Après quatre ans d’investigations, le Parquet général égyptien et le Parquet de Rome ont publié un communiqué conjoint au sujet de l’assassinat de l’étudiant italien Giulio Regeni. Le communiqué a été rédigé suite à de nombreuses rencontres entre les deux parties, dont les dernières ont regroupé les équipes d’enquêteurs des deux parquets le 28 octobre et le 5 novembre à Rome, chaque équipe ayant présenté les résultats de son enquête. Selon le communiqué, les deux équipes ont échangé les points de vue, sous la direction du procureur général égyptien et du procureur de Rome et sont parvenus à trois principaux résultats. Le premier concerne le Parquet de Rome qui « suspecte dans le meurtre de Regini cinq membres des appareils de sécurité égyptiens qui auraient agi de manière individuelle sans le moindre lien avec les institutions gouvernementales égyptiennes ». En dépit de son respect de la loi italienne, le Parquet général égyptien a tenu à émettre ses réserves au sujet de ces suspicions et ne les soutient pas, car « il considère qu’elles sont basées sur des preuves non constantes. Le parquet affirme cependant comprendre les décisions indépendantes prises par le Parquet de Rome », a affirmé le communiqué. Le deuxième résultat des investigations concerne le Parquet général égyptien qui a annoncé être parvenu « à des preuves constantes sur le vol, sous l’effet de la contrainte, des biens de Regini par une bande de gangsters ». « En effet, ces effets ont été trouvés au domicile de l’un des membres de la bande en question. Ce constat est confirmé par certains témoins. L’enquête a prouvé, en effet, que les gangsters ont commis des crimes similaires à l’encontre de citoyens étrangers dont un Italien (hormis Regini). Ils ont utilisé des documents falsifiés pour prouver qu’ils font partie d’une agence de sécurité égyptienne ». Enfin, le Parquet égyptien a affirmé que l’assassin de Regini est toujours inconnu et « par conséquent, le dossier sera clos temporairement ».
Les enquêteurs seront toutefois chargés de poursuivre leurs recherches et de prendre les mesures adéquates pour arrêter l’auteur du crime. Les deux parties ont toutefois exprimé leur engagement à poursuivre la coopération judiciaire et à fournir toutes les informations de nature à révéler la vérité. Ils confirment que la coopération entre eux restera au plus haut niveau dans tous les domaines judiciaires.
En dépit de la divergence sur les résultats des investigations entre les deux parties, « ce procès est loin de peser sur les relations stratégiques égypto-italiennes », affirme Mona Salmane, experte des relations internationales à l’Université du Caire. Elle indique que les deux pays partagent des enjeux communs et coopèrent dans de nombreux dossiers politiques, qu’il s’agisse de la Libye, de la sécurité en Méditerranée ou de la lutte contre la migration clandestine. Sur le plan militaire, les deux ont aussi d’importantes et stratégiques relations militaires et économiques. En juin 2020, le gouvernement italien a approuvé la vente à l’Egypte de deux frégates Fremm construites par le groupe italien « Fincantieri ». « De même, c’est l’Italie qui a découvert en 2015 le plus grand gisement de gaz de Zohr en Egypte. Une découverte qui a ouvert de larges horizons de coopération entre les deux pays », rappelle l’analyste. A noter que le volume des échanges commerciaux entre les deux pays a atteint environ 7,2 milliards de dollars en 2018, et le volume des investissements italiens en Egypte est d’environ 4 milliards de dollars. Pour l’analyste, cette diversité dans les domaines d’investissement a fait de l’Italie l’un des partenaires commerciaux les plus importants pour l’Egypte.
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