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L’Egypte, des Frères musulmans aux djihadistes

Najet Belhatem, Mardi, 31 décembre 2013

L’année s’est terminée par le déclin des courants islamistes sur la scène politique et la montée du terrorisme. Le magma islamiste fera encore parler de lui en 2014.

« Le 30 décembre 2006, le président iraqien Saddam Hussein a été pendu après avoir été condamné pour crime contre l’humanité. Ce jour-là a coïncidé avec le premier jour de la fête de l’Aïd Al-Kebir, ce qui a choqué les musulmans de par le monde », rappelle le site d’information en ligne Veto. Sa mort avait sonné le glas de plusieurs dirigeants arabes, de Moubarak à Kadhafi, en passant par Ali Saleh et l’entrée du monde arabe et du Moyen-Orient dans une autre dimension commencée par des rêves grandioses de liberté qui se sont vite bri­sés sur les rochers des luttes politiciennes avec l’arrivée des islamistes au pouvoir, grands gagnants de ce qui a été appelé le Printemps arabe, pourtant né en plein hiver, et qui est demeuré prisonnier des nuages menaçants et des tempêtes. En 2013, les courants islamistes ont perdu beaucoup de terrain comme le sou­ligne le site d’information Aswat Masriya. La confrérie a fini l’année en tant qu’organisation terroriste. « Le conseiller juridique et avocat international Amr Abdel-Razeq a déclaré à la presse que la décision du Conseil des ministres de désigner la confrérie organisation terroriste n’a pas été la conséquence de l’attentat contre le Q.G. de police de Daqahliya seulement, mais parce que cette confrérie est connue pour ses actes criminels depuis 1945 et qui sont selon l’article 85 du code pénal des crimes terroristes. Cette décision est parfaitement légale. L’activité de la confrérie repose essen­tiellement sur l’espionnage et les assassinats depuis l’époque de Hassan Al-Banna et l’es­pionnage au profit des Anglais, en passant par son alliance avec les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale et avec les Américains durant l’époque de Nasser. Sans oublier que son financement provient de l’étranger, notamment d’Angleterre, d’Alle­magne et de Turquie », rapporte le quotidien Al-Watan. On ne sait pas si quelqu’un a eu l’idée de poser la question au conseiller pour savoir si les informations qu’il rapporte sont des faits historiques prouvés, et pourquoi les différents régimes égyptiens ont toujours eu une positon confuse à l’égard de la confrérie que l’on appelait interdite mais tolérée, allant jusqu’à lui permettre de participer à des élec­tions sous le règne Moubarak et à négocier avec les militaires après la révolution du 25 janvier 2011 ?

« Je suis un feloul ! »

« La situation en Egypte est suivie de près par le mouvement Al-Nahda Al-Islamiya en Tunisie qui a fait plusieurs concessions poli­tiques en 2013. Ainsi, le gouvernement d’al­liance mené par le mouvement a démissionné le 9 février après les protestations suite à l’as­sassinat de l’opposant Choukri Belaid. Mais la position d’Al-Nahda s’est encore détériorée après l’assassinat d’un autre opposant le 25 juillet. Après des négociations sur fond de pro­testations civiles, un gouvernement techno­crate a été désigné en attendant des élections parlementaires et présidentielle en 2014. La situation en Egypte a eu également un impact sur la Libye qui a connu un triomphe de la mouvance islamiste après Kadhafi, mais le Parti de la justice et la construction, issu des Frères musulmans, connaît de mauvais jours et ses locaux sont attaqués ».

La situation des courants islamistes s’est tel­lement détériorée que certains, comme le juge Hatem Bagato à la Cour constitutionnelle et ex-ministre des Affaires parlementaires dans le gouvernement des Frères musulmans, se van­tent désormais d’appartenir aux feloul (les pro-Moubarak) pour nier toute appartenance à la confrérie. « Je suis pétri dans le moule des forces armées, car mon père était chef de l’ar­mée de l’air et je suis un feloul car mon oncle était dans la garde privée de Moubarak pen­dant 17 ans », rapporte le site d’information en ligne Masrawi.

L’émergence des djihadistes

Au même moment, ce sont les groupes terro­ristes qui ont pris les devants de la scène en 2013 surtout à sa fin. Il s’agit notamment du groupe Ansar Beit Al-Maqdes qui a revendiqué l’attentat contre la direction de la sûreté à Daqahliya et celui manqué contre le ministre de l’Intérieur et l’assassinat d’un officier de police à Madinet Nasr. Le quotidien Al-Watan rapporte un communiqué publié par ce groupe qui a pour but de dévoiler son identité et ses objectifs. « Le groupe est apparu dans le Sinaï au temps du président Moubarak quand plu­sieurs campagnes ont été menées contre les frères moudjahidines, et malgré cela, le groupe n’a pas répondu à ces campagnes, car il com­battait l’ennemi sioniste », dit le communiqué, et d’ajouter : « Les campagnes se sont poursui­vies sous le règne de Tantawi et Morsi mais nos frères au sein du groupe ont patienté et n’ont pas voulu entrer en conflit avec le régime égyp­tien impie. Les moudjahidines ont accouru pour soutenir les faibles et ont incendié les repaires de l’armée et la police pour venger les musulmans. Egyptiens, Ansar Beit Al-Maqdes sont vos frères et refusent que votre sang coule … Nous levons le slogan de la religion sans calculs, pas comme le parti Al-Nour ou les Frères musulmans ... Soutenez vos frères face aux oppresseurs ». Le communiqué a vite été commenté par Nader Bakkar, vice-prési­dent d’Al-Nour qui a déclaré à la presse : « Je suis étonné de ce communiqué et comment voulez-vous qu’on vous soutienne ? ». Il a affirmé que son parti a tenté de sauver l’Egypte et qu’il n’exploite pas la religion à des fins politiques. Beit Al-Maqdes a légitimé le fait de faire couler le sang égyptien.

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