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Entre Israël et le Hezbollah, l’inéluctable guerre ?

Abir Taleb , Mercredi, 03 avril 2024

Israël intensifie sa campagne de frappes contre le Hezbollah ravivant les craintes d’une escalade et d’un conflit d’une plus grande ampleur. Un conflit qui serait lourd de conséquences.

Entre Israël et le Hezbollah, l’inéluctable guerre ?

Cela fait près de six mois que des violences opposent quasi quotidiennement l’armée israélienne au Hezbollah à la frontière israélo-libanaise. Et ce n’est pas près de finir. Israël entend étendre sa campagne contre le Hezbollah, faisant craindre une guerre d’une plus grande ampleur.

Dimanche 31 mars, l’armée israélienne a indiqué avoir « éliminé » un chef du Hezbollah dans une frappe dans le sud du Liban, deux jours après avoir tué un autre responsable du parti dans un raid dans la même région, près de la ville côtière de Tyr. Le même jour, un drone israélien a frappé une base de l’armée libanaise dans le village libanais de Aïta Al-Chaab au Sud-Liban (Bint Jbeil), selon une source de l’armée libanaise et une source de sécurité citées par le quotidien libanais L’Orient-Le Jour. La veille, trois observateurs de l’ONU et un traducteur ont été blessés. La mission de maintien de la paix de l’ONU (FINUL) — qui a déclaré qu’elle enquêtait toujours sur l’origine de l’explosion — a affirmé qu’ils ont été blessés par une explosion d’obus alors qu’ils effectuaient une patrouille à pied dans le sud du Liban. En revanche, deux sources de sécurité ont indiqué à Reuters que les observateurs avaient été blessés lors d’une frappe israélienne. Mais l’armée israélienne a nié toute implication dans l’incident.

Dans le même temps, des combattants du Hezbollah et des dizaines de soldats syriens ont été tués par des frappes dans la province d’Alep, au nord-ouest de la Syrie. Selon l’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme (OSDH), au moins 36 soldats syriens, sept combattants du Hezbollah et un membre syrien d’un groupe lié à l’Iran ont été tués dans ces frappes menées dans la province d’Alep, vendredi avant l’aube. Les frappes ont visé les dépôts de missiles du Hezbollah dans la banlieue de Jibrine, près de l’aéroport international d’Alep, ainsi que dans la ville voisine d’Al-Safira qui abrite les usines du ministère syrien de la Défense qui sont sous le contrôle de groupes pro-iraniens, a indiqué l’ONG basée à Londres.

Rhétorique guerrière

Courant mars, l’armée israélienne a annoncé avoir atteint « environ 4 500 cibles du Hezbollah » au Liban et en Syrie, notamment « plus de 1 200 » par des frappes aériennes depuis le début de la guerre à Gaza. Depuis le début de ce conflit, en effet, quelque 350 personnes ont été tuées au Liban — des combattants du Hezbollah pour la plupart, mais aussi au moins 68 civils —, selon un décompte de l’AFP. Outre le lourd bilan humain, ces violences ont également déplacé des milliers d’habitants dans le sud du Liban. Car depuis le 7 octobre, Israël et le Hezbollah s’échangent les coups. L’armée israélienne lance régulièrement des frappes contre des cibles du Hezbollah, celui-ci tire des roquettes et des missiles en direction du territoire israélien. Israël bombarde aussi de plus en plus en profondeur le territoire libanais, comme le 24 mars à Baalbek, ville de l’est du Liban, distante de près de 100 kilomètres de la frontière israélienne.

La journée du 27 mars a été la plus meurtrière depuis le 7 octobre avec de violentes frappes israéliennes qui ont fait au moins 16 morts en moins de 24 heures. Après cette journée, le porte-parole de l’armée israélienne, Daniel Hagari, cité par L’Orient-Le Jour, a prévenu que « le territoire libanais en profondeur » se transformerait « en une zone de guerre ». « Quand l’armée (israélienne) recevra des consignes du pouvoir politique de mener une opération militaire au Liban, elle s’y conformera », a-t-il lancé.

Pour le moment, nous sommes dans une sorte de guerre d’usure que les Israéliens veulent apparemment transformer en véritable guerre. La question semble ne pas encore faire consensus en Israël. Dans les médias, une députée israélienne, membre de la commission parlementaire des affaires étrangères et de la défense, a récemment lancé : « Dans les prochains mois, la guerre contre le Hezbollah va être lancée. Le conflit est inévitable au regard de l’échec des discussions autour d’une solution diplomatique ». Mais aussitôt après, ses propos ont été démentis par la Défense qui a précisé qu’ils exprimaient « son seul avis personnel et non une véritable volonté des autorités de lancer des hostilités plus larges contre le Hezbollah ». Malgré ce démenti, tout porte à croire que l’Etat hébreu se prépare à un conflit d’une plus grande ampleur contre le Hezbollah. Et pour preuve, 60 000 Israéliens ont été évacués sur une bande de cinq kilomètres longeant la frontière avec le Liban. Une façon pour Tel-Aviv de sécuriser les civils dans l’optique d’un conflit plus important.

Autre indice. Faisant allusion aux frappes ayant ciblé la Syrie, le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a annoncé que l’armée israélienne allait « élargir la campagne (contre le Hezbollah) et augmenter le nombre de ses attaques au nord ». « Nous atteindrons tous les endroits où ce groupe opère, à Beyrouth, à Damas et ailleurs », a déclaré le responsable israélien vendredi 29 mars.

Face à cette rhétorique guerrière et à l’escalade israélienne, la réponse du Hezbollah semble plutôt mesurée. Du moins, pour le moment. Pour certains analystes, le parti chiite, qui a également ses calculs internes, ne veut pas d’une guerre ouverte qui aggraverait la situation déjà catastrophique au Liban et nuirait à sa popularité. Pour d’autres analystes, il essaie plutôt de gagner du temps et de se préparer au prochain conflit. Un conflit qui semblerait inévitable.

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