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Pour ou contre la Constitution ?

Lundi, 16 décembre 2013

Entre les pro et les anti, les positions se sont multipliées vis-à-vis du projet de Constitution qui sera soumis à référendum les 14 et 15 janvier 2014. J’ai remarqué que les anti partent d’une conception purement théorique de la Constitution, abstraction faite de la réalité qui nous entoure et des circonstances dans lesquelles la Constitution a été formulée et indépendamment des rapports de force dans la société. D’où la question : le projet de Constitution sert-il le transfert démocra­tique après le régime tyrannique qui avait la main haute sur les destinées du pays avant le 25 janvier 2011 vers un régime démocratique qui est l’une des revendications de la révolution ? Ce projet est-il considéré comme un pas sur la voie du changement démocratique ? Ou bien représente-t-il un obstacle ? Etait-il possible à la lumière des rapports de force de parvenir à une meilleure formulation de la Constitution, plus avancée ?

En réalité, le projet de Constitution qui sera soumis à référendum constitue le fondement adéquat pour le démarrage du processus de trans­fert vers la démocratie. Le contenu de l’article 219 tel qu’il était formulé dans la Constitution de 2012 a été annulé. Il précisait que l’Etat était un Etat religieux (welayat al-fakih). Selon la Constitution de 2012, la charia (jurisprudence islamique) est la source principale de la législa­tion ainsi que les principes d’Ahl al-sunna wal djamaa. Dans l’article n°4, on pouvait lire ce qui suit : « L’avis des oulémas d’Al-Azhar est pris dans les affaires relevant de la charia ». De cette manière la référence à la constitutionnalité des lois devenait un organisme religieux n’ayant rien à voir avec le système constitutionnel et juridique du pays. Et c’est précisément sur cela que repose welayat al-fakih.

Les amendements constitutionnels dans le pro­jet de 2013 annulent tout cela et stipulent la mise en place d’un Etat démocratique moderne repo­sant sur la suprématie de la loi, le principe de la citoyenneté, sans distinction aucune entre les citoyens sur la religion, la race, la couleur, l’ap­partenance sociale ou la position politique. Il s’agit d’une évolution importante donnant une impulsion au processus de transition démocratique, en pré­lude à l’établissement d’un régime démocratique à part entière. Pour ce qui est du chapitre des droits et des libertés, l’ancienne Constitution reliait ses pratiques avec ce qui figu­rait dans le chapitre de l’Etat et de la société qui stipule que l’Etat est le garant des valeurs, de l’éthique et de l’ordre général. Il s’agissait d’expres­sions mystérieuses, floues qui pou­vaient être utilisées pour ligoter les libertés des citoyens et l’exercice de leurs droits. Ces expressions peuvent être utilisées à l’avenir pour bâtir un organisme qui ôterait aux citoyens les libertés individuelles. Le projet de Constitution de 2013 a annulé ces textes stériles et permis aux Egyptiens de disposer de leurs droits en toute liberté. Il s’agit là sans nul doute d’un pas en avant dans le domaine des libertés et des droits. Outre cela, le comité de rédaction de la Constitution de 2012 a refusé de s’engager dans les accords internationaux pour ce qui est des droits de l’homme, sous prétexte qu’ils sont contradictoires à la charia. Alors que les amende­ments de la nouvelle Constitution rectifient le tir en reconnaissant ces accords. Ils ont ainsi été réintégrés dans le système des lois égyptiennes ; et il s’agit là d’un troisième pas positif sur la voie accordant aux Egyptiens les garanties nécessaires pour exercer leurs droits et devoirs.

La Constitution a de plus mis littéralement l’homme et la femme sur un pied d’égalité politi­quement, socialement et culturellement. Ce qui avait été rejeté par le comité de la Constitution de 2012. Les droits économiques et sociaux qui ont été longtemps négligés par les Constitutions égyptiennes sont un point positif au profit de la Constitution de 2013 qui a pour la première fois fixé un taux du PIB pour les dépenses sur l’éducation et la santé.

Dans le domaine politique, le chapitre des régimes politiques a favorisé des textes qui mettraient une fin absolue au régime tyran­nique. La Constitution de 1971 comportait 35 prérogatives pour le président de la République qu’il détenait dans les pouvoirs législatif, exécutif et juridique. Mais les nou­veaux amendements précisent que le président se trouve à la tête de l’autorité exécutive à côté du Conseil des ministres qui dessine avec lui les politiques générales et détermine les lois devant entrer en vigueur. La Constitution accorde éga­lement au pouvoir législatif le droit de supervi­ser, de demander des comptes au gouvernement et de retirer la confiance des ministres comme elle accorde à ces derniers le droit de démis­sionner de leurs postes .

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