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Barrage Julius Nyerere, un rêve qui devient réalité

Amira Samir , Lundi, 16 janvier 2023

Le remplissage du barrage Julius Nyerere en Tanzanie a commencé fin décembre. Ce mégaprojet hydroélectrique devrait contribuer au développement économique du pays. Réalisé par des entreprises égyptiennes, il représente un modèle de coopération intra-africaine.

Barrage Julius Nyerere, un rêve qui devient réalité

Sur la rivière rufiji, au sud-ouest de Dar es-Salam, le rideau s’est finalement levé sur un projet de rêve tanzanien qui date des années 1960. Le premier remplissage du barrage hydroélectrique Julius Nyerere a été lancé fin décembre par Samia Hassan, présidente de la République tanzanienne, lors d’une cérémonie à laquelle a participé une délégation gouvernementale égyptienne de haut niveau, conduite par les ministres des Affaires étrangères et du Logement. Mis en oeuvre par le consortium égyptien Arab Contractors-Elsewedy Electric, les travaux de construction de cette centrale hydroélectrique de 2 115 MW ont duré environ quatre ans. En fait, le barrage porte le nom de Julius Kambarage Nyerere (1922-1999), un activiste anticolonial tanzanien, politicien et philosophe, qui a dirigé l’indépendance du pays vis-à-vis de la Grande-Bretagne en 1961, puis a été nommé premier ministre et premier président de la Tanzanie (1964-1985).

Pourquoi ce barrage est-il important pour la Tanzanie ? Il s’agit de l’un des plus grands mégaprojets hydroélectriques d’Afrique de l’Est en termes de capacité de stockage. Sa capacité de production est de 2 115 mégawatts transmis par des lignes de 400 kilovolts à une sous-station reliée au réseau électrique national. Le barrage vise à renforcer l’économie tanzanienne en produisant de l’électricité pour approvisionner l’industrie. Il devrait également résoudre le problème de la pénurie d’électricité en garantissant une alimentation propre aux Tanzaniens qui souffrent de coupures répétitives du courant. « La Tanzanie est l’un des pays économiquement émergents de l’Afrique de l’Est et du Bassin du Nil. Elle a ainsi besoin de grands projets de développement. Une fois pleinement opérationnelle, l’hydroélectricité représentera la majeure partie de la capacité électrique en Tanzanie. Cela donnera un coup de pouce indispensable à la croissance économique de ce pays peuplé d’environ 63 millions d’habitants », explique Mohamad Karim Abdel-Karim, expert des affaires africaines. La Tanzanie dispose actuellement d’une capacité d’environ 1 600 MW. Presque la moitié de cette capacité provient du gaz naturel et de l’hydroélectricité, alors que le reste provient principalement d’autres combustibles fossiles. Quant à la contribution du solaire, elle est toujours inférieure à 1 %. Le coût du projet est estimé à environ 3 milliards de dollars. Le projet est entièrement financé et géré par la Tanzania Electric Supply Company (Tanesco), relevant du gouvernement tanzanien.

Modèle de coopération

La construction du barrage Julius Nyerere reflète la profondeur des relations égypto-tanzaniennes, a déclaré Sameh Choukri, ministre égyptien des Affaires étrangères, qui a assisté à la cérémonie inaugurant le remplissage du barrage. « Avec des mains égyptiennes, une détermination africaine et un partenariat unique entre les secteurs privé et public en Egypte et en Tanzanie ... Ensemble, nous cueillons les fruits de notre coopération pour le progrès des peuples d’Afrique », a souligné Choukri lors de son discours. Envisagé depuis les années 1960, ce projet a été attribué à deux entreprises égyptiennes de construction, Elsewedy Electric (secteur privé) et Arab Contractors (secteur public), suite à un appel d’offres international en 2018 pour une valeur de 2,9 milliards de dollars, après une concurrence avec des entreprises égyptiennes, chinoises, turques, brésiliennes et libanaises (voir historique). La zone du projet sera desservie par de nouvelles routes pour faciliter les déplacements et relier les différentes parties du projet, en plus de la construction d’un complexe résidentiel intégré sur une superficie de 19 000 mètres carrés. « Ce projet s’inscrit dans le cadre de la stratégie égyptienne de développement et de rapprochement avec les pays du Bassin du Nil, basée sur le principe d’intégration afin d’assurer la sécurité et le développement durable, et de soutenir les intérêts de toutes les parties. Il s’inscrit dans un ensemble de projets stratégiques que l’Egypte met en oeuvre dans certains pays africains. Le projet permettra la mise en oeuvre d’autres projets, notamment dans les domaines des énergies propres », souligne Mohamad Abdel-Karim. En outre, selon l’expert, ce projet est considéré comme le passage obligé vers « l’Initiative africaine pour les énergies renouvelables », menée par la commission de l’Union africaine et l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA). Cette initiative, qui vise à exploiter l’énorme potentiel du continent en matière d’énergie renouvelable, a pour objectif de générer 300 gigawatts d’ici 2030 et de réduire les émissions à effet de serre en Afrique.

Avantages sociaux, économiques et environnementaux

Outre la fourniture d’énergie propre à la Tanzanie, le barrage permettra de protéger le pays des impacts climatiques comme les inondations saisonnières et les pluies torrentielles qui ont mené à la propagation de maladies telles que le paludisme. En effet, la Tanzanie souffre, comme les autres pays d’Afrique de l’Est, de périodes de sécheresse prolongées qui réduisent le niveau des barrages et la production de l’énergie hydraulique. Par ailleurs, ce projet vise à protéger les animaux, la végétation et les habitants de la réserve de Selous de la sécheresse annuelle et à assurer la sécurité alimentaire des pays d’Afrique de l’Est qui sont parmi les pays les plus touchés par les crises mondiales, notamment la guerre en Ukraine. « La construction du barrage permettra également d’organiser la pêche fluviale en aval du barrage et d’attirer des investissements étrangers directs au cours de la période à venir », conclut Abdel-Karim.

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