Un négociateur de devises passe devant les écrans montrant l’indice composé des prix des actions de la Corée (KOSPI), à gauche, et le taux de change entre le dollar américain et le won sud-coréen, au centre, à la salle des marchés des changes du siège de la KEB Hana Bank à Séoul, en Corée du Sud. Photo : AP
Partout dans le monde en ce début d'année, les Bourses établissent des records, portées par les performances financières des entreprises, la frénésie autour de l'intelligence artificielle, et l'espoir de politiques plus favorables à l'activité économique de la part des banques centrales.
Mais ces records interrogent aussi alors que plusieurs économies donnent des signes de faiblesse.
Quels records ont été battus?
D'un point de vue mondial, l'indice MSCI World, qui regroupe près de 1.500 entreprises dans 23 pays, a battu le 7 février son précédent record, remontant à fin 2022. Il ne cesse depuis de progresser, jour après jour.
Aux Etats-Unis, le S&P 500, le plus représentatif du marché américain, a franchi le seuil symbolique des 5.000 points le 9 février, à peine trois ans après avoir connu les 4.000 points et cinq ans après les 3.000 points.
En Europe, le soleil brille aussi sur le CAC 40 français (proche des 8.000 points) et le Dax de Francfort, ainsi que sur l'indice paneuropéen Stoxx 600, qui explore de nouveaux niveaux depuis le 22 février.
En Asie, même le principal indice de la Bourse japonaise est finalement parvenu à battre son record de points qui remontait à... il y a 35 ans.
Exception notable à ce mouvement, les indices chinois continuent d'être boudés des investisseurs: Hong Kong comme Shanghai sont loin de leur sommet, atteint respectivement il y a cinq et quinze ans.
Quelles sont les raisons?
La hausse s'est faite en deux temps sur les principaux indices. Fin octobre, alors que les cours connaissent un trou d'air, l'évocation par le président de la banque centrale américaine Jerome Powell d'une baisse des taux directeurs de l'institution entraîne une chute pas vue depuis 2008 des taux d'intérêt et un fort rebond des actions.
Une baisse des taux permettrait de rendre le crédit plus abordable pour les entreprises et les ménages, relançant ainsi l'activité économique.
Les précédents records des indices remontaient pour beaucoup à janvier 2022, peu avant le début du cycle de remontée effrénée des taux directeurs des banquiers centraux afin de lutter contre l'inflation.
A ce premier élan s'ajoute depuis février, des résultats d'entreprises qui ont pour beaucoup épaté les investisseurs. Cela vaut notamment pour les actions qui avaient déjà beaucoup monté depuis plusieurs mois, comme Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp) et surtout Nvidia, l'entreprise star dans le secteur de l'intelligence artificielle.
"Les investisseurs de tous bords sont en train de comprendre que Nvidia n'est pas une bulle spéculative, que nous n'en sommes qu'au début de la piste de décollage", assure Stephen Innes, analyste de SPI AM.
Est-ce une bulle spéculative?
Cette progression fulgurante des marchés a suscité aussi des craintes de vivre l'euphorie précédent l'éclatement de bulles financière. L'intelligence artificielle est même comparée à la bulle d'internet au tournant des années 2000.
Cette envolée des cours a lieu en outre alors que la croissance économique est atone en Europe, et que les Etats-Unis ont passé une bonne partie de 2023 dans la crainte d'une récession, finalement largement infondée.
"La hausse actuelle est presque sans précédent", avec le S&P 500 progressant lors de 15 des 17 dernières semaines, illustre Henry Allen, de la Deutsche Bank.
Il souligne notamment que la hausse actuelle est concentrée dans quelques entreprises, notamment dans la tech américaine.
Même en Europe, les principaux indices boursiers sont très concentrés, explique John Plassard, spécialiste de l'investissement chez Mirabaud. Le CAC 40 reste très sensible à ses valeurs du luxe, LVMH en tête.
Cette situation rend le marché sensible à d'éventuelles chutes, comme celles connues sur l'ensemble de 2022 par Nvidia (-50%), Facebook (-64%), Apple (-26%) ou encore Amazon (-49%).
"La persistance de l'inflation" pourrait aussi causer des maux de tête aux investisseurs, puisque qu'avec des prix encore en surchauffe, les banques centrales pourraient maintenir leurs taux élevés plusieurs mois de plus, détaille M. Allen.
La publication d'une inflation plus forte que prévu en janvier avait d'ailleurs entraîné une nette baisse des actions.
Mais un marché au plus haut ne signifie pas qu'une chute est imminente: entre 2014 et 2024, seule une année, 2023, s'est produite sans que le S&P 500 n'établisse un nouveau sommet, rappellent les analystes du fournisseur de données financières Morningstar.
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