Tout semble aujourd’hui entre les mains de l’opposition syrienne prise entre deux feux : les pressions de la communauté internationale pour qu’elle participe à la conférence de paix de Genève-2, et celles des groupes rebelles qui ont menacé de juger pour «
trahison » ceux qui seraient tentés de s’y rendre.
Pour le moment, la conférence de Genève-2, sur laquelle reposent tous les espoirs, reste hypothétique et sa réussite tributaire notamment de la participation de l’opposition. C’est pour cela que l’émissaire international, Lakhdar Brahimi, intensifie ses efforts pour rendre sa tenue possible. Brahimi s’est ainsi rendu lundi 28 à Damas, où il n’avait plus mis les pieds depuis fin 2012, dans le cadre d’une tournée régionale pour tenter d’organiser, non sans difficultés, Genève-2.
Sur le plan diplomatique, depuis des mois, on a l’impression de faire du surplace. La tâche de Brahimi est de plus en plus difficile en raison des positions inconciliables des deux parties.
D’un côté, le président syrien a déclaré que les conditions n’étaient pas encore réunies pour des négociations de paix avec l’opposition. Il a également écarté à plusieurs reprises toutes négociations avec des opposants ayant des liens avec des Etats étrangers ou avec les rebelles combattant ses troupes.
De l’autre, 19 importants groupes rebelles islamistes syriens ont prévenu que « les éventuels participants à la conférence commettront une trahison, dont ils devront répondre devant nos tribunaux », laissant clairement entendre qu’ils seront exécutés.
Réunion de l’opposition le 9 novembre
A la mi-octobre, des dizaines de groupes rebelles avaient rejeté l’autorité de la Coalition Nationale Syrienne (CNS), qui chapeaute depuis l’étranger les groupes d’opposition politique, en estimant qu’elle avait échoué. « Nous annonçons que la conférence Genève-2 n’est pas, et ne sera jamais, le choix du peuple ou une revendication de notre révolution », ont annoncé ces groupes dans un communiqué, lu par le chef de la brigade Souqour Al-Cham, Ahmad Eissa Al-Cheikh.
« Pour nous, il s’agit d’un élément supplémentaire du complot visant à faire dérailler notre révolution et à la stopper », ont insisté ces groupes, dont certains font partie de l’Armée Syrienne Libre (ASL).
L’opposition syrienne, très divisée sur une éventuelle participation à cette conférence de paix déjà plusieurs fois reportée, doit se réunir le 9 novembre en Turquie. Elle réclame des garanties qu’elle aboutira à un départ de Bachar Al-Assad, ce que le régime rejette catégoriquement. En Turquie, où Brahimi a rencontré le chef de l’ASL, le général Sélim Idriss, il a réaffirmé que « Nous cherchons tous une solution à mettre fin au bain de sang ». Il a aussi dit qu’il fallait « s’attaquer à la racine du problème, à savoir (le président syrien) Bachar Al-Assad ».
Selon Mohamad Samy, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram au Caire, les divisions au sein de l’opposition n’arrangent pas les choses. « Il y a d’une part la CNS, qui représente la branche politique et qui voit que la solution politique et les négociations sont les meilleurs moyens pour régler la crise. La CNS ne croit pas en une solution militaire, contrairement à une partie de la rébellion qui veut chasser Bachar Al-Assad par les armes », explique-t-il, tout en ajoutant que « c’est là une situation critique qui plonge davantage le pays dans le chaos ».
Cet avis est partagé par plusieurs analystes. Sameh Rached, spécialiste du dossier syrien à Al-Ahram, explique que la communauté internationale doit exercer ses pressions sur les pays qui aident les rebelles et le régime. « La plupart des Syriens veulent la paix maintenant. Ils sont fatigués des combats, des violences et des conflits, ils veulent la stabilité et la sécurité », souligne-t-il.
L’Iran devrait participer
Si les négociations de paix ne peuvent se faire sans l’opposition, elles ne peuvent pas non plus se faire sans la participation de l’Iran.
A cet égard, Brahimi a estimé « naturel et nécessaire » que l’Iran participe à Genève-2. « Si l’Iran est invité, nous participerons à Genève-2 pour aider à trouver une solution diplomatique », a affirmé le ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, en ajoutant que la position traditionnelle de l’Iran est qu’il appartient « au peuple syrien et aux différents groupes de trouver un accord » pour mettre fin à la crise.
Les Etats-Unis n’ont pas exclu une participation de l’Iran aux négociations de Genève-2, tout en exigeant de ce pays qu’il reconnaisse l’accord conclu à Genève en juin 2012 entre les 5 membres du Conseil de sécurité de l’Onu, ainsi que l’Allemagne et des pays de la Ligue arabe. Aux termes de cet accord, le pouvoir en Syrie devrait être transféré à un gouvernement de transition, reconnu par les deux parties rivales.
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