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Le FSD se modernise

Gilane Magdi, Lundi, 12 août 2013

Premier créancier des PME en Egypte, le Fonds Social de Développement (FSD) peine depuis deux ans à récupérer ses fonds. L’institution, qui souffre d'une mauvaise gestion, vient de mettre au point une stratégie pour amélio­rer sa performance. Dossier

Eco
Mohamad, un client au sein du fonds, est tombé dans l'insolvabilité.(Photo : Mohamed Hassanein).

Mohamad Abdou est un client régulier auprès du Fonds Social de Développement (FSD). Il travaille dans le domaine des boissons gazeuses. Il a emprun­té son quatrième crédit pour élargir son commerce. Mais il ne peut plus régler ses dettes régulièrement, à cause de la récession qui règne dans le pays après la révolution. Sa situa­tion s’est aggravée à cause d’une escroquerie montée par l’un de ses clients. « J’ai emprunté 70 000 L.E. auprès du FSD. Je suis incapable de rembourser les dettes. Je suis tombé dans l’insolvabilité l’année dernière. Le fonds a rééchelonné ce montant sans m’imposer plus d’in­térêts », raconte-t-il à l’Hebdo. « Un client m’a pris des marchan­dises d’un montant de 100 000 L.E. et il ne m’a pas payé. Ce qui m’a empêché de rembourser ma dette à la compagnie Pepsi dont je distri­bue les produits ». Il essaie de rem­bourser son crédit pour éviter la possibilité de voir son nom sur la liste des clients insolvables auprès de la société Iscore, responsable de la distribution des informations sur les insolvables. Abdou est un exemple des commerçants en diffi­culté.

Le dossier des clients insolvables est devenu très épineux après la révolution du 25 janvier 2011 à cause de l’instabilité politique dans le pays, même après la chute du régime de Mohamad Morsi le 3 juillet. Selon les chiffres du fonds, le volume d’insolvabilité reste très élevé dans le secteur industriel (soit 4 %) suivi par le secteur des profes­sions libérales (3,2 %) et celui ter­tiaire (2,6 %). Quant au secteur commercial, le taux d’insolvabilité (1,6 %) y est plus bas.

Gihane Abdel-Hafez, une autre cliente du FSD, qui travaille dans le secteur industriel, est incapable de rembourser ses dettes toujours à cause de la récession. Abdel-Hafez écoule des produits alimentaires dans les hypermarchés. « La chute du pouvoir d’achat m’empêche de rembourser mon crédit. Toutefois, le fonds m’a soutenue et m’a conseillé de vendre directement mes produits au public à des prix convenables pour pouvoir rembourser mon crédit », pré­cise-t-elle à l’Hebdo. Pourtant, Gihane Abdel-Hafez note une grande différence en matière de compétences entre les grands bureaux du FSD au Caire et ceux qui se trouvent dans les gouvernorats plus pauvres. « Dans ces derniers bureaux, ils sont très rigides avec les per­sonnes qui sont en difficulté financière », regrette-t-elle. Elle ajoute : « L’attitude des employés est très désagréable. Ils sont plus stricts concernant l’octroi de nouveaux crédits aux plus pauvres », se plaint Abdel-Hafez. Elle affirme que ses amis dans ces gouvernorats n’ont pas pu avoir de crédits.

Objectif : lutter contre

la pauvreté

Depuis la création du fonds en 1991, le but de celui-ci est de lutter contre la pauvreté et de créer des emplois. Dans son dernier rap­port, le fonds affirme avoir octroyé des crédits de 1,2 milliard de L.E. durant le premier semestre de 2013, un chiffre qui devrait doubler d’ici la fin 2013. Et ce, en octroyant des crédits aux petites et aux micro-entreprises, soit directement à tra­vers le fonds lui-même, soit par les banques et les organisations non gouvernementales de manière indi­recte. Le fonds a toujours été pré­sidé par un fidèle du Parti national démocrate (sous le régime de Moubarak). La plupart des postes-clés (très bien rémunérés) sont occupés par des fonctionnaires non sur la base de la compétence mais par népotisme. Le FSD a donc une longue histoire de mauvaise ges­tion.

Ainsi, la hausse des taux d’intérêt et le manque de compétences au sein du fonds ont naturellement rendu plus difficile le traitement du problème d’insolvabilité. « Le Fonds social obtient les crédits des institutions internationales telles que la Banque mondiale avec des taux d’intérêt trop bas pour les octroyer aux plus pauvres avec des intérêts de 9 % en vue de prendre la différence entre les deux intérêts. Quelle est la valeur ajoutée créée par le fonds ? », se demande Ahmed Al-Chérif, président du comité des Petites et Moyennes Entreprises (PME) au sein de l’as­sociation Ebda, qui a signé il y a un an un accord de coopération avec le FSD pour promouvoir le finance­ment et le soutien technique aux nouvelles PME. Outre la hausse des taux d’intérêt, la qualité des études de faisabilité des projets qui deman­dent des crédits au fonds est très mauvaise. « La politique d’emprunt est loin d’être parfaite. La majorité des projets sélectionnés par le fonds se caractérisent par la baisse de la rentabilité par rapport aux intérêts remboursés », renchérit Al-Chérif.

Une réforme à tâtons

Pour régler le problème croissant de l’insolvabilité, le fonds a adopté une stratégie basée sur la formation des employés et le renforcement de la surveillance dans la phase qui précède l’octroi des crédits.

Au niveau de la formation, le secrétaire général du fonds affirme que les deux tiers des employés du fonds ont suivi des cours de forma­tion dans le domaine de l’octroi des crédits, de la planification et des médias. Une démarche qui a conti­nué pendant le premier trimestre de cette année avec la formation de 450 employés. Au niveau de la sur­veillance, la direction du fonds a séparé les activités d’octroi des crédits de celles de la récupération des créances.

Ainsi, on a créé un département indépendant pour la surveillance et le remboursement avec un sys­tème qui permet aux employés de percevoir des primes en vue de les inciter à augmenter les taux de remboursement des crédits.

En dépit des mesures prises par le fonds, Alia Al-Mahdi, spécia­liste des PME, pense que ces mesures sont insuffisantes pour régler le dossier des crédits. « Il faut également former les pauvres qui empruntent au fonds, car le manque de formation les conduit à la faillite. De plus, la majeure partie des crédits accordés n’est pas consacrée aux nouveaux pro­jets. Au début de la création du fonds, la part des nouveaux pro­jets s’élevait à 60 % du porte­feuille des crédits contre 40 % pour les projets déjà entamés. Aujourd’hui, la part des nouveaux projets est très limitée », conclut Alia Al-Mahdi .

Une hausse exponentielle

Crédits accordés par le FSD (en milliards de L.E.)

Source : Fonds social de développement

Le total des crédits accordés par le Fonds social de développement a presque doublé au cours de l’année passée passant de 1,75 milliard de L.E. en 2011 à 2,1 milliards de L.E. en 2012. Selon la secrétaire générale du fonds, Ghada Waly, le fonds a déjà accordé un financement à hauteur de 1,2 milliard de L.E. au cours des six premiers mois de l’année courante, et ce, conformé­ment à une politique d’expansion géographique mise en place par le fonds, de même qu’à l’augmentation du montant des crédits accordés aux PME .

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