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Quand retrouverons-nous le coton, les tomates et les fraises égyptiens ?

Lundi, 07 février 2022

Vous souvenez-vous du coton qui était la fierté de l’Egypte dans le monde entier ? Vous souvenez-vous de la canne à sucre dont les tiges se balançaient avec le vent, qui était répandue en Haute-Egypte et dont on extrayait le sucre ? Vous souvenez-vous des fraises ? Je n’entends pas les fraises sans goût ni couleur, recouvertes de plastique, que l’on retrouve sur les étagères des supermarchés et qui ressemblent aux fruits en cire qui décoraient les salles à manger dans les maisons de nos grands-mères.

 


Je parle des fraises égyptiennes d’autrefois au goût succulent et à l’odeur pénétrante qui étaient vendues dans de grands paniers et dont la fragrance embaumait la maison à tel point que je pouvais savoir en rentrant de l’école que nous avions des fraises en dessert. Où sont passées ces fraises ? Où sont passées les bananes égyptiennes que l’on ne trouve que rarement sur les charrettes venant de la campagne proche du Caire ? Où sont passées les anciennes tomates égyptiennes remplacées par les espèces importées à la peau épaisse et au goût médiocre ? La carte agricole égyptienne a fortement changé au cours des dernières décennies. Les récoltes ont changé de forme et de goût. Nous sommes en partie responsables de ce changement. Mais la raison principale de celui-ci, ce sont les changements climatiques qui ont bouleversé le monde à cause du développement industriel, des gaz à effet de serre, des expériences nucléaires, des armes de destruction massive, notamment les armes chimiques et biologiques, et du problème de l’enveloppe atmosphérique qui nous protégeait et dans lequel nous avons fait un trou que nous sommes incapables de combler. L’agriculture dans le monde arabe fait face à un défi existentiel. La production agricole arabe ne représente que 4 % de la production agricole mondiale. Cependant, elle est vitale pour nous. Au cours des dernières années, de nombreuses études internationales soulignent l’avenir sombre de l’agriculture non seulement en Egypte, mais dans toute la région du Moyen-Orient. Une étude de la Nasa révèle que la région arabe vit une grande sécheresse depuis plus de 20 ans. C’est la plus grande période de sécheresse survenue au cours des dix derniers siècles. D’autre part, le PNUD estime que la persistance de la sécheresse et la rareté de l’eau mèneront à la baisse de 20 % de la production agricole dans la région arabe en 2080. Quant à l’étude élaborée par la Banque mondiale en 2017, elle révèle que les changements climatiques mèneront à une pénurie d’eau et engendreront un recul de 6 à 14 % du PNB des pays de la région. Soulignons aussi que notre région arabe importe 80 % de ses besoins alimentaires.

Qu’adviendra-t-il si les terres agricoles en Egypte, en Jordanie, en Syrie, en Iraq et au Maghreb diminuent ? Devrons-nous importer 100 % de nos denrées alimentaires ? En Egypte, l’agriculture a été pendant des siècles le pilier de l’économie nationale. Sous la domination romaine, l’Egypte était appelée le « panier à grains de Rome ». Mais la négligence pendant des années des denrées qui faisaient notre renommée, comme le coton, le riz et les fruits et dont certains nous rapportaient d’importantes recettes en devises étrangères, ainsi que l’impact des changements climatiques ont grandement influencé notre agriculture.

Par exemple, la hausse des températures a mené à une baisse de 70 % des récoltes d’olives et à la prolifération des chenilles légionnaires automnales qui ont attaqué nos récoltes l’année dernière, notamment le maïs en Haute-Egypte. L’agriculture est devenue un métier non rentable. La plupart des agriculteurs quittent l’agriculture pour d’autres métiers. Dans ce contexte apparaît l’importance des projets lancés par le gouvernement pour profiter des eaux sous-terraines et du traitement des eaux usées du drainage sanitaire et agricole, comme le conseillent les institutions mondiales. De plus, nous voyons aujourd’hui des projets non gouvernementaux d’agriculture désertique qui comptent sur l’irrigation au goutte-à-goutte et sur les eaux recyclées. On y cultive des fruits et des légumes bio et on tente de recultiver certaines espèces égyptiennes authentiques qui étaient parmi les meilleures au monde. Qui sait ? Peut-être nos petits-enfants sauront à leur retour de l’école qu’ils auront des fraises en dessert dès qu’ils ouvriront la porte de la maison !

 
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