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75 ans de déboires

Maha Salem , Jeudi, 11 mai 2023

De la Nakba aux tribulations du processus de paix, des guerres israélo-arabes aux deux Intifadas, de l’exode et des camps de réfugiés au blocus de Gaza, les Palestiniens vivent depuis un trois quarts de siècle une véritable tragédie. Retour en photos.

75 ans de déboires

La clé, symbole du droit de retour

C’est le 14 mai 1948 que tout  a commencé. A la fin du mandat britannique sur la Palestine, David Ben Gourion, président du Conseil national juif, proclame « l’indépendance » de l’Etat d’Israël, ou plutôt la création, appliquant ainsi le plan de partage de l’Onu décrété un an auparavant. Le lendemain, éclate la première guerre israélo-arabe, les pays arabes refusant le plan de partage. Ce premier conflit conduit à l’exode de quelque 800 000 Palestiniens. La majorité d’entre eux sont forcés à rester en exil malgré le vote par l’Onu de la résolution 194, le 11 décembre 1948, qui prévoit le droit de retour des réfugiés palestiniens dans leurs foyers ou une compensation financière. Depuis, les réfugiés et leurs descendants gardent les clés de leurs maisons. Tout un symbole.

Quatre guerres sanglantes

Au lendemain de la proclamation de l’Etat d’Israël, l’Egypte, la Jordanie, l’Iraq, la Syrie et la résistance palestinienne entrent en guerre contre Israël. Mais la guerre se solde par une défaite arabe, notamment en raison du soutien de la communauté internationale à Israël. Une deuxième guerre israélo-arabe a lieu en 1956. A la suite de la nationalisation du Canal de Suez, la France, le Royaume- Uni et Israël attaquent l’Egypte. Sous pression américano-soviétique, un cessez-le-feu est décrété. Puis 1967, c’est la Naksa. Israël occupe le Sinaï, la bande de Gaza, la Cisjordanie, dont Jérusalem- Est, et le Golan syrien. Environ 350 000 Palestiniens sont expulsés. La colonisation débute. Israël annexe Jérusalem- Est et déclare Jérusalem comme sa capitale : faits accomplis contraires au droit international et condamnés par la communauté internationale. L’Onu adopte la résolution 242 qui demande notamment le retrait des territoires occupés. Mais, Israël fait la sourde oreille et poursuit son occupation. Les réfugiés palestiniens vivent dans des conditions difficiles, dans des camps installés dans les pays voisins.

En 1973, l’Egypte et la Syrie attaquent Israël dans le but de récupérer les territoires occupés en 1967. L’Egypte récupère le Sinaï. Mais l’ensemble des territoires occupés en 1967 ne sont pas libérés. Depuis 1973, aucune guerre d’envergure n’a eu lieu, mais des épisodes sanglants ponctuent le conflit et touchent l’ensemble de la région. En 1982, Israël attaque le Sud-Liban. Ce sont les tristement célèbres massacres de Sabra et Chatila, des camps de réfugiés palestiniens au Liban.

L’OLP, de la lutte armée à la reconnaissance internationale

1964 : l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) a été créée par la Ligue arabe. Réunissant plusieurs mouvements, associations, syndicats et factions, la Charte de l’OLP adoptée en 1968 prévoit la destruction d’Israël par le recours à la lutte armée et la création d’un Etat palestinien. Yasser Arafat est nommé président de l’OLP en 1969. Son parti, le Fatah, connu comme Mouvement de libération de la Palestine créé en 1959, devient la principale composante de l’organisation. Lors de la conférence arabe d’Alger (novembre 1973), l’organisation est reconnue comme l’unique représentant légitime du peuple palestinien. En 1974, le droit à l’autodétermination des Palestiniens et la représentativité de l’OLP sont proclamés par différentes instances internationales, dont l’Assemblée générale des Nations-Unies qui invite l’OLP à participer comme observateur à ses débats. Devenue membre à part entière du Mouvement des non-alignés en 1975, l’OLP est admise au sein de la Ligue arabe en septembre 1976 avec tous les droits d’un Etat membre. Elle est par ailleurs reconnue par une centaine d’Etats. A la fin des années 1980 et l’ouverture de discussions avec Israël, l’OLP est alors reconnue comme le représentant du peuple palestinien. Considéré comme le vrai leader et militant de la question palestinienne, Yasser Arafat demeure président de l’OLP jusqu’à sa mort en novembre 2004. Mahmoud Abbas est élu à la tête de l’Autorité palestinienne avec 62,5 % des suffrages en janvier 2005.

La première Intifada, les pierres comme seule arme

En décembre 1987, un mouvement de résistance populaire éclate, d’abord de manière spontanée. C’est l’Intifada, le soulèvement, la guerre des pierres. Les pierres contre les armes. L’Intifada brise le statu quo qui avait régné dans les territoires occupés pendant 20 ans, au prix toutefois de nombreuses victimes. Car l’armée israélienne la réprime fortement. Des milliers de Palestiniens sont blessés et sont faits prisonniers. Mais la guerre des pierres garde toute sa symbolique : celle d’un conflit disproportionné.

Les Accords d’Oslo et l’espoir d’un règlement

Israël et l’OLP signent en septembre 1993 une déclaration de principe (Oslo 1) sur une autonomie palestinienne transitoire de 5 ans. Le premier ministre israélien Yitzhak Rabin et Yasser Arafat échangent une poignée de main historique. Le 4 mai 1994, ils signent au Caire un accord sur la bande de Gaza et de la ville de Jéricho. Le 1er juillet 1994, après 27 ans d’exil, Yasser Arafat rentre à Gaza. En septembre 1995, Israéliens et Palestiniens signent des accords à Washington, des accords sur l’extension de l’autonomie, dits Oslo II, divisant la Cisjordanie en trois zones à souveraineté différenciée.

Deuxième Intifada, l’image inoubliable de Mohamed Al-Durra

Juillet 2000 : échec du Sommet de Camp David, les dirigeants israéliens voulant notamment annexer une partie de la Cisjordanie, avoir la souveraineté sur Jérusalem et enterrer le droit au retour des réfugiés. Septembre 2000 : déclenchement de la seconde Intifada à la suite de la visite d’Ariel Sharon, chef du parti Likoud, sur l’Esplanade des mosquées à Jérusalem. Cette Intifada en partie armée laisse peu de place à la société civile, contrairement à celle de 1987. L’armée israélienne envahit les villes palestiniennes et assiège Arafat à Ramallah. La répression israélienne est terrible : massacres à Jénine, Naplouse, assassinats de dirigeants, des milliers de prisonniers, destructions d’habitations et d’infrastructures. Cette deuxième Intifada fait plus de 4 700 morts. On en garde surtout une image qui a fait le tour du monde : celle de la mort du petit Mohamed Al- Durra. Durant cette seconde Intifada, la mort en direct en pleine rue d’un jeune Palestinien de 12 ans à Gaza fait le tour du monde et suscite une émotion considérable. La photo du cadavre du jeune garçon circule partout dans la presse. Très vite, il devient l’icône d’une lutte idéologique.

Luttes fratricides et blocus de Gaza

En janvier 2006, le Hamas remporte la majorité absolue aux élections législatives palestiniennes. Le 19 février, Ismaïl Haniyeh devient premier ministre. Quelques jours plus tard, le gouvernement israélien déclare qu’il ne négociera pas avec le Hamas tant que celui-ci n’aura pas renoncé à la lutte armée, reconnu Israël, accepté les Accords d’Oslo et approuvé des sanctions économiques à l’encontre de l’Autorité palestinienne. En juin 2007, de violents combats éclatent dans la bande de Gaza entre le Hamas et les forces de sécurité du Fatah. Le Hamas prend le contrôle de la totalité de la bande de Gaza. Mahmoud Abbas démet Ismaïl Haniyeh et décrète l’état d’urgence. En janvier 2008, en représailles aux tirs de roquettes palestiniens par les activistes du Hamas, Israël répond par une série de raids meurtriers sur la bande de Gaza. Le 17 janvier, Israël impose un blocus total de Gaza, privant la population de carburants, de produits alimentaires et humanitaires. Tous les points de passage sont fermés. Depuis, la bande de Gaza subit régulièrement des bombardements aériens, terrestres et maritimes causant des pertes graves. Des offensives suivies d’accalmies précaires.  

Les colonies juives, une extension envers et contre tous

C’est dès 1967 qu’Israël a commencé à construire des colonies israéliennes dans les territoires occupés. Depuis, et bien qu’elle soit jugée illégale par le droit international, la colonisation n’a jamais cessé. Elles englobent désormais plus de 705 000 habitants répartis comme suit : environ 440 000 en Cisjordanie, plus de 230 000 à Jérusalem-Est et environ 35 000 sur le Golan. La colonisation est considérée par la communauté internationale comme un des principaux obstacles à un règlement du conflit israélopalestinien. Et le gouvernement israélien actuel, le plus extrémiste de tous les temps, a affirmé qu’il « encouragera et développera la colonisation » sur les terres sur lesquelles « le peuple juif a un droit exclusif et inattaquable ». C’est tout dire.

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