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La Syrie, les Frères, le fanatisme … Danger !

Saad Al-Qerch, Jeudi, 19 septembre 2013

Dans sa 4e édition, la revue Damas fustige les tentatives d’instauration de l’islam politique. Mettant en parallèle la Syrie et l’Egypte, elle revient sur la chute des Frères musulmans et sur le danger d’une dictature militaire et religieuse qui succéderait à Bachar Al-Assad. Décryptage.

Saad

Dans le nouveau numéro du mensuel Damas (publié au Caire), le penseur Sadek Galal Al-Azim présente une analyse du Printemps arabe mettant l’accent sur des réalisations loin d’être insignifiantes. L’essentiel réside peutêtre dans le retour des citoyens à la politique et le retour de la politique aux citoyens après de longues années de séparation ainsi que « la défaite complète et finale de l’idée des dynasties gouvernantes » en Egypte, au Yémen comme en Libye. Ces révolutions ont également contribué à élever le niveau de la conscience populaire.

C’est grâce à cette conscience que le peuple égyptien a dénoncé le pouvoir de Mohamad Morsi qui a adopté « une notion incomplète et déformée de la démocratie » uniquement basée sur les urnes. Une compréhension largement insuffisante.

syrie

Puis ont survenu les manifestations géantes contre Mohamad Morsi le 30 juin. C’était « un don qui a montré au monde entier que l’Egypte ce n’est pas seulement des Frères, des salafistes et des djihadistes, mais une société civile dynamique et active, capable de prendre des décisions. Je vois aujourd’hui en Egypte une tentative de réhabilitation de l’islam officiel de l’Etat », estime le penseur. Selon Al-Azim, « l’islam djihadiste violent est l’islam qui a envahi Al-Kaaba en 1979 sous la direction de Jahiman Al-Atibi, qui a assassiné Sadate en 1981 et qui a mené des combats meurtriers et sans succès en Syrie, en Egypte et en Algérie ». Les partisans de cet islam sont aussi les auteurs des attaques du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Le comportement des adeptes de l’islam violent peut être interprété à la lumièrede leur désespoir à réaliser leurs objectifs sans recourir aux explosions terroristes suicidaires et aveugles. « L’islam politique en Egypte et en Tunisie se trouve aujourd’hui dans une situation difficile de confusion, detrébuchement, de contradictions et d’échec, et fait face à une colère populaire croissante ». C’est ce même constat qui a mené à la chute du régimede Mohamad Morsi. Dans son étude intitulée Le Printemps arabe et l’islam politique, Sadek Galal Al-Azimestime que la déclaration constitutionnelle houleuse du 21 novembre 2011 est, elle aussi, à l’origine des larges protestations populaires contre Mohamad Morsi. A travers cette déclaration, Morsi s’attribue des pouvoirs absolus et des immunités le rendant, lui et ses décisions, audessus de toutes récusations ».

Al-Azim considère les vastes protestations populaires comme de ce genre du pouvoir absolu qui a montré que l’Egypte d’aujourd’hui est dynamique, active et capable de prendre des positions par elle-même.

Syrie : la peur du fanatisme

Al-Azim ne s’attend nullement à ce qu’un quelconque courant de l’islam politique réaliserait une victoire écrasante dans des élections si celles-ci étaient organisées en Syrie où les protestations contre le pouvoir d’Al-Assad se poursuivent depuis mars 2011. La pire chose qui peut arriver à la Syrie est de devenir la proie d’une dictature militaire enveloppée d’un fanatisme religieux. Dans le même numéro de Damas de rédaction, Ibrahim Al-Gabine, déclare que l’Egypte est sortie plus forte de l’expérience des Frères musulmans. Il estime que la plus grande erreur de l’histoire des Frères est d’avoir raté cette occasion d’exercer un pouvoir politique. Les Frères n’ont pas réussi à s’intégrer dans l’Etat car la confrérie a bâti ses convictions, depuis sa fondation en 1928, « l’idée que la religion est en danger et que l’islam est encerclé ».

La confrérie a toujours oeuvré à faire renaître la khélafa islamique après sa disparition en Turquie avec l’avènement de Kamal Atatürk. Le problème de la confrérie ne concerne pas les individus qui la composent,mais l’organisation elle-même « basée sur l’obéissance absolue : une organisation inchangeable ». En effet, les membres de la confrérie ne peuvent prendre aucune décision sans en revenir au guide suprême.

Les Frères et l’obéissance absolue

Dans son étude L’Egypte libère les Frères, Al-Gabine qualifie ce qui est arrivé aux Frères de « catastrophique ». Mais cette « catastrophe » est due à la pensée même des Frères. En effet, les Frères sont « incapables d’accorder leur confiance aux personnes non membres de la confrérie. Un fait qui a détruit tous les ponts capables de se créer entre les Frères et les autres, car cet autre est inconstant et peut s’éloigner progressivement jusqu’à devenir impérativement un ennemi ». Les formations politiques qui se basent sur des cadres fermés sur eux-mêmes mènent inéluctablement à des voies fermées. Ceci est également valable pour les formations politiques non religieuses.

Selon Al-Gabine, l’Egypte a toujours été plus grande que ses gouverneurs, depuis Ramsès jusqu’à Morsi. « L’Egypte la toute-puissante a apporté au monde des valeurs culturelles et civiles éternelles ». Al-Gabine relate que Taha Hussein, Mostafa Lotfi Al-Manfalouti, Abbas Al-Aqqad, Naguib Mahfouz, Ahmad Chawqi, Hafez Ibrahim, Oum Kalsoum, Mohamad Abdel-Wahab, Abdel-Halim Hafez et Ahmad Zoweil n’étaient pas des Frères musulmans et que ces derniers « devaient réaliser que l’Egypte est plus grande qu’eux et que l’ère de la liberté et du Printemps arabe ne permet plus la standardisation de la société selon les principes de l’obéissance absolue … »

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