Al-Ahram Hebdo : On a l’impression que dans la lutte contre Al-Qaëda, les Etats-Unis ne mènent pas la même politique en Iraq qu’en Syrie …
Ayman Abdel-Wahab : Les situations en Iraq et en Syrie sont complètement différentes. L’Iraq est un allié économiquement puissant qui possède des ressources naturelles. Mais ce n’est qu’une question économique. Le rôle américain en Iraq a aussi une influence importante sur les relations entre l’Iran et les Etats-Unis. Le dossier iraqien fait partie des négociations avec l’Iran sur le nucléaire.
En Syrie, Washington ne participe pas au conflit. Il ne veut pas intervenir directement dans les affaires internes syriennes. En plus, il ne veut pas se heurter à la Russie et à la Chine qui soutiennent le régime de Bachar Al-Assad. En outre, Israël, son enfant gâté, est le premier à profiter de la situation actuelle et veut maintenir la situation de statu quo car elle épuise tous les camps : l’armée syrienne, l’opposition, l’armée libre et les groupes extrémistes.
— Comment lutter contre la montée d’Al-Qaëda aussi bien en Syrie qu’en Iraq ?
— La situation est inquiétante aussi bien en Iraq qu’en Syrie. Dans ces deux pays, les groupes djihadistes deviennent de plus en plus puissants. Ils possèdent un financement, des armes et des équipements. La Syrie est devenue un pays ouvert et de nombreux militants y ont pénétré pour combattre à côté de ces groupes. En même temps, l’Armée Syrienne Libre (ASL) est fatiguée, même si elle continue sa lutte pour ne pas perdre son contrôle sur certaines régions.
Mais elle ne peut pas à elle seule combattre Al-Qaëda. Pour combattre les insurgés affiliés à Al-Qaëda, il faut une coopération entre les armées régulières syrienne et iraqienne. Cette coopération est nécessaire pour lutter contre les terroristes présents en Iraq et en Syrie. Sinon, toute démarche individuelle ou unilatérale risque de se transformer en une guerre contre les deux pays. En effet, le gouvernement iraqien ne peut pas combattre les insurgés sur son sol sans combattre ceux sur le sol syrien, et vice-versa.
Par ailleurs, l’Iraq tente d’éviter que le Printemps arabe ne l’atteigne. Et en Syrie, face à la montée d’Al-Qaëda, certains commencent à revoir leur position en estimant que Bachar est un moindre mal.
— Comment voyez-vous l’avenir de la crise syrienne ?
— Personne ne pouvait s’attendre à ce que la crise syrienne atteigne de telles proportions. Et la situation actuelle met les Etats-Unis et la communauté internationale dans l’impasse : ils ne peuvent pas faire prévaloir un camp sur un autre. En même temps, la communauté internationale veut avant tout détruire les groupes djihadistes qui sont une vraie menace dans toute la région.
A l’heure actuelle, c’est là la priorité de la communauté internationale. Puis, elle essayera de trouver une issue à la crise syrienne via un compromis entre le régime et l’opposition. C’est pour cela que la communauté internationale exerce une forte pression sur les partis en conflit pour qu’ils s’assoient à la table de négociations. Cela dit, il est absolument nécessaire de trouver une solution qui passe par le départ de Bachar Al-Assad lors de prochaines élections.
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