Al-Ahram Hebdo : Quelle est l’importance réelle pour l’économie égyptienne des aides étrangères octroyées à l’Egypte par l’Union européenne, les Etats-Unis et les Etats arabes ?
Hani Tawfiq : Les aides des pays arabes sont évaluées à environ 8 milliards de dollars, essentiellement sous forme de prêts. Ce ne sont pas des dons. Quant aux aides ou prêts octroyés par le Fonds monétaire international ou par l’Union européenne, leur importance ne réside pas vraiment dans leur valeur, mais plutôt dans le fait qu’elles constituent un témoignage pour la communauté internationale que l’Egypte est capable de répondre à ses engagements financiers. En réalité, l’économie du pays a plus besoin d’investissements étrangers que d’aides et de dons. Les investissements stimulent la production, diminuent le chômage et permettent une croissance du PNB. Pour que l’Egypte retrouve un taux de croissance annuel de 7 ou de 8 %, elle a besoin d’investissements représentant environ 25 % du PNB. L’épargne locale fournit 15 % de ceux-ci : les investissements étrangers doivent donc fournir les 10 % restants, c’est-à-dire 15 milliards de dollars.
— L’usage des aides est-il soumis à un mécanisme de surveillance ?
— La surveillance des fonds dépend de leur nature. Les dépôts vont à la Banque centrale et sont sous son contrôle. Quant aux aides, dons et prêts, ils sont sous la surveillance du ministère de la Coopération internationale.
— Quels sont les avantages matériels et politiques que les Etats donateurs retirent de cette aide ?
— Cela diffère beaucoup d’un Etat à l’autre. Les dépôts sont assortis d’intérêts annuels. Quant aux dons et aides arabes, ils ont un motif politique, car la stabilité politique de l’Egypte est liée à la stabilité politique dans leurs pays.
— Que pensez-vous des menaces américaines concernant la baisse des aides militaires octroyées à l’Egypte ?
— Il est vrai que l’Egypte a besoin des aides militaires américaines. Mais les Etats-Unis en profitent autant, et même plus, car elles leur permettent d’être toujours au fait du niveau de l’armement de l’Egypte, ce qui profite finalement à Israël. Il ne faut pas oublier que durant la dernière guerre avec Israël, l’Egypte a utilisé des armes russes, chose que ni Israël ni les Etats-Unis ne désirent voir se reproduire.
— Comment évaluez-vous la situation économique actuelle en Egypte ?
— La situation actuelle est très critique, mais personne n’octroie à la crise économique l’intérêt qu’elle mérite, et tout le monde se concentre sur la crise politique. Les indicateurs économiques se dégradent chaque jour un peu plus. Au niveau du chômage, 46 000 usines sont à l’arrêt, la dette publique a atteint environ 250 milliards de dollars, soit plus de 80 % du PIB. De plus, le déficit du budget devrait atteindre 300 milliards de L.E. fin 2014. Enfin, les ressources du tourisme, qui constituent l’un des piliers de l’économie, ont complètement disparu.
— Pensez-vous que les ministères en charge de l’économie soient capables de sortir l’Egypte de la crise actuelle ?
— Malheureusement, je ne pense pas que ceux-ci puissent sortir l’Egypte de sa crise économique, car les problèmes portent sur la sécurité, la Constitution, les élections et d’autres questions qui ne sont pas de leur ressort. Il ne faut pas oublier que ce gouvernement est provisoire et ne peut pas régler les problèmes à long terme.
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