Charm Al-Cheikh,
De notre envoyée spéciale —
« Nous avons décidé d’appeler cette conférence la conférence de la mise en oeuvre, car c’est l’objectif autour duquel tous nos efforts doivent s’articuler ». C’est par ces mots que le président Abdel-Fattah Al- Sissi a lancé dimanche les activités de la Conférence sur le climat (COP27) qui se poursuivra jusqu’au 18 novembre 2022 à Charm Al- Cheikh. Un événement planétaire qui réunit 120 dirigeants, chefs de gouvernement et experts du monde entier, ainsi que 4 000 participants et représentants des médias mondiaux et locaux.
Les années 2015-2022 ont été les plus chaudes jamais enregistrées sur la planète terre, selon l’Organisation météorologique mondiale, une institution qui relève de l’Onu. Pour réduire ce réchauffement planétaire et le limiter à +1,5oC par rapport à l’ère préindustrielle, les émissions de gaz à effet de serre doivent baisser de 45 % d’ici 2030. Or, celles-ci ont connu une hausse de 5 à 10 %, mettant le monde sur une trajectoire au mieux de +2,4°C d’ici la fin du siècle. Et si les politiques actuelles ne changent pas, c’est un +2,8°C catastrophique qui se profile, selon l’Onu.
Les pays développés sont responsables en grande partie de ce réchauffement de la planète dont souffrent les pays en développement. Devant les dirigeants du monde, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a parlé au nom de l’Afrique et des pays en développement. « Nos peuples attendent de nous des mesures tangibles pour réduire les émissions, renforcer nos capacités d’adaptation au climat et garantir le financement nécessaire aux pays en développement qui souffrent plus que d’autres des effets de la crise climatique actuelle », a déclaré le président.
L’approche de l’Egypte a toujours été de défendre la position de l’Afrique et des pays en développement dans toutes les instances et les conférences internationales. C’est aussi le cas à la COP. « L’Egypte défend les pays du Moyen-Orient et d’Afrique qui sont fortement touchés par les changements climatiques, et plaide en faveur d’une assistance technique et technologique aux pays en développement, afin de réduire les émissions, promouvoir l’économie verte et assurer le développement durable. Elle tente de mobiliser le soutien des grandes puissances et des pays riches pour aider les pays en développement à faire face aux effets négatifs du changement climatique. Les pays développés se sont engagés à fournir 100 milliards de dollars par an aux pays en développement lors des précédentes conférences sur le climat, dont la dernière s’est tenue à Glasgow, en Ecosse. Mais cette promesse n’a toujours pas été tenue », affirme Ahmed Sayed Ahmed, du Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram.
Pour la première fois, la question du financement des dommages causés par le réchauffement climatique est à l’agenda officiel d’une COP. Celui-ci est évalué à plusieurs dizaines de milliards de dollars (le Pakistan qui a récemment connu de fortes inondations a besoin de 30 milliards). « L’humanité a un choix à faire : coopérer ou périr. C’est soit un Pacte de solidarité climatique, soit un Pacte de suicide collectif », a mis en garde Antonio Guterres, secrétaire général des Nations-Unies.
Faire face aux changements climatiques
Dans son allocution lors de l’ouverture de la conférence, le président Sissi a indiqué que l’Egypte s’est fixé des objectifs ambitieux dans sa stratégie visant à faire face aux changements climatiques. « Nous oeuvrons pour accélérer le rythme de la transformation verte, en élargissant le recours aux énergies renouvelables et aux transports propres. Nous avons pris des mesures concrètes pour changer les lois et les mécanismes de travail du gouvernement, afin de promouvoir les investissements verts. Le programme national d’investissement dans les projets d’eau, d’énergie et d’alimentation (NWFE) que l’Egypte a récemment lancé est l’incarnation de cette ambition ».
L’Egypte a adopté des plans clairs pour faire face aux effets du changement climatique, en stimulant l’investissement vert et en créant un environnement propice à la transformation verte. Elle a également publié le premier guide sur les critères de durabilité environnementale. Selon les statistiques officielles, le montant des investissements publics verts s’est élevé à environ 144 milliards de L.E. au cours de l’exercice 2021-2022 dans 7 domaines fondamentaux, à savoir le transport propre, l’amélioration de l’environnement, l’agriculture et l’irrigation, l’industrie, le logement, l’énergie et l’éducation.
Le cheikh Mohamad bin Zayed, président des Emirats arabes unis qui accueillera la 28e COP, a indiqué que son pays était le premier pays de la région à annoncer une initiative stratégique pour atteindre la neutralité climatique d’ici 2050. « Nous avons un partenariat avec les Etats-Unis visant à renforcer la sécurité énergétique et à soutenir le climat en investissant 100 milliards de dollars pour construire des projets visant à produire 100 gigawatts d’énergie propre dans le monde », ajoute Bin Zayed.
Charm Al-Cheikh, première ville verte
L’Egypte s’était préparée à cet événement en prenant un ensemble de mesures visant à transformer Charm Al-Cheikh en ville verte, durable et exempte de toute pollution. La robe verte que porte la ville est partout saillante, à commencer par son aéroport international, qui a accueilli samedi le premier vol utilisant du biocarburant durable en provenance de l’aéroport Paris-Charles de Gaulle. De même, un système de transport vert respectueux de l’environnement a été mis en place mettant en service 250 bus (130 bus électriques et 120 au gaz naturel), 150 voitures électriques et 250 taxis intelligents, ainsi que des vélos. Le tout servant les délégués du monde entier.
Le gouverneur du Sud-Sinaï, le général Khaled Fouda, a évoqué la création de 3 centrales solaires, de 10 stations de ravitaillement en gaz, en plus de 50 points pour recharger les voitures électriques. Il a ajouté : « L’hôpital international de Charm Al-Cheikh a été transformé en un hôpital vert et respectueux de l’environnement. Les espaces verts ont été augmentés avec la plantation d’environ 4 000 palmiers et 200 arbres fruitiers, et la création du parc central sur une superficie de 40 feddans dans la zone du triangle vert, qui entre dans le cadre de l’initiative présidentielle : Préparezvous au vert ».
A cela s’ajoute la création de la zone bleue et de ses extensions autour du Centre international des conférences, pour présenter un modèle réel de compatibilité environnementale durable.
Elle est entièrement gérée par le secrétariat des Nations-Unies, pour tenir des séances plénières et des sessions spéciales et organiser des événements parallèles à la Conférence sur le climat, des expositions et des pavillons, auxquels participent des chefs d’Etat, des délégations officielles et des négociateurs.
Un espace vert a également été créé à côté du Parc de la paix, sur une superficie de 11 000 m2, pour servir de plateforme de rencontre et de communication entre les différents participants, y compris les hommes d’affaires, les jeunes, les femmes et la société civile, pour s’exprimer et discuter des questions liées au changement climatique
L›importance de la COP27
Les défis que le monde connaît montrent l’importance de la Conférence de Charm Al-Cheikh et le rôle de l’Egypte qui dirige les efforts visant à parvenir à un consensus mondial sur le climat. « La propagation des incendies de forêts en Europe et en Amérique latine, la multiplication des pluies torrentielles et des ouragans, la désertification et les sécheresses, en particulier en Afrique, tout cela est une sonnette d’alarme qui fait qu’il y a une nécessité d’agir, selon une feuille de route bien définie, afin de réduire la température de la terre et d’adopter une stratégie d’expansion de l’énergie propre. La Conférence de Charm Al-Cheikh est une étape importante dans la confrontation contre le changement climatique », a souligné Sayed Ahmed.
Antonio Guterres pense qu’il y a une nécessité d’accélérer la transition vers l’économie verte. « Nous sommes dans une guerre que nous sommes en train de perdre avec les émissions continues de gaz et le réchauffement climatique. Les pays doivent redoubler d’efforts pour régler le problème du climat et soutenir l’adaptation des pays touchés. Les pertes et les dommages du changement climatique ne peuvent pas être ignorés », a déclaré le secrétaire général des Nations-Unies.
Guterres a appelé à la conclusion d’un pacte entre pays développés et pays en développement pour ne pas dépasser le seuil de 1,5oC de température mondiale. « Les Etats-Unis et la Chine ont une responsabilité particulière pour concrétiser ce pacte sur le terrain. J’appelle également les banques de développement à changer les modèles économiques pour augmenter le financement dans le domaine de l’action climatique, établir un plan de relance sur 5 ans et réduire les bénéfices des entreprises qui dépendent des combustibles fossiles », a-t-il conclu.
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