Trois événements qui ont eu lieu cette semaine en Libye semblent confirmer que nous sommes face à une nouvelle dynamique. Il y a d’abord l’annonce de démission du chef du Gouvernement d’union nationale (GNA), Fayez Al-Sarraj. Celui-ci a déclaré son intention de quitter ses fonctions fin octobre prochain, et de céder sa place à un gouvernement issu des pourparlers interlibyens. Cette annonce est intervenue dans un contexte de manifestations à tripoli contre les mauvaises conditions de vie.
Quelques jours plus tôt, le premier ministre du gouvernement libyen basé à Tobrouk, Abdullah Al-Thani, rival d'Al-Sarraj, annonçait lui aussi sa démission suite aux protestations qui ont eu lieu à la ville côtière de Benghazi, contre la détérioration des conditions de vie.
Vendredi, l’homme fort de l’Est libyen, le maréchal Khalifa Haftar, annonçait qu’il était disposé à lever le blocus imposé par l’Armée Nationale Libyenne (ANL) sur les sites pétroliers « à condition de répartir équitablement les revenus pétroliers ».
Cette succession d’événements porte à croire qu’un arrangement est en train de se mettre en place dans la région pour trouver un règlement à la crise libyenne. En vertu de cet arrangement, les chefs des deux gouvernements rivaux (de l’est et de l’ouest) quittent leurs fonctions pour ouvrir la voie à des négociations directes. Celles-ci sont en cours depuis déjà deux semaines. Les représentants des deux camps étaient à Bouznika au Maroc les 6 et 7 septembre, puis à Montreux en Suisse du 7 au 9 septembre pour des pourparlers en présence de l’émissaire par intérim de l’Onu pour la Libye, Stéphanie Williams. Au terme de ces négociations, les représentants du Haut Conseil d’Etat libyen (ouest) et du parlement de Tobrouk (ouest) ont convenu d’organiser des élections législatives et présidentielle à la fin d’une période préparatoire de 18 mois.
Faut-il s’attendre à la fin de la guerre en Libye? Pour l’instant, rien n’est joué. Car des questions hautement critiques doivent encore être abordées. Quel sera le sort des milices armées et des mercenaires que le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a amenés en Libye? Les forces étrangères quitteront-elles la Libye? Aucune de ces questions cruciales ne doit être négligée. Si l’accord de Skhirat, signé en octobre 2017, a échoué, c’est parce qu’il s’est contenté de définir un cadre général laissant les détails à une phase ultérieure. La question des milices armées est fondamentale pour l’avenir de la Libye. Le GNA s’est appuyé sur ces milices pour assurer la sécurité de Tripoli et de ses environs. En contrepartie, ces dernières ont eu accès aux institutions de l’Etat. Aujourd’hui, elles constituent un facteur d’instabilité pour la Libye. Leur présence est un obstacle à un Etat civil et démocratique. Même chose pour les mercenaires d’Erdogan, qui mettent en péril la stabilité régionale menaçant tant l’Egypte que l’Europe ou encore les pays du Sahel. Sans le règlement de ces questions, il sera difficile de parvenir à un règlement de la crise libyenne. Et le chaos dans ce pays peut durer des années encore .
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