L'Egypte envisage de lancer un appel d'offres pour 15 à 20 cargaisons de Gaz Naturel Liquéfié (GNL) afin de couvrir la forte demande estivale qui a conduit à une vague de pannes et de coupures d’électricité, publie Reuters selon des sources vendredi 7 juin.
Les sources ont dévoilé à Reuters que l'appel d'offres est attendu depuis la mi-juin ou début juillet pour couvrir la demande pour la saison estivale entre juillet et octobre. Une autre source a déclaré que cette annonce était en attente de la nomination du ministre de l'Energie, le président Abdel Fattah al-Sissi ayant ordonné au premier ministre de former un nouveau cabinet en début de semaine.
Les réserves de gaz naturel qui aident l'Egypte à produire de l'électricité diminuent à un moment où une population croissante de 106 millions d'habitants et le développement urbain font augmenter la demande d'électricité tandis que la forte demande de refroidissement en été fait augmenter la consommation d'énergie.
L'Egypte n'a pas importé de GNL depuis fin 2018. Au cours de la période 2019-2023, l’Egypte a reçu quatre cargaisons produites localement dans son Unité flottante de stockage et de regazéification (FSRU), ainsi qu'une cargaison partiellement importée qui a été réexportée fin 2023, selon S&P Global.
En 2023, elle a acheté quatre cargaisons sur le marché spot et a dû payer une prime élevée, en partie à cause de la nécessité de livraisons rapides.
Deux des cargaisons, achetées pour livraison en avril et mai, ont été achetées à un prix supérieur de 1,3 à 1,7 dollar par million d'unités thermiques britanniques (mmBtu) par rapport au prix du gaz au hub néerlandais de TTF, selon les données de S&P.
En mai, la société égyptienne Natural Gas Holding Company (EGAS) a conclu un accord avec la société norvégienne Hoegh LNG pour louer la FSRU de Hoegh Galleon de juin 2024 à février 2026 afin de soutenir la sécurité énergétique.
Usines touchées par la pénurie
En 2024, plusieurs entreprises égyptiennes de produits chimiques et d’engrais ont fermé temporairement leurs usines, invoquant des pressions accrues dues à la consommation sur le réseau de gaz naturel, entraînant des fluctuations du réseau.
L'approvisionnement en gaz reprendra progressivement à partir du 6 juin vers les usines d'engrais, a indiqué le ministère du Pétrole.
En 2023, la production totale de gaz naturel de l'Egypte est tombée à son plus bas niveau depuis 2017, selon les chiffres de la Joint Organizations Data Initiative (JODI).
La production de gaz en 2023 était d'environ 59,29 milliards de mètres cubes (bcm), en baisse de 11,5 % sur un an pour atteindre le niveau de production le plus bas depuis 2017, où elle était d'environ 50,72 milliards de m3.
Selon un rapport publié début mai par l’Agence centrale pour la mobilisation publique et les statistiques (CAPMAS), les exportations de gaz naturel liquéfié ont diminué de 83,2 % en février 2024 en comparaison avec le même mois de l'année passée.
Le prix du gaz naturel liquéfié a baissé sur le marché international passant de 9,36 dollars par mille pieds cubes en février 2023 à 6,56 dollars par mille pieds cubes en février 2024 selon les données de la CAPMAS sur l'énergie.
Les coupures d’électricité programmées sont restées en place depuis, ce qui a été un choc pour les Egyptiens habitués à des années d’approvisionnement en électricité fiable sous le président Sissi.
Un programme de délestage
Le gouvernement a imposé un délestage de plus de deux heures par jour depuis juillet 2023 pour alléger la pression sur la consommation et l'importation du gaz naturel.
Le programme du gouvernement consiste à couper l’électricité durant la journée entre 11 heures et 17 heures pour une durée allant d’une à deux heures au maximum. Les hôpitaux, les usines et des installations vitales sont exclus de cette décision.
Selon le porte-parole du gouvernement, Mohamed Al-Homossani, le programme de délestage mis en place permet à l’Etat d’économiser un milliard de dollars par an.
Les données disponibles ne permettent pas de vérifier ce chiffre d'une manière indépendante.
Lors d’une conférence de presse le 27 mai dernier, le premier ministre, Mostafa Madbouly, a promis la fin du délestage « à la fin de l’été ou au plus tard fin 2024 ». Pour ce faire, un plan pour l’augmentation des prix d’électricité sur 4 ans serait « indispensable pour rétablir la stabilité du système électrique », a-t-il repris, tout en promettant d’épargner les couches sociales les plus vulnérables.
Début de la crise
Pendant l’été, des coupures courantes de l’électricité ont été provoquées par une hausse de la consommation, en raison de la canicule.
La société Electricity Holding Company a clarifié en 2023 dans un communiqué que les coupures d’électricité interviennent pour plusieurs raisons, notamment le manque de carburant fourni aux centrales électriques, l’augmentation de la consommation quotidienne d’électricité des citoyens, le non-respect des méthodes de rationalisation approuvées par le ministère en matière de consommation d'électricité et, enfin, l’élévation du taux de vol de courant électrique.
Une autre raison est ensuite intervenue en octobre 2023. Israël a coupé les livraisons de gaz à l'Egypte, invoquant des menaces sécuritaires qui entravent la poursuite de l'exportation de ces approvisionnements, causant la baisse de la production nationale à 2,3 milliards de pieds cubes par jour au lieu de 2,8 milliards de pieds cubes, ce qui a influencé l’approvisionnement des stations électriques.
Dans ce contexte, le ministre des Finances, Mohamed Maait, a déclaré que les coupures d'électricité étaient essentiellement dues à la hausse des cours mondiaux du pétrole (avec un prix du baril qui oscille entre 83 et 93 dollars), à la libéralisation du prix de change du dollar et à l’augmentation de l'utilisation des climatiseurs pendant l’été.
« Le ministère du Pétrole livre le gaz naturel au ministère de l’Electricité au prix de 3 dollars quel que soit son prix d’importation », a-t-il expliqué en précisant que c’est le Trésor public qui assume la différence des prix. « Tout ceci représente une charge sur les ministères du Pétrole et de l’Electricité et sur le Trésor public », a conclu Maait.
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