Ghada (Mona Zaki) porte le voile et décide de changer de vie.
Celui qui commet le péché peut-il retrouver la voie de Dieu ? Est-il possible de se repentir, de mener une vie loin de la débauche ? Dans son nouveau drame social, actuellement en salles, le réalisateur Hani Khalifa propose de répondre à des questions humaines, à même de toucher de différents spectateurs. D’après un scénario de Mohamed Ragaa, Le Vol 404 est plus que l’histoire d’une femme qui a retrouvé le droit chemin, après des années de débauche. Le film aborde plutôt le sujet de la tentation.
Ghada Saïd s’apprête à faire le pèlerinage à La Mecque. Elle porte le voile, tout en ayant un look séduisant. Son hijab n’est pas très strict, mais plutôt moderne, avec des jeans serrés, des chemises en satin aux manches retroussées. En faisant la prière dans son bureau, elle reçoit un coup de fil de sa mère, qui lui demande à tout prix de lui prêter de l’argent. Cette dernière, furieuse, surprend sa fille dans son lieu de travail. Une querelle violente se déclenche. Ghada s’enfuit et la mère, en traversant la rue afin de la poursuivre, se fait renverser par une voiture et passe au bloc opératoire. Ghada doit payer les frais de l’hospitalisation et a donc recours à des amis du passé.
Les scènes de rencontre avec ses vieilles connaissances nous font découvrir le personnage de Ghada, qui peut paraître mystérieuse au début du film. Le scénario mise sur le jeu de l’ambiguïté et de la révélation afin de maintenir le suspense, au profit du déroulement dramatique.
Sans avoir recours au flash-back, ni à des images suggérant sa vie antérieure, les dialogues entre les personnages suffisent à eux seuls afin de nous faire comprendre que Ghada est une ancienne prostituée. Son amie proxénète la fait chanter et lui promet un chèque de 300 000 L.E. en échange d’une soirée passée avec un admirateur secret.
Un premier amant écrasé par la vie.
Au-delà des clichés
Dès le départ, le titre nous renvoie au code d’erreur 404. C’est une erreur dans le Word Wide Web quand une ressource demandée est indisponible ou que le serveur n’arrive pas à la trouver. Donc le vol 404 n’existe pas. Le voyage que Ghada veut effectuer est entravé par ses anciens péchés. Tout au long du film, aucune allusion visuelle n’est faite à La Mecque, excepté l’achat d’habits blancs comme ceux des pèlerins.
Quelques jours avant le vol attendu, Ghada est complètement absorbée par la ville du Caire ; elle essaye de rassembler l’argent nécessaire avant de voyager. L’offre de la proxénète, les conflits avec son ex-mari, avec le médecin, avec le percussionniste … tout ceci permet de décrire son tiraillement ; elle hésite entre les tentations du passé et l’aspiration à la repentance.
Khalifa n’a pas opté pour l’image classique d’une femme qui porte le masque de la chasteté et dont les paroles sont pleines d’allusions coraniques. Il lui a donné plutôt une allure séduisante, affirmant qu’elle a choisi de bon gré de mener une nouvelle vie.
Mona Zaki excelle dans le rôle de la femme qui vole quelques instants de la journée pour faire sa prière, qui veille la nuit pour écouter la musique de son ancien ami percussionniste … Tout au long du film, le réalisateur ne tombe pas dans le déjà-vu ou dans le cliché de la contradiction entre le passé et le présent de son personnage principal.
La confrontation avec ses vieux copains donne lieu à des querelles verbales violentes, surtout que Ghada a un tempérament difficile. Pourtant, elle profite de ses connaissances afin de passer à une différente phase de sa vie et de travailler dans le secteur immobilier.
Coupables et victimes
Deux personnages masculins marquent ce tournant. Son premier amant qui l’a vite abandonnée et l’homme qu’elle a épousé, qui cherchait à fuir la vie réelle par la drogue. Son mariage avec Ghada n’était qu’une manière de se venger de sa mère, elle-même de mauvaise réputation. Après la mort de cette dernière et l’arrestation du mari pour toxicomanie, Ghada décide de changer de vie.
Les deux personnages masculins, qui portent le prénom de Tareq, représentent les deux faces d’une même monnaie. Ils ont quelques points en commun et n’ont pas hésité à abuser d’elle et profiter des règles de la société patriarcale et conservatrice, laquelle accorde beaucoup d’importance à la question de la virginité.
Convaincue qu’elle a collecté la somme nécessaire pour se repentir, Ghada décide de se jeter dans l’eau. Cet acte de purification prend tout son sens, à travers une scène résumant la logique du personnage.
En avançant dans le couloir étroit de l’hôpital, elle est soulagée même si marquée par tant de blessures. Elle se dépêche pour rattraper son vol à destination de La Mecque. La chanson du générique n’est qu’un arrangement électronique du morceau interprété autrefois par Leïla Mourad Ya Rayhine lel naby (ô vous qui allez à la rencontre du prophète), mélangé à un chant soufi. Le voyage spirituel a un goût plus contemporain.
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