Prédisant un « effondrement total de l'ordre public bientôt » à Gaza, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a de nouveau appelé à un cessez-le-feu humanitaire, s'attirant une fin de non-recevoir cinglante d'Israël.
Engagée depuis le 27 octobre dans une offensive terrestre contre le Hamas dans le nord de Gaza, en parallèle à sa campagne de frappes aériennes massives, Israël a étendu ses opérations au sol à l'ensemble du petit territoire palestinien surpeuplé. La population civile est poussée à se déplacer vers un périmètre de plus en plus exigu à Rafah, le long de la frontière égyptienne.
Conditions "désastreuses"
Face au bilan qui grimpe, au manque de vivres et aux milliers de déplacés se retrouvant totalement démunis, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a mis en garde contre un « effondrement total de l'ordre public bientôt » à Gaza.
M. Guterres a employé pour la première fois de son mandat une procédure rare, l'article 99 de la Charte des Nations unies, qui lui permet d'"attirer l'attention" du Conseil de sécurité sur un dossier qui "pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationale". Selon plusieurs diplomates, le Conseil de sécurité devrait se réunir vendredi pour examiner cet appel.
Selon le ministère de la Santé palestinien, 16,248 personnes, à plus 70% des femmes, enfants et adolescents, ont été tuées depuis le 27 octobre dans la bande de Gaza par les bombardements israéliens lancés en représailles de l'attaque du 7 octobre.
A Khan Younès, la plus grande ville du sud de la bande de Gaza, fantassins, blindés et bulldozers israéliens ont atteint le centre-ville, selon des témoins. L'armée israélienne a affirmé mercredi soir avoir « percé les lignes défensives » du Hamas, "éliminé un certain nombre de terroristes" et détruit environ "30 entrées de tunnels".
A la tombée de la nuit mercredi, d'épais nuages de fumée noire et des flammes ont continué de s'élever de Gaza. Dans la journée, des trainées dessinées par des roquettes tirées vers Israël depuis Rafah, dans le sud du petit territoire palestinien, ont aussi émaillé le ciel.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a déclaré que les forces israéliennes « encerclaient la maison de (Yahya) Sinouar », le chef du Hamas dans la bande de Gaza, à Khan Younès.
« Sinouar se cache sous terre », a affirmé ensuite Daniel Hagari, un porte-parole de l'armée, en allusion aux tunnels du Hamas sous Gaza.
Yahya Sinouar, 61 ans dont 23 passés dans des prisons israéliennes, est considéré comme l'architecte de l'attaque sans précédent du 7 octobre.
D'après le gouvernement israélien, 138 otages sont toujours retenus à Gaza, après la libération fin novembre dans le cadre d'une trêve de sept jours de 105 personnes enlevées, dont 80 en échange de 240 prisonniers palestiniens détenus par Israël.
L'armée israélienne a aussi annoncé la découverte dans le nord du territoire « d'un dépôt d'armes très important ». Elle a aussi dit avoir tué à ce jour "la moitié des commandants" du Hamas.
Sur sa chaîne Telegram, Hamas a affirmé que sa branche armée, les brigades Ezzedine al-Qassam "se bat violemment contre les forces d'occupation sur toutes les lignes d'incursion dans la bande de Gaza".
Livraison "minimale" de carburant
Le gouvernement israélien a toutefois approuvé mercredi une « livraison minimale de carburant - nécessaire pour éviter un effondrement humanitaire et l'apparition d'épidémies - dans le sud de la bande de Gaza », a annoncé sur X le bureau du Premier ministre. La quantité livrée sera « déterminée au fur et à mesure » en fonction de la situation humanitaire, a-t-il ajouté.
L'annonce israélienne intervient deux jours après l'appel de leur principal allié, les Etats-Unis, à laisser davantage de carburant entrer à Gaza.
Selon l'ONU, 1,9 million de personnes, soit environ de 85% la population, ont été déplacées par la guerre dans la bande de Gaza où plus de la moitié des habitations sont détruites ou endommagées par les bombardements israéliens.
L'ONU a calculé que 30% du territoire tombe désormais sous le coup des ordres d'évacuation quotidiens israéliens, et juge « impossible » de mettre en place des zones sécurisées pour accueillir les civils fuyant les combats.
La ville de Rafah, à la frontière avec l'Egypte, est le seul endroit où de l'aide humanitaire est encore distribuée, en quantité limitée, selon l'ONU. Mercredi, 80 camions transportant des vivres et du carburant y ont accédé, contre 170 par jour en moyenne pendant la trêve en vigueur du 24 au 30 novembre et 500 avant le 7 octobre, a indiqué le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (Ocha) dans son point quotidien.
Des Palestiniens ayant fui Khan Younès, à moins de 10 kilomètres, y ont monté un camp de fortune -tentes avec des toiles, des bâches en plastique, des lattes de bois. Pour leur survie : des branches ramassées ici et là pour faire du feu, de la semoule dans des gamelles pour unique nourriture. Des déplacés errent avec leur jerrican à la recherche d'eau.
*Article modifié par ahraminfo
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