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La pomme de terre, reine de la table !

Chahinaz Gheith , Mercredi, 14 décembre 2022

Frites, purée, en sauce ou en salade, la pomme de terre prend une place prépondérante dans nos plats depuis plus de deux siècles. Focus sur cette culture qui se classe au deuxième rang des exportations agricoles égyptiennes.

La pomme de terre, reine de la table !
Les agriculteurs du village d’Al-Birgaya sont si fiers de leur production abondante en pommes de terre au cours de cette saison agricole.

Comme tous les ans à cette période de l’année, l’arrachage de pommes de terre a débuté dans le village d’Al-Birgaya, au gouvernorat de Minya. C’est la course dans les champs en ce moment. Une arracheuse tourne à plein régime, elle soulève les pieds de pommes de terre pour ne pas abîmer les tubercules. A genoux dans la terre, une dizaine d’ouvriers agricoles s’affairent à trier des amas de pommes de terre avant de les placer dans des sacs en plastique. Quelques enfants arpentent le champ en suivant le tracteur équipé de sa ramasseuse. Ils sont très motivés à courir d’une patate à l’autre, le temps sec a facilité les allers-retours sur cette terre sablonneuse. «  Al-Birgaya cultive environ 20000 feddans de pommes de terre. C’est donc l’une des principales cultures au village et c’est notre gagne-pain saisonnier. La saison de la récolte commence au mois d’août et finit en novembre ». En général, les pommes de terre ont besoin de 90 à 120 jours pour accomplir leur cycle. Une plante mère donne entre 9 et 15 patates», lance hadj Mohamad Hassanein, agriculteur qui possède 20 feddans. Et d’ajouter: « Cette culture a toujours constitué une source de revenus stable. C’est la seule chose qui nous procure de la joie, car cela permet d’augmenter nos revenus ».

En fait, le village d’Al-Birgaya connaît une dynamique économique importante pendant la saison des récoltes des pommes de terre, et devient, ainsi, une destination privilégiée pour la main-d’oeuvre active, notamment celle provenant des autres bourgades, compte tenu des rendements économiques importants de cette activité. Et ce n’est pas tout, Al-Birgaya est aussi pionnier dans la production des pommes de terre destinées à l’exportation, grâce à leur bonne qualité. « La pomme de terre est un tubercule qui nécessite une attention particulière, notamment lors de sa récolte. Autrement dit, pour réussir sa récolte, il faut soulever doucement la terre en faisant attention à ne pas abîmer les tubercules puis déterrer ces derniers à la main. Par la suite, il faut les laisser sécher au soleil pendant quelques heures avant de pouvoir les amener », explique hadj Hassanein, tout en ajoutant que l’Egypte cultive 5 millions de tonnes de pommes de terre par an, dont seulement 4 millions sont consommés, le reste étant exporté. Les paysans les cultivent 2 fois par an. La production est répartie sur l’ensemble du pays, mais elle est largement concentrée dans les provinces de Béheira, Ménoufiya, Minya, Qalioubiya et Guiza.

A chaque variété son plat

Paysan de père en fils, il dit connaître les rouages de l’agriculture et n’hésite pas à mettre l’accent sur la production, les variétés, la conservation, la vente, s’agissant des questions commerciales ou encore de la relance de l’export. « Il existe une large gamme de variétés de pommes de terre qui présentent une bonne résistance, des caractéristiques variétales et un rendement élevé, et dont les plus connues sont La Spunta, Hermes, Lady Rosetta, Diamand. Très demandées sur le marché et par les consommateurs, ces variétés sont les plus cultivées par les agriculteurs. Elles sont préconisées pour cuisiner des frites, de la purée ou des potages », souligne-t-il. Et d’ajouter qu’on distingue deux principaux critères de choix, soit « les primeurs », celles-ci sont ramassées en avril-mai, juste avant le printemps, la peau en est très fine et l’on peut les manger avec, soit elles sont de « conservation », ramassées entre août et octobre, à complète maturité. Ce sont celles que l’on trouve plus souvent en commerce, et ce, toute l’année.


La pomme de terre est un aliment dont tout le monde raffole.

Autre image qui ne manque pas d’attirer l’attention, des habitants des hameaux et villages alentours qui s’employaient à retourner le sol pour ramasser les pommes de terre laissées par les agriculteurs. En bons connaisseurs, certains se servent d’une bêche pour piocher la terre et débusquer les bulbes enfouis dans ses entrailles. « Il y a toujours des tubercules qui passent au travers des machines. Plutôt que de les laisser pourrir sur place, je les laisse aux gens les prendre gratuitement. Et ce, parce que la patate a commencé à pourrir, elle est teintée de bleu. Celle-là, je ne peux pas la vendre. Je fais donc le tri, la bonne pomme de terre, je la stocke, celle qui montre des signes de pourrissement, je la laisse pour qui veut la vendre », confie hadj Hassanein, tout en précisant que les toutes petites patates servent d’aliment pour les animaux.

En salade, en purée, en robe des champs, sous forme de frites, de röstis, chaudes ou froides, avec de la sauce ou du beurre, de la viande, du fromage ou du poisson, la pomme de terre fait partie de ces produits que l’on consomme si régulièrement qu’on n’y pense même plus. Il y en a vraiment pour tous les goûts. On dirait même qu’elle est la star des tables, étant donné qu’elle occupe une place importante dans notre alimentation. Car qui n’aime pas les pommes de terre et surtout les frites dont grands et petits se régalent? Elle est l’emblème du fast-food. On estime que 200 millions de tonnes de pommes de terre sont engloutis chaque année dans le monde, selon l’Organisation de l’alimentation et de l’agriculture des Nations-Unies (FAO).

35 kilos par an et par habitant

Les Egyptiens en consomment 35 kilos par an et par habitant! Avec plus de 5000 variétés, la pomme de terre est la quatrième culture vivrière la plus populaire au monde. « La pomme de terre est une assiette incontournable mise à toutes les sauces. C’est la compagne de plusieurs légumes. Pour moi c’est rare qu’il y ait une journée où l’on ne mange pas de pommes de terre », dit Ahmad Mostafa, fonctionnaire, qui en achète 5 kilos chaque semaine pour ses enfants. « La pomme de terre se prête à tous types de cuissons et de recettes et c’est un véritable concentré d’énergie et de vitamines », assure Nadia Ali, mère de 3 enfants. « C’est bon, calorique et aussi elle rassasie ma famille. C’est la vie des pauvres qui se déguste sous toutes les formes et en toutes saisons », ajoute une autre mère.


Les frites, emblème du fast-food.

Ainsi, en raison de sa grande diversité de qualités culinaires et gustatives, la pomme de terre est très souvent recommandée par les diététiciens. « La pomme de terre est composée à 80% d’eau et ne représente que 79 calories aux 100 grammes, c’est-à-dire pas grand-chose. C’est bien moins que les pâtes (350 calories, tout de même), et comme d’habitude, c’est ce que l’on met avec qui augmente les calories. Bien entendu, elle est totalement sans gluten et l’on peut même faire du pain avec sa farine », explique Adel Mostafa, nutritionniste.

Autant dire que du début à la fin du repas, la pomme de terre est bien présente! Cette culture aux multiples facettes se classe au deuxième rang des exportations agricoles égyptiennes, offrant une qualité de premier ordre de ce qui peut être un mélange de délicieuses pommes de terre frites, en purée ou tout ce qu’on veut.

Selon Ahmad Al-Attar, directeur de l’Administration centrale de quarantaine végétale du ministère égyptien de l’Agriculture, l’Egypte est un grand exportateur de pommes de terre. Les exportations ont dépassé 816000 tonnes lors du 1er semestre 2022 vers les marchés européens. « Cultivées dans un sol argileux ou sableux, les pommes de terre égyptiennes sont appréciées, non seulement pour leur bonne qualité mais aussi pour leur capacité de stockage à long terme », affirme-t-il. Il ajoute que les exportations égyptiennes de pommes de terre de consommation vers la Fédération de Russie, l’Union européenne, le Liban et la Jordanie ne sont autorisées que si elles sont produites dans des zones exemptes de parasites, conformément à la norme internationale pour les mesures phytosanitaires (NIMP 4) de la Convention internationale pour la protection des végétaux. Raison pour laquelle, le ministère de l’Agriculture et de la Bonification des terres a désigné le Potato Brown Rot Project (PBRP) comme l’entité exclusive responsable de l’établissement, de l’inspection, de la surveillance et de l’entretien des IFP, ainsi que des tests en laboratoire contre les agents de la pourriture brune.

« Pour que nous devenions un opérateur de plus en plus important en termes d’exportations de pommes de terre, l’administration n’hésite pas à appliquer des mesures strictes et resserrer les contrôles sur les entreprises exportatrices. Et ce, en suivant les normes internationales de qualité des exportations et en appliquant des systèmes de traçabilité des exportations dans les phases de culture, production, conditionnement et exportation », conclut Al-Attar.

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