Les travailleurs et les entreprises égyptiens joueront un rôle important dans la reconstruction de la Libye.
Hussein Abdel-Radi*
Comment se déroule la transition politique en Libye ? La crise libyenne connaît actuellement une percée évidente qui n'avait jamais été réalisée depuis le déclenchement du Mouvement de février 2011. Ce qui présage que la période transitoire, qui a commencé avec l'élection d'un pouvoir exécutif unifié en février dernier, constitue un vrai départ pour surmonter les problèmes et les crises qui ont épuisé cet Etat pétrolier tout au long des dix dernières années. Plusieurs facteurs internes et régionaux ont joué un rôle important dans le début de la reprise libyenne. Ces facteurs ont insufflé de nouveau l'espoir de réaliser d’autres acquis et de parvenir à un règlement global de ce conflit, l’un des plus complexes au Moyen-Orient.
Les indices de cette reprise libyenne sont, entre autres, le respect de l’accord de cessez-le-feu pendant plus de 10 mois et les réunions du comité militaire 5+5 qui se poursuivent afin d'ouvrir des voies de dialogue entre l’est et l’ouest. A ceci s’ajoute la transition entre le Gouvernement d’union nationale (GNA) et le gouvernement transitoire, après que ce dernier a obtenu la confiance du Conseil des députés en mars 2021. Par ailleurs, parallèlement aux négociations, les autres volets du règlement politique et constitutionnel sous l’égide de l’Onu ne cessent de réaliser des progrès. Les parties libyennes ont conclu en février un budget unifié, une première depuis 2014. Tous ces indices portent à croire que le pays est prêt pour un règlement global après une décennie de guerre.
La vraie réussite réside dans la volonté des Libyens de faire réussir les efforts de règlement politique, ce qui a permis l’arrêt des opérations militaires et donné la chance aux volets économique et constitutionnel de progresser en parallèle. Le comité militaire 5+5 est parvenu à un accord de cessez-le-feu en octobre 2020, ce qui a préparé le terrain aux belligérants pour se réunir autour d'une même table avant de former le comité du dialogue politique composé de 75 personnalités et d'élire une nouvelle autorité.
Ainsi, les interactions internes en Libye sont de nature à surmonter les obstacles et les difficultés qui avaient balayé tous les efforts précédents. D’ailleurs, le pouvoir élu tient à investir l'accalmie sur le terrain afin d'aller de l'avant et respecter les échéances de la feuille de route. Les Libyens sont plus que jamais déterminés à parvenir à un règlement.
Soutien arabe et international
De même, le changement des politiques régionales a contribué au rétablissement libyen. Les démarches égyptiennes soutenant le règlement pacifique ont aidé à sortir la Libye de son calvaire. Après l’annonce de sa « ligne rouge », l’Egypte a réussi à mobiliser les forces régionales et internationales en faveur de la préservation de l’Etat national libyen, ce qui a contribué à l’arrêt des affrontements militaires. En outre, l’Egypte a accueilli plusieurs rounds du dialogue libyen en essayant de neutraliser les ingérences extérieures qui entravaient le règlement.
L'un des résultats les plus importants des démarches égyptiennes était le rétablissement du rôle arabe, absent depuis le déclenchement de la crise. L’Egypte a incité les pays arabes à participer à la définition d’un cadre général de règlement et à assurer la coordination entre les acteurs africains, européens et arabes afin de réaliser un progrès sur la scène libyenne. Ce qui s'est directement ressenti à travers le soutien à la Déclaration du Caire en juin 2020, devenue une référence adoptée par les Nations-Unies et les parties impliquées dans la crise pour la résoudre. Ainsi, Le Caire a réussi à mettre un terme à la spirale de conflits qui a épuisé la Libye, poussant les parties régionales à respecter la souveraineté de l'Etat libyen et les aspirations de son peuple. Toutes ces actions ont permis d’ouvrir la voie à la reconstruction de la Libye. De même, le soutien international, dont jouit le nouveau pouvoir, lui a permis d’éviter le piège de s'aligner sur les forces étrangères et lui a donné l'espace nécessaire pour communiquer avec les différentes parties en toute indépendance.
Les ententes interlibyennes sur les plans politique, économique et militaire ont encouragé l'organisation onusienne à prendre des mesures sérieuses pour consolider les chances d’un règlement à travers l'arrêt du cessez-le-feu et le déploiement d'observateurs internationaux.
On peut dire que la période transitoire actuelle en Libye s'inscrit dans un contexte encourageant pour parvenir à un règlement global. Le Gouvernement d'union nationale transitoire jouit d’un soutien international et d’une atmosphère calme, un fait qui lui a permis de respecter les engagements de la feuille de route. L’instauration de la sécurité, la lutte contre le coronavirus et l’unification des institutions libyennes représentent les prochains défis du nouveau gouvernement libyen avec l’objectif de tenir les élections en décembre, une étape fondamentale pour établir les fondements de l'Etat libyen.
*Expert au Centre égyptien de la pensée et des études stratégiques
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