Sur les 290 sièges à pourvoir, les candidats pro-régime en ont remporté 200 dès le premier tour. (Photo : AFP)
Comme ses précédentes de 2020, les élections législatives du vendredi 1er mars en Iran ont été remportées par les conservateurs. Les Iraniens étaient appelés à choisir les 290 membres de la seule chambre du parlement et les 88 membres de l’Assemblée des experts, chargée de désigner le guide suprême. Sur les 290 sièges à pourvoir, les candidats pro-régime en ont remporté 200 dès le premier tour, a déclaré lundi 4 mars le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Mohsen Eslami. Quelque 45 nouveaux députés, relativement modérés, conservateurs ou indépendants ont également été élus. Il reste 45 circonscriptions pour lesquelles un second tour sera nécessaire. Il aura lieu en avril ou en mai. La principale coalition de partis réformateurs, le Front des réformes, avait annoncé son refus de participer à ces « élections dénuées de sens » après la disqualification de nombreux de ses candidats par le Conseil des gardiens de la Constitution.
Mais le premier fait marquant est le taux de participation : 41 %, le plus bas depuis la proclamation de la République islamique en 1979. « C’est un indice très important cette fois-ci car beaucoup d’Iraniens sont mécontents à cause de la crise économique qui secoue le pays et de la situation politique. Ce qui fait que pour les autorités, la participation est un enjeu important », explique Dr Ali Atef, expert des affaires iraniennes. C’est pourquoi les autorités tentent de minimiser cette faible participation. Le ministre de l’Intérieur, Ahmad Vahidi, a déclaré dans une conférence de presse qu’« en dépit de la propagande puissante et sans précédent des ennemis et du recours à tous les outils pour dissuader les gens de voter, et malgré des problèmes économiques, le peuple a démontré une magnifique mobilisation ».
Même politique, stratégie différente
« Le parlement iranien joue un rôle important dans la vie politique, économique et sociale. C’est là que se jouent les décisions critiques comme l’augmentation de l’enrichissement de l’uranium, le soutien accordé aux proxys de l’Iran dans la région ou encore la participation à des négociations sur le dossier du nucléaire », explique le politologue. Avec le maintien des conservateurs, aucun changement dans la politique étrangère de l’Iran n’est prévu. « Téhéran a changé sa stratégie mais pas sa politique ; il est persuadé que les conflits et les tensions ne réalisent pas ses aspirations. C’est pour cela qu’il a entamé un processus de réconciliation avec l’Egypte ou l’Arabie saoudite par exemple. Cela dit, Téhéran continue à aspirer à être une puissance régionale influente », affirme le politologue.
Cependant, la majorité du parlement est partisane d’une ligne stricte sur les valeurs de la République islamique et de fermeté vis-à-vis des pays occidentaux, en particulier les Etats-Unis, et Israël, qui n’entretiennent pas de relations diplomatiques avec l’Iran. « En ce qui concerne le dossier nucléaire, l’Iran préfère garder le statu quo tout en poursuivant l’enrichissement de l’uranium à grands pas. En même temps, les Etats-Unis ne vont rien faire dans ce dossier avant la présidentielle de novembre prochain. Ce délai donnera l’occasion à l’Iran d’avancer dans l’enrichissement de l’uranium et d’imposer ses conditions », explique Ali Atef.
Outre les législatives, les Iraniens ont voté pour élire les 88 membres de l’Assemblée des experts pour quatre ans, chargée de désigner le guide suprême, la plus haute autorité de la République islamique. « Cette assemblée jouit d’un rôle très important en Iran. C’est elle qui choisit l’ayatollah et qui peut également le démettre de son poste. Il est vrai qu’elle ne l’a jamais fait, mais elle en possède le droit. D’où son importance », explique Ali Atef. L’Assemblée des experts serait appelée à jouer un rôle de premier plan dans le processus de désignation du nouveau guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei étant âgé de 84 ans et souffrant de maladies critiques. Les conservateurs vont également renforcer leur contrôle de l’Assemblée des experts ; déjà, ils ont exclu des personnalités notables, au premier rang desquelles l’ancien président modéré Hassan Rohani (2013-2021) qui siège pourtant depuis 24 ans dans cette assemblée. Ce dernier a appelé les électeurs à se rendre aux urnes mais pour un vote sanction contre la situation actuelle.
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