C’est à travers la vidéoconférence que les présidents Abdel Fattah Al-Sissi et son homologue russe, Vladimir Poutine, ont assisté mardi au coulage du béton du 4e réacteur de la centrale nucléaire d’Al-Dabaa, construite par l’entreprise russe Rosatom. Le porte-parole de la présidence de la République, Ahmed Fahmy, explique que le coulage du béton marque le début de la construction du projet qui, selon le calendrier établi, devrait être achevé en 2028 et entrer dans la phase d’exploitation. Et d’ajouter : « Ce n’est pas une longue période pour la mise en oeuvre d’un projet important tel que la centrale nucléaire d’Al-Dabaa. Cette centrale est importante pour la production de l’électricité, le transfert de la technologie et la formation des cadres égyptiens. Le projet permettra de produire une énergie propre, sûre et peu coûteuse à long terme ».
Lors de leur rencontre par vidéoconférence hier, les deux chefs d’Etat ont salué le projet, symbole du partenariat entre l’Egypte et la Russie. « L’Egypte est un partenaire stratégique de la Russie. Ce projet va donner un élan aux relations égypto-russses », a déclaré Vladimir Poutine. Pour sa part, le président Sissi a estimé qu’il s’agit d’un événement historique pour l’Egypte. « La centrale nucléaire d’Al-Dabaa ouvre une nouvelle page dans les relations entre l’Egypte et la Russie. Elle réalise le rêve de tous les Egyptiens ».
Selon le président du conseil d’administration de l’Autorité des centrales nucléaires, Amgad Al-Wakil, « la construction d’Al-Dabaa, la première centrale nucléaire d’Egypte, est le projet énergétique le plus ambitieux non seulement dans notre pays, mais sur tout le continent ». « Par son ampleur et son importance pour le développement, il peut être comparé au barrage d’Assouan, qui a acquis la renommée d’un miracle technique et est devenu le symbole de l’amitié et de la coopération entre l’Egypte et la Russie. Aujourd’hui, la Russie est non seulement le leader incontesté du marché mondial des technologies nucléaires, mais aussi un partenaire fiable, capable de fournir un ensemble complet de services dans le domaine nucléaire de la production d’électricité », a-t-il ajouté.
A rappeler que l’Egypte travaille sur la construction de sa première centrale nucléaire dans la ville d’Al-Dabaa conformément à un contrat signé avec la société d’Etat russe Rosatom en 2015. La centrale comprend 4 réacteurs d’une capacité de 1,2 gigawatt chacun, et le coût de sa construction s’élève à 30 milliards de dollars, dont 85 % sont financés par un prêt russe d’une valeur de 25 milliards de dollars. En une courte période, le projet a vu une rapide évolution, à commencer par le coulage de béton du premier réacteur en juillet 2022, puis le début du coulage de béton du deuxième réacteur en novembre de la même année. Les premières pièces du récupérateur de corium sont arrivées en mars 2023, suivies par le coulage de béton du troisième réacteur en mai.
Pour Hassan Salama, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire, la participation du président Poutine au coulage de béton de la centrale nucléaire d’Al-Dabaa confirme les relations fortes qui lient l’Egypte et la Russie. Ces relations sont aujourd’hui couronnées par ce projet important qui renforcera davantage la coopération entre les deux pays dans la période à venir. « L’Egypte a réussi à maintenir des relations solides avec la Russie en restant neutre vis-à-vis du conflit russo-ukrainien », explique Salama.
L’Egypte est considérée comme l’un des premiers pays à avoir pris conscience, au début des années 1950, de l’importance de l’énergie nucléaire, qui peut être utilisée pour fournir l’énergie et l’eau nécessaires au développement durable. C’est ainsi que l’Organisme de l’énergie atomique a été créé en 1957. L’Egypte a également été l’un des premiers pays fondateurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique en 1957 et elle a soutenu l’usage pacifique de l’énergie nucléaire.
L’Egypte a commencé à s’engager sur la « voie nucléaire pacifique » avec un réacteur soviétique. Le premier réacteur nucléaire de recherche, appelé réacteur expérimental de recherche et de formation (ETRR-1), a été construit par l’Union soviétique. Ce réacteur a été ouvert à Anshas en 1961.
L’Egypte a rapidement développé sa capacité de production d’électricité au cours de la dernière décennie et dispose aujourd’hui d’un excédent de puissance, avec des plans pour commencer ou développer les exportations d’électricité vers plusieurs pays du Moyen-Orient. Elle cherche également à porter la part de sa capacité de production d’électricité provenant de sources renouvelables à 40 % d’ici 2030 et à 42 % d’ici 2035.
Portée politique
Selon Salama, le lancement de la construction de ce projet a une grande importance et intervient dans un contexte de troubles régionaux, notamment la guerre à Gaza. « En tenant à être présent par visioconférence, Poutine réaffirme son intention de changer l’équilibre des forces dans le monde et de mettre fin au monopole américain », explique Salama. Et d’ajouter : « La Russie cherche par exemple à prendre part à tout règlement futur de la crise à Gaza », explique Salama.
Sur un autre volet, ce projet permettra de promouvoir la coopération économique et les investissements russes en Egypte, conclut Salama.
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