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Kenya : les Shebab changent de stratégie

Sabah Sabet avec agences, Lundi, 30 septembre 2013

Après l’attaque du centre commercial de Nairobi, les rebelles somaliens Shebab menacent d’effectuer de nouveaux attentats.

Kenya
L'attaque de Nairobi présente un double message des rebelles Shebab au Kenya et aussi au monde. (Photo: AP)

L’attaque du centre commercial Westgate à Nairobi est un message aux Occidentaux qui ont soutenu l’invasion kényane en Somalie en versant le sang des musulmans pour l’intérêt de leurs compagnies pétrolières ». Telle est la menace explicite lancée par Ahmed Abdi Godane, chef des insurgés somaliens shebab, dans un message transmis à l’AFP cette semaine. Une menace brandie une semaine après l’attaque meurtrière du samedi 21 septembre, au centre commercial Westgate à Nairobi, qui a fait au moins 67 morts, 240 blessés et 59 disparus. Une prise d’otages qui a duré plusieurs jours.

En fait, depuis 2011, le gouvernement somalien soutenu par la force de l’Union africaine (Amisom) combat les rebelles qui veulent, à travers des attaques et des actes de violence, mettre la main sur plusieurs terrains somaliens. En 2012, l’Amisom les a forcés de se retirer de leurs bastions, notamment au sud. On croyait alors avoir porté un coup dur aux rebelles islamistes. Jusqu’à la semaine dernière. Le mouvement Shebab a alors surpris tout le monde par sa réapparition meurtrière sur les territoires kényans.

Selon les experts, les Shebab ont voulu envoyer un double message au Kenya et aussi aux Occidentaux. « Avec cette attaque et les menaces de nouveaux attentats, les Shebab veulent forcer le Kenya à retirer ses militaires qui les combattent en Somalie », explique Maher Shaaban, analyste et professeur d’histoire contemporaine à l’Institut des études africaines à l’Université du Caire. En effet, L’armée kényane intervient depuis fin 2011 dans le sud somalien. Depuis mi-2012, le Kenya est intégré à la force de l’Union africaine en Somalie (Amisom), financée par la communauté internationale et comptant 17 700 hommes, dont un important contingent kényan. Cette force a pu déloger en octobre 2012 les Shebab de leurs bastions, notamment de la ville portuaire de Kismayo. Selon Shaaban, le conflit avec le Kenya remonte à des plusieurs années. « Les frontières tracées par la colonisation britannique ont donné l’occasion au Kenya d’envahir des terrains somaliens et c’est ainsi que les rebelles essaient actuellement de mettre la main sur ces terrains », ajoute-t-il. En outre, si le premier message est envoyé au Kenya, le deuxième concerne l’Occident. « Après leur défaite militaire sur le terrain, les Shebab ont changé de stratégie : ils veulent exporter leur conflit hors de la Somalie pour donner un message au monde qu’ils existent encore, et qu’ils peuvent même menacer les Occidentaux », explique Ayman Shabana, expert des affaires africaines.

La Somalie, « un nid de terroristes »

Or, peut-on vraiment considérer que ce mouvement présente une vraie menace ? Sous la direction d’Ahmed Abdi Godane, considéré comme un dur, le mouvement Shebab s’est rallié à Al-Qaëda et à son djihad mondial en février 2012. « A cause de cette alliance, le mouvement est dorénavant un des dangereux groupes extrémistes surtout à l’est de l’Afrique », explique Maher Shaaban. D’après lui, ce sont la fragilité et la faiblesse des gouvernements qui se sont succédé au pouvoir après le départ du président Ziad Berri en 1991, qui ont donné l’occasion à plus de divisions internes et enfin à la naissance de ces groupes extrémistes. Et, ajoute-t-il, « les frontières non contrôlées ont fait de la Somalie un nid de terroristes ».

De plus, ces islamistes, forts de quelque 5 000 hommes à l’armement sommaire, n’ont de toute façon pas les moyens d’une guerre conventionnelle contre l’Amisom et ont fait le pari — bien fondé — que l’armée gouvernementale, divisée et mal payée, serait incapable de s’opposer à leur éventuel retour au pouvoir si l’Amisom se retirait.

Ainsi, la seule solution réside en un soutien réel de la communauté internationale qui, selon Shaaban, « doit aider le gouvernement somalien non seulement militairement mais aussi et surtout économiquement pour réaliser un développement à même de mener à une certaine stabilité ».

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