Grâce à un accord annoncé avec damas, l’Onu va reprendre depuis la Turquie l’acheminement de son aide humanitaire aux zones rebelles du nord de la Syrie. Selon les analystes, cet accord est considéré comme un soutien et une reconnaissance par la communauté internationale du régime du président syrien Bachar Al-Assad. « Sous la pression de Washington, l’Onu a accepté cet accord, et dans les jours à venir, la communauté internationale va fournir des aides financières au régime syrien. Washington veut renforcer son influence dans la région. Washington est inquiet du recul de son rôle alors que ceux de la Chine et de la Russie croissent fortement. Il veut retrouver son influence », explique Dr Mona Soliman, professeure de sciences politiques.
En vertu d’un mécanisme de l’Onu mis sur pied en 2014, le poste-frontière de Bab Al-Hawa était le dernier avec la Turquie et par lequel les agences humanitaires des Nations-Unies pouvaient livrer nourriture, eau et médicaments, sans autorisation préalable du gouvernement syrien. Mais le 11 juillet, après un veto de la Russie, alliée de la Syrie, au Conseil de sécurité, ce mécanisme dénoncé par Damas comme une violation de sa souveraineté n’avait pas été reconduit. Le régime de Bachar Al-Assad, qui ne contrôle pas ce poste-frontière en zone rebelle, avait alors posé ses propres conditions pour que l’aide soit acheminée pendant 6 mois.
En vertu du nouvel accord, l’Onu et ses partenaires vont continuer à fournir une assistance en zones rebelles avec « l’engagement de toutes les parties pour préserver l’indépendance opérationnelle de l’Onu », a précisé Farhan Haq, porte-parole du secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres. En juillet, la Syrie a exigé que l’Onu travaille pleinement avec elle et ne communique pas avec les « organisations terroristes », en référence au groupe djihadiste Hayat Tahrir Al-Cham (HTS, ancienne branche locale d’Al-Qaëda), qui contrôle Bab Al-Hawa. Mais ces dernières semaines, plusieurs ONG ont mis en garde contre le risque de laisser Damas contrôler l’acheminement via Bab Al-Hawa, par lequel passent 85°% de l’aide humanitaire.
En outre, les Nations-Unies estiment que la Syrie a besoin d’au moins 15 milliards de dollars pour se remettre du séisme du 6 février qui a fait près de 6 000 morts dans ce pays. Les ONG et les opposants syriens avaient alors critiqué la lenteur de l’aide onusienne dans le nord syrien où vivent plus de 4 millions de personnes. Mi-février, Damas avait ouvert deux autres points de passage avec la Turquie : Bab Al- Salama et Al-Rai. Avec une autorisation renouvelée tous les trois mois, l’Onu s’était félicitée que la Syrie ait reconduit « jusqu’au 13 novembre » la permission de passer par ces deux autres postes-frontières.
L’accord avec l’Onu pose indirectement la question de retour des réfugiés syriens en Turquie. A la veille du nouvel accord avec l’Onu, le président Assad a affirmé que le retour dans leur pays des millions de réfugiés syriens était rendu impossible par l’état désastreux des infrastructures détruites par la guerre. Selon l’Onu, quelque 5,5 millions de réfugiés syriens sont enregistrés en Turquie, au Liban, en Jordanie, en Iraq et en Egypte. Un retour progressif des réfugiés est l’une des principales demandes des pays arabes, qui ont réintégré le régime de Damas au sein de la Ligue arabe en mai dernier.
Selon des analystes, la Syrie mise sur les pays arabes, notamment les riches Etats du Golfe, pour financer sa reconstruction. « Le régime syrien prévoit que l’accord avec l’Onu sur les aides donnera l’occasion à d’autres accords pour la reconstruction de la Syrie. Bachar Al-Assad a été isolé pendant des années sur le plan politique, il essaye maintenant de trouver une place pour améliorer la situation de son pays aux niveaux économique, politique et sécuritaire », explique Mona Soliman.
Cependant, la situation sécuritaire est loin d’être stabilisée. Le groupe djihadiste Daech a commis le 10 août un attentat contre un bus de l’armée dans l’est de la Syrie, faisant plus de 33 morts et une dizaine de blessés. Cet attentat est considéré comme l’attaque la plus meurtrière depuis plusieurs mois. Daech a récemment intensifié ses attaques pour envoyer un message qu’il existe toujours et qu’il est fort et puissant, surtout dans les zones désertiques où ses combattants sont repliés après la perte en 2019 des vastes territoires qu’il contrôlait dans ce pays. Quatre de ses chefs successifs ont été tués depuis 2019. Le 3 août, la formation extrémiste avait annoncé la mort du dernier en date et la nomination d’un successeur après une frappe américaine.
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