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La philosophie de la Constitution

Lundi, 28 octobre 2013

Quel est l’objectif géné­ral de toute Constitution ? Le grand penseur Louis Awad a répondu à cette question dans une série d’ar­ticles rédigés en 1954 sous le nom de La Constitution du peuple. Il a écrit : Je n’entends pas par l’ob­jectif général de la Constitution les principes constitutionnels généraux comme la nature du régime, la forme de l’Etat, les lois essentielles ou les garanties juri­diques. Il est vrai que ce sont tous là des éléments essentiels de la Constitution, mais ils ne sont, en fait, que des outils qui réalisent un objectif plus important. Mais quel est cet objectif ? Louis Awad répond : L’objectif essentiel de toute Constitution réside dans l’idée humaine que nous voulons que la Constitution réalise. La Constitution est le fondement de toute législation et le point com­mun de toutes les lois promul­guées dans le pays. Elle est la source de toutes les lois. Exactement comme les lois sont promulguées pour réaliser un cer­tain objectif, la Constitution est rédigée pour réaliser un certain objectif. Cependant, l’objectif de la Constitution est un objectif glo­bal. Cet objectif est exprimé par ce qu’on appelle la philosophie de la Constitution. En effet, les peuples rédigent des Constitutions pour réaliser une philosophie humaine et sociale.

Louis Awad a écrit ces mots il y a près de 60 ans. Aujourd’hui, la quatrième génération des Constituions confirme cette idée que les Constitutions doivent être rédigées selon une certaine philo­sophie.

Le texte constitutionnel n’émane pas du néant. Il ne s’agit pas d’un texte littéraire ou rhétorique rédi­gé par des personnes talentueuses. Il ne s’agit pas non plus d’un texte regroupant une idée et son contraire. Prenons la notion de la justice sociale comme exemple. Cette notion ne peut pas être citée en queue des principes constitu­tionnels. Il s’agit d’une valeur qu’il faut oeuvrer à réaliser à tra­vers la détermination précise de son sens tout en assurant sa pré­sence dans l’ensemble du texte constitutionnel, notamment dans tout ce qui concerne le volet éco­nomique. Nous pouvons prendre l’exemple de la Constitution brési­lienne, l’une des Constitutions de la quatrième génération.

Dans le chapitre 7 intitulé : le système économique et financier (remarquons que la Constitution fait la différence entre ce qui est économique et ce qui est financier), le premier sous-chapitre, portant le titre des principes généraux des activités économiques, aborde la question dans 170 articles. Il sti­pule : Il incombe au système éco­nomique basé sur l’estime de la valeur de l’homme et sur l’écono­mie libre d’assurer à chaque individu une vie décente confor­mément à la justice sociale. Immédiatement, le législateur répond à la question : Comment est-il pos­sible d’assurer cela ? Il détermine 9 prin­cipes organisant le processus écono­mique au Brésil : la souveraineté nationale, la propriété privée, le rôle social de la propriété, la libre concurrence, la protection du consommateur, la protection de l’environnement, la réduction des écarts sociaux et régionaux, la continuité de la main-d’oeuvre per­manente, la préférence des petites entreprises oeuvrant selon les lois brésiliennes et dont le siège se trouve au Brésil.

Il s’avère clairement que les prin­cipes précédents réalisent les prin­cipales idées qui forment la teneur de la philosophie économique bré­silienne. Une philosophie qui accorde la priorité à l’égalité sociale et aux entreprises natio­nales, qui adoptent des politiques économiques reliées à la main-d’oeuvre permanente et à la protec­tion du consommateur et de l’envi­ronnement. Le législateur n’oublie pas d’aborder le rôle social de la propriété qui constitue une ques­tion importante dans la loi et la sociologie politique et qui se répète à plusieurs reprises. Dans ce sous-chapitre, le législateur poursuit dans 9 articles détaillés la description du système écono­mique et financier brésilien. Vient ensuite dans le sous-chapitre suivant, le discours sur les poli­tiques de développe­ment qui seront adop­tées. Puis, un chapitre aborde la politique agricole dans 8 articles et plus de 30 clauses.

Enfin, la Constitution parle du système financier de manière géné­rale, puis d’une manière plus détaillée dans des sous-chapitres spécialisés citant le système fiscal qui doit être mis en vigueur. C’est ainsi que sont rédigées les Constitutions de quatrième généra­tion. Un intérêt particulier est accordé à la philosophie de la Constitution et à la manière de la mettre à exécution. Par conséquent, il est tout à fait inacceptable de limiter le discours à l’économie dans quelques clauses puis de les conclure sur un concept de justice sociale.

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