occasion d’évasion et un refuge de confort, mais pour quelques-uns comme l’auteur, c’était une opportunité de réfléchir en profondeur à des questions qui dépassent le cadre personnel et direct.

« Les rêves dont nous parlons ne sont pas des rêves en cours de sommeil, avec ses diverses complexités connues dans la littérature freudienne. Notre rêve ici — qui a été rendu possible par la période d’isolement — est un rêve conscient », souligne Samir Morcos, qui a voulu profiter de la crise pour faire halte et reprendre son souffle, en restant à l’écart du bruit improductif de la vie quotidienne.

L’isolement qui peut paraître au premier abord comme un état négatif, qui signifie le calme et l’inaction, peut être, lorsqu’il est volontaire, une occasion de reconsidération et de révision. Le désir de la découverte devient ainsi une libération et une motivation pour la créativité et le renouveau. Etre absorbé ou plongé dans notre quotidien avec de nombreux détails inutiles qui nous empêchent de nous rafraîchir ou de se renouveler n’est-il pas considéré comme un isolement forcé de la pensée et de l’action ? Il nous fait vivre une période prolongée d’isolement, affirme l’auteur, tout au long de son essai de 16 chapitres. Ceux-ci sont divisés en quatre sections : rêves de la période d’isolement, visions de confinement, perspectives et, enfin, pensées libres autour du même thème.

L’auteur passe ainsi en revue ses rêves et ses réflexions concernant différents domaines tels que l’histoire, l’art, la littérature, la politique, les transformations générationnelles, le progrès, le renouveau religieux, etc.

Trente-sept rêves

Il expose 37 rêves dont chacun a une histoire et celle-ci est à même de nous conduire vers un avenir meilleur. Il essaye de simuler la perspective de la génération Z, celle qui impose ses outils et sa manière de voir, jugeant que les institutions religieuses doivent faire avec, sinon, elles seront dépassées par les événements et les nouvelles générations les contourneront.

Pour évoquer ses idées sur la citoyenneté, il en parle comme étant « le rêve de sa vie », tout en faisant référence à ses précédents ouvrages publiés à cet égard, dont notamment la citoyenneté et l’identité, citoyenneté sans tuteurs.

L’un des thèmes principaux abordés par Morcos est « les rapides transformations du numérique ». Car pendant la pandémie, nous avons été obligés de dépendre davantage du numérique pour vivre et communiquer : éducation, achat, vente, culture, divertissement, services bancaires … Les plateformes numériques spécialisées dans la production de séries télévisées notamment étrangères — ont commencé à diffuser des oeuvres radicalement différentes de celles que nous avions l’habitude de regarder auparavant.

L’auteur porte un intérêt particulier à la musique, notamment à Beethoven (car on célébrait les 250 ans de sa naissance), soulignant le rôle de la musique quant à la purification et l’essor des âmes.

Quant à la question de la jeunesse, l’auteur écrit : « Traiter la question de la jeunesse est une tâche nationale qui mérite tout notre soin et notre attention. Il faut engager un dialogue national là-dessus. Notre réussite à l’approcher signifie assurer l’avenir de l’Egypte, en intégrant la jeunesse dans la société et les rendant des citoyens actifs à part entière ».

Selon l’auteur, la pensée égyptienne a beaucoup régressé durant les 40 dernières années, et ce, pour deux raisons principales, d’après lui. D’abord les idées adoptées dans les années 1970 ont provoqué un retard flagrant en ce qui concerne la libre pensée et le fanatisme religieux, ensuite, nous sommes entrés dans le nouveau millénaire en étant prisonniers du siècle passé.

Vers un modèle égyptien

Morcos fait son diagnostic : nous avons besoin de créer un modèle qui nous est propre, un modèle égyptien, afin de soulever les multiples défis dans tous les domaines et intégrer le monde nouveau. La mondialisation doit être donc réinventée, on doit se la réapproprier selon le contexte local. En outre, la pensée religieuse doit être renouvelée, elle doit s’adapter aux données et diktats de l’époque. Il explique par la suite qu’il y avait un ensemble d’obstacles qui s’y opposaient, dont les mécanismes internes des institutions religieuses.

L’ouvrage se termine par une idée très importante, conseillant de « construire des ponts au lieu des murs ». Car l’avenir de la planète doit plutôt reposer sur la solidarité humaine et citoyenne, sur une plus grande ouverture. Les anciennes structures ne fonctionneront plus, avec les dimensions de classe et d’autoritarisme.

« Le monde change et nous devons suivre le rythme des transformations mondiales », conclut Morcos.

Ahlam Fatret Al-Ozla (rêves de la période de confinement), essai de Samir Morcos, aux éditions Al-Ein, 2024, 541 pages.

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