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L’Egypte a le droit de préserver sa sécurité mais pas aux dépens de Gaza et de sa résistance. Agresser et affamer sont des actes qui ne peuvent provenir que de l’ennemi israélien », a martelé le chef du gouvernement du Hamas à Gaza, Ismaïl Haniyeh, à l’issue de la prière hebdomadaire du vendredi.
Haniyeh a proposé de collaborer avec les organes de sécurité égyptiens et de communiquer toute information liée à des Palestiniens potentiellement impliqués dans des incidents survenus en Egypte, sous-entendu en contrepartie d’un assouplissement des restrictions imposées à l’ouverture du terminal.
Dans un communiqué publié le 14 novembre, le Hamas a également rejeté en bloc les accusations proférées à son encontre par les médias égyptiens estimant que cela ne faisait « que profiter au projet sioniste et aux conspirateurs contre la cause palestinienne».
Depuis la destitution du président Mohamad Morsi, membre des Frères musulmans, dont est issu le Hamas, les relations se sont détériorées entre Le Caire et la bande de Gaza, où le mouvement islamiste palestinien est au pouvoir. Ce dernier est accusé par les autorités égyptiennes de participer à la déstabilisation du Sinaï.
L’armée a détruit des centaines de tunnels de contrebande creusés sous la frontière avec la bande de Gaza et qui approvisionnaient le territoire palestinien en produits alimentaires et matériaux de construction, mais qui donnaient lieu également à un éventuel trafic d’armes au profit des Frères musulmans.
Quant au point de passage officiel de Rafah, très peu de voyageurs sont autorisés à l’emprunter, notamment à cause de la traque terroriste que mène l’armée égyptienne dans cette zone.
La fermeture fréquente du terminal de Rafah a eu pour effet d’asphyxier l’économie de Gaza.
« Les secteurs de l’industrie, du commerce, de l’agriculture, du transport et de la construction essuient des pertes mensuelles de 230 millions de dollars depuis le lancement de la campagne égyptienne pour boucher les tunnels en juin dernier. L’économie de Gaza comptait sur les tunnels pour subvenir à 40 % de ses besoins. Le taux de chômage pourrait franchir le cap des 43 % si les points de passage officiels restent fermés et que les tunnels sont détruits », déplore de son côté Hatem Eweida, responsable au ministère de l’Economie du gouvernement du Hamas. Justifiant le commerce clandestin entre Gaza et l’Egypte, il a affirmé que « les tunnels de contrebande ne sont pas une option stratégique mais une alternative imposée par le blocus».
Levée du blocus : égyptien ou israélien?
L’ambassadeur d’Egypte en Palestine, Yasser Osman, a affirmé que l’Egypte avait le droit de prendre toutes les mesures susceptibles de sécuriser ses territoires et ses frontières. Il a précisé que le blocus de Gaza est imposé par Israël.
L’ambassadeur a également appelé le Hamas à changer sa politique envers l’Egypte pour entretenir de bonnes relations basées sur la non-ingérence dans les affaires intérieures, ainsi que le respect de la souveraineté et des intérêts communs. « Le Hamas est passé du volet de la prédication à celui de l’incitation contre l’Egypte, sa révolution et son armée en utilisant les mosquées comme espace pour provoquer une fronde contre les dirigeants égyptiens et leur armée », accuse-t-il.
Commentant ce revirement des relations avec le Hamas, l’ancien ministre adjoint des Affaires étrangères, l’ambassadeur Hussein Haridi, explique que l’ancien président Hosni Moubarak tolérait les tunnels en solidarité avec le peuple palestinien car, à l’époque, ils ne représentaient pas de menace pour la sécurité nationale de l’Egypte. « Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Après janvier 2011, les tunnels ont été exploités pour faire passer des armes, des explosifs et des terroristes », constate-t-il.
Mais pour Walid Kazziha, professeur de sciences politiques à l’Université américaine du Caire, il est important que l’Egypte entretienne de bonnes relations avec Gaza qui jouxte ses frontières. « C’est à travers la coopération avec le Hamas que l’Egypte pourra assurer une meilleure sécurisation du Sinaï », estime-t-il.
Pour lui, « après le renversement des Frères musulmans en Egypte, le Hamas est affaibli et n’a pas intérêt à compromettre ses relations avec l’Egypte. Il est important de juger ce mouvement par ses actes loin de l’image qu’on cherche à lui attribuer car en fin de compte, le Hamas n’est pas Al-Qaëda. Rien ne permet de confirmer que les terroristes au Sinaï sont venus des tunnels à Gaza, si l’on tient compte de la perméabilité des frontières avec la Libye ou le Soudan ». Un discours qui reste marginal.
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