« L’Arabie saoudite et la France veulent s’engager pleinement » pour un « réengagement de la relation » entre Riyad et Beyrouth, a dit Macron.
« Le moment est venu parce que j’offre quelque chose qui pourrait aider le Liban à sortir de la crise. J’ai décidé d’abandonner mon poste ministériel ». C’est ce qu’a déclaré George Kordahi, en annonçant sa démission du poste de ministre libanais de l’Information, vendredi 3 décembre. Fruit d’une médiation française, cette démission a pour but de régler la crise diplomatique et économique entre le Liban, d’une part, et l’Arabie saoudite et les pays du Golfe, d’autre part.
Elle est en effet intervenue à la veille de la visite du président français, Emmanuel Macron, au Royaume saoudien. Dès le lendemain de cette démission en effet, le président français a annoncé, au terme de sa tournée express dans le Golfe, une initiative pour aider le Liban avec le prince héritier saoudien, Mohamad bin Salman. Paris et Riyad vont « travailler ensemble, soutenir les réformes, permettre au pays de sortir de la crise et préserver sa souveraineté », a encore souligné plus tard sur Twitter Emmanuel Macron.
« Notre volonté est aussi que le gouvernement (libanais) puisse travailler de manière normale, se réunir au plus vite et mener les réformes utiles », a-t-il ajouté. « L’Arabie saoudite et la France veulent s’engager pleinement » pour un « réengagement de la relation » entre Riyad et Beyrouth après une grave crise diplomatique. Ce réengagement a également un volet financier, a également annoncé Emmanuel Macron.
Le président français et le prince héritier saoudien ont appelé ensemble au téléphone le premier ministre libanais, Najib Mikati, pour tenter de trouver une issue à la brouille diplomatique entre Beyrouth et Riyad. Un « pas important vers la reprise des relations » avec Riyad, a estimé le premier ministre libanais.
Rapportant des propos du premier ministre libanais, l’agence de presse officielle saoudienne SPA a souligné dans un communiqué que « le Liban apprécie les grands efforts déployés par l’Arabie saoudite et la France pour se tenir auprès du peuple libanais ».
Selon SPA, M. Mikati a exprimé « l’engagement du gouvernement libanais à prendre toutes les mesures qui permettraient de renforcer les relations avec l’Arabie saoudite et les pays du Golfe et à refuser tout ce qui pourrait nuire à leur sécurité et leur stabilité ». « Les trois pays se sont mis d’accord pour oeuvrer conjointement pour soutenir les réformes globales nécessaires au Liban. L’Arabie saoudite et la France ont également exprimé leur attachement à la sécurité et la stabilité du Liban », a ajouté l’agence.
Une tournée, plusieurs objectifs
Ce coup de fil va-t-il permettre de mettre fin à la crise? Pas si sûr. Ce n’est qu’un pas, comme l’a dit Mikati. Car la tournée de Macron dans le Golfe avait aussi d’autres objectifs. « Trouver une issue à la crise libanaise n’est qu’un des volets de cette tournée. Macron veut tenir sa promesse de sauver le Liban faite lors de sa 2e visite sur place après l’explosion du port de Beyrouth en décembre dernier », explique Dr Mohamad Aboul-Makarem, analyste au Centre des études arabes et africaines.
La crise, ou plutôt les crises dont souffre le Liban ne sont en effet pas encore désamorcées. Selon un communiqué conjoint de Riyad et Paris, publié par SPA, les deux pays soulignent « la nécessité pour le gouvernement libanais de mettre en place des réformes globales et de respecter l’accord de Taëf qui permet de préserver l’unité nationale et la paix civile au Liban ».
Ils ont aussi précisé que les réformes doivent englober « les secteurs financier et énergétique, la lutte contre la corruption, ainsi que la surveillance des frontières ». Les deux parties ont par ailleurs souligné « la nécessité de limiter la possession d’armes aux institutions légales de l’Etat, exprimant l’espoir que le Liban ne sera pas le lieu d’où proviendraient des actes terroristes qui portent atteinte à la sécurité et la stabilité de la région », dans une référence claire au Hezbollah.
C’est dire que les problèmes restent entiers. Aboul-Makarem rappelle en effet que « la tournée de Macron coïncide avec la tenue des négociations sur l’accord nucléaire iranien.
Le rôle de l’Iran et son intervention dans les affaires libanaises internes à travers son soutien au Hezbollah représentent toujours une des cartes de pression utilisées par les Iraniens ». Et qu’elle a surtout d’autres volets cruciaux pour la France: « Après l’annulation des contrats militaires avec l’Australie, la France a voulu conclure d’autres accords avec d’autres parties. C’était l’objectif essentiel de cette tournée ».
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