Mohammad Hassan Jafari, étudiant en théologie, pensera à la guerre à Gaza lorsqu'il ira voter vendredi aux élections législatives en Iran, en regrettant le désintérêt de nombreux Iraniens pour ce scrutin ayant "une portée internationale".
"Si Dieu le veut, je voterai. Parce que les élections renforcent à la fois la puissance intérieure du pays et sa puissance internationale", déclare cet homme de 27 ans.
A Qom, où il étudie, l'issue du scrutin ne fait aucun doute: cette ville sainte de l'islam chiite est l'un des bastions des conservateurs qui dirigent actuellement la République islamique.
Située à 120 kilomètres au sud de Téhéran, elle abrite nombre d'ayatollahs de premier plan et des dizaines de "hawzat" (séminaires théologiques).
Le long des artères, des banderoles suspendues montrent l'ayattolah Ali Khamenei, le Guide suprême, appelant à déposer un bulletin dans l'urne avec le slogan: "Pour devenir plus forts".
Téhéran s'affiche publiquement comme l'un des premiers soutiens de la cause palestinienne et défend les opérations militaires menées par les groupes armés pro-iraniens contre Israël et les Etats-Unis en Syrie, en Irak et en mer Rouge.
Dans ce contexte géopolitique tendu, les élections de vendredi sont l'occasion d'affirmer "l'indépendance du pays", estime Rahbari, une femme au foyer de 40 ans.
"Avec ces troubles dans la région, les attaques de l'ennemi dans les médias et les menaces contre notre pays, les gens peuvent, en votant, neutraliser tous les complots ennemis", affirme cette habitante de Qom vêtue d'un tchador noir.
"Attaque militaire"
"Si la participation est faible, la possibilité d'une attaque militaire" contre l'Iran "est plus forte", prévient Mohammad Hassan Jafari.
"Si nos ennemis voient que le gouvernement a le soutien du peuple, ils ne mettront pas l'option militaire sur la table". Mais ils le feront "s'ils voient que le pays est en proie à des troubles et des divisions", argumente le jeune religieux portant un turban noir.
La guerre à Gaza ne semble cependant pas être le principal souci des Iraniens, davantage préoccupés par les difficultés économiques liées à la forte inflation qui grève leur pouvoir d'achat.
Le scrutin est en outre le premier depuis le vaste mouvement de contestation ayant secoué le pays fin 2022 à la suite de la mort de Mahsa Amini, une jeune femme arrêtée pour non-respect du strict code vestimentaire.
Dans ce contexte, des experts s'attendent à ce que l'abstention soit élevée, voire atteigne un niveau record depuis le début de la République islamique en 1979.
Lors des précédentes législatives de 2020, seuls 42,57% des électeurs, selon les statistiques officielles, avaient voté, l'abstention ayant été particulièrement forte dans les grandes villes comme Téhéran.
"Ces élections font partie de la République islamique. Si nous n'y participons pas, toutes ces 40 années de dur labeur seront perdues", regrette Majid Hosseini, un retraité de 79 ans se promenant sur l'immense esplanade de Qom qui mène au mausolée de sainte Massoumeh, lieu important de pèlerinage pour les chiites.
Ce fervent soutien du pouvoir se désole de ne pouvoir défendre le Hamas: "J'ai demandé à plusieurs reprises d'aller combattre à Gaza, mais ils ont dit que j'étais trop vieux et ne m'ont pas laissé partir".
Pour sa part, Mehdi Mousavi, un mollah de 39 ans, rappelle que les Iraniens "vivent dans une république islamique" et que, de ce fait, ils doivent faire confiance aux religieux qui la dirigent qui sont "les garants du respect de l'islam et de la révolution".
Outre le Parlement, les électeurs renouveleront vendredi l'Assemblée des experts, un cénacle de 88 membres, tous religieux, pour les huit prochaines années. Ces derniers pourraient jouer un rôle central en vue de la succession du Guide suprême, l'ayatollah Khamenei étant âgé de 84 ans.
Lien court: