L’ancien premier ministre pakistanais, Imran Khan, quitte le tribunal de Lahore après sa comparution. Photo : AP
Le gouvernement pakistanais compte réclamer l'interdiction du parti politique de l'ex-Premier ministre Imran Khan, emprisonné depuis près d'un an, a déclaré lundi le ministre de l'Information après des décisions de justice favorables à l'ancien responsable.
"Le gouvernement a décidé de déposer une requête pour interdire le PTI" (Pakistan Tehreek-e-Insaf), a déclaré Attaullah Tarar à la presse à Islamabad, précisant que l'affaire serait portée devant la Cour suprême.
"Nous pensons qu'il existe des preuves crédibles de la nécessité d'interdire le PTI", a-t-il ajouté en évoquant des accusations à l'encontre de M. Khan comprenant la divulgation de documents classifiés et l'incitation à l'émeute. "Nous défendrons vigoureusement cette affaire et n'épargnerons aucun effort", a-t-il ajouté.
Dans un communiqué, un porte-parole du PTI a estimé que cette décision "constitue un signe de panique parce qu'ils ont réalisé que les tribunaux ne peuvent être menacés et mis sous pression".
Le PTI "ne tolérera pas" les efforts du gouvernement pour l'interdire, a déclaré à l'AFP Raoof Hasan, le responsable de l'information pour le PTI, ajoutant: "Le PTI est devenu plus fort qu'auparavant. Nous y ferons face".
La Commission des droits de l'homme du Pakistan a qualifié la décision d'interdire le PTI "de coup énorme porté aux normes démocratiques", estimant qu'"elle empeste la désespérance politique".
"Polarisation"
"Si cela va jusqu'au bout, cela ne fera que déboucher sur une polarisation plus profonde et la forte probabilité du chaos politique et de la violence", a ajouté le président de la Commission, Asad Iqbal Butt, dans un communiqué.
Agé de 71 ans, Imran Khan est empêtré dans une série d'affaires judiciaires depuis qu'il a quitté le pouvoir en 2022, une campagne destinée à l'empêcher de le reprendre, selon lui.
Il reste emprisonné mais a été acquitté samedi d'une condamnation à sept ans de prison pour mariage illégal en vertu de la loi islamique. La veille, la Cour suprême avait accordé au PTI une vingtaine de sièges supplémentaires au Parlement. Deux décision perçues comme un coup majeur pour le gouvernement de coalition de Shehbaz Sharif.
En avril, sa condamnation pour mariage illégal avait été suspendue par la justice qui l'a également acquitté début juin d'une accusation de trahison.
Imran Khan, au pouvoir depuis 2018, avait été renversé par une motion de censure en avril 2022 après avoir, selon les analystes, perdu le soutien de la toute puissante armée.
L'ex-star du cricket avait alors lancé une campagne pour son retour, attirant des foules nombreuses dans les rues du pays. Il a défié les haut gradés qui l'avaient un jour soutenu, les accusant d'avoir participé à la tentative d'assassinat dans laquelle il avait été blessé lors d'un meeting en novembre 2022.
Sa première arrestation en mai 2023, pour des accusations de corruption, a suscité des manifestations nationales de partisans exprimant leur colère contre l'armée. En réponse, cette dernière a orchestré une vaste campagne de répression du PTI.
Détention arbitraire
Interdit de se présenter aux élections législatives de février dernier, remportées par une coalition de partis considérés comme proche de l'armée et entachées d'accusations de fraude, Imran Khan a de nouveau été arrêté en août 2023.
Pour Osama Mali, un expert judiciaire indépendant, "il sera très difficile de prouver, devant la Cour suprême, que tout un parti doit être interdit pour les actions de certains".
"Il s'agirait d'une violation de la liberté d'association, garantie constitutionnellement", a-t-il expliqué à l'AFP.
Un panel d'experts de l'ONU a récemment estimé que la détention de l'ex-Premier ministre pakistanais était arbitraire et contraire aux lois internationales, appelant "immédiatement" à sa libération.
Sa détention "n'a aucune base légale et semble avoir été destinée à disqualifier sa candidature à une fonction politique", a jugé le groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire dans un avis, daté du 25 mars mais rendu public seulement début juillet.
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