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Saïd Okasha : Ni l’Egypte, ni Israël, ni les Etats-Unis ne veulent en arriver à une rupture des relations

Maha Salem , Mercredi, 13 décembre 2023

3 questions à Saïd Okasha, analyste au CEPS d’Al-Ahram, sur l’impact de la guerre à Gaza sur les relations égypto-israéliennes.

Saïd Okasha

Al-Ahram Hebdo : Le Caire a haussé le ton cette semaine vis-à-vis d’Israël et des Etats-Unis en mettant en garde contre le fait qu’un déplacement forcé des Palestiniens vers le Sinaï pourrait conduire à une rupture des relations. Qu’en est-il ?

Saïd Okasha : La situation est très compliquée, l’Egypte n’a pas utilisé officiellement le terme « rupture des relations ». Car il y a plusieurs étapes qui précèdent une telle démarche. Les autorités égyptiennes peuvent convoquer l’ambassadeur israélien au Caire, rappeler l’ambassadeur égyptien en Israël. La démarche ultérieure serait d’expulser l’ambassadeur israélien et les membres de l’ambassade israélienne, de geler les relations diplomatiques, ainsi que l’échange d’informations. Le dernier pas est la rupture des relations entre les deux pays — ce qui ne signifie pas pour autant de revenir sur les Accords de Camp David —, mais ni l’Egypte, ni Israël, ni les Etats-Unis ne veulent en arriver là.

— Mais Israël envisage-t-il vraiment un déplacement des Palestiniens vers le Sinaï ?

— Israël ne veut pas ouvrir un autre front et ne veut pas affecter l’accord de paix de 1977. Les frontières entre l’Egypte et Israël sont stables ; si cette stabilité est menacée, Israël devra y renforcer sa présence militaire, cela représente un fardeau de plus qu’Israël ne veut pas. Israël travaille depuis plusieurs années pour parvenir à la normalisation avec les pays arabes. Or, le déplacement forcé des Palestiniens et l’occupation de Gaza menacent ses relations avec l’ensemble des pays de la région. D’autre part, la situation est très critique en Israël, il ne peut pas réoccuper la bande de Gaza. Le véritable problème aujourd’hui concerne l’après-guerre. On parviendra à terme à un cessez-le-feu, mais sous conditions. Comme le départ des chefs du Hamas vers un autre pays ou la mise en place d’un comité international pour le désarmement des Gazaouis. Plusieurs pays arabes et occidentaux se chargeront, financièrement parlant notamment, de la reconstruction de Gaza, mais avec la garantie qu’elle ne sera pas détruite par une autre guerre.

— Et quelle est la position des Etats-Unis vis-à-vis du déplacement des Palestiniens ?

— Washington ne peut pas porter la responsabilité de l’exode de 2,5 millions de Palestiniens. Il exercera une forte pression sur Tel-Aviv, même s’il soutient totalement Israël dans sa guerre. La priorité des Etats-Unis est plutôt de renforcer leurs relations avec plusieurs pays arabes pour former un front contre leurs adversaires, à savoir la Chine, l’Iran et la Russie.

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