Des météorologues de partout dans le monde se font harceler sur les réseaux sociaux par des adeptes des théories du complot. Photo : AFP
Des internautes accusent la communauté scientifique d'avoir provoqué les pluies diluviennes ayant semé la désolation cette année au Brésil comme aux Emirats arabes unis, niant la responsabilité du réchauffement climatique.
Sur la toile, des adeptes des théories du complot pointent notamment du doigt la technique dite d'ensemencement des nuages, accusant la communauté scientifique de manipuler la météo afin de faire croire en une crise climatique fabriquée de toutes pièces.
"Dubaï ressemble à une scène d'apocalypse. Les vidéos des inondations sont hallucinantes", commente le conservateur américain Robby Starbuck à ses plus de 460.000 abonnés, en référence aux pluies qui ont dévasté la région en avril.
"J'ai vu certaines personnes faire un lien avec le dérèglement climatique, mais en réalité il s'agit de météo artificielle", affirme-t-il.
Les publications en ce sens foisonnent ces derniers mois sur les réseaux sociaux du monde entier. Et selon le site Google Trends, les recherches internet sur l'ensemencement des nuages ont atteint des sommets durant les inondations à Dubaï.
Cette méthode consiste à introduire des particules chimiques dans les nuages afin de contrôler la formation de précipitations, dans l'objectif de les augmenter dans une région donnée.
Il y a pourtant "un consensus au sein de la communauté scientifique" sur la responsabilité du réchauffement climatique dans ces événements météorologiques extrêmes, dit à l'AFP Mariana Madruga de Brito, une scientifique originaire de l'Etat brésilien de Rio Grande Do Sul, ravagé par des inondations en mai.
Selon les scientifiques, les pluies historiques qui ont touché le sud du Brésil ont ainsi été rendues deux fois plus probables par le dérèglement climatique, qui a "intensifié" les précipitations causées par le phénomène atmosphérique El Niño.
Par ailleurs, l'ensemencement de nuages "ne peut causer des réactions de cette magnitude", assure Mariana Madruga de Brito.
Passer à côté du problème
Si la méthode a récemment fait ses preuves après des décennies de recherche scientifique sans résultat, elle n'est efficace que sur des zones géographiques très limitées et n'a pas la capacité de "créer" des phénomènes météorologiques de l'ampleur des inondations de ces derniers mois, expliquent des experts.
Pour autant, la technique gagne du terrain chez les conspirationnistes qui en extrapolent les effets.
Si les catastrophes naturelles se déroulent de plus en plus fréquemment, ceux qui nient l'existence du dérèglement climatique "redoublent d'efforts" pour les justifier d'une autre manière, note Callum Hood, de l'organisation américaine de lutte contre la désinformation en ligne CCDH.
Chaque été apportant son lot de records de températures, le déni pur cède la place à un "nouvel argument": "Si notre planète chauffe", l'explication ne se trouverait pas dans nos émissions, mais plutôt dans des "manipulations scientifiques".
Les modifications météorologiques artificielles ne sont pas exemptes de controverse. Certains scientifiques prônent la vigilance face à ces programmes afin d'éviter de potentiels effets néfastes sur la santé ou l'environnement.
Mais le sujet ne doit en aucun cas empêcher une prise de conscience collective de la crise climatique et de ses effets bien réels, exhortent des experts.
"Cette obsession autour de l'ensemencement de nuages nous fait passer à côté d'un problème bien plus large", alerte Edward Gryspeerdt, chercheur à l'Institut environnemental Grantham de Londres.
"Cela fait plus d'un siècle que nos émissions réchauffent notre planète et causent des pluies plus abondantes dans beaucoup de régions du monde", dit-il.
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