Détruit par l’explosion de 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium, le port de Beyrouth était vital pour l’économie du Liban ainsi que pour la vie quotidienne de ses citoyens. En plus d’être la principale porte d’entrée des importations du pays, nettement importateur, il abritait les seuls silos à grains du pays et c’est dans ce port que le blé, denrée alimentaire pour le régime fondamental des Libanais, les médicaments et le carburant sont stockés. 70 % du commerce extérieur du pays passait par le port de Beyrouth, principal port du Liban et l’un des 10 principaux ports maritimes de la mer Méditerranée, comme le note son site officiel. «
Grâce à l’autofinancement, il est passé d’un port local à un centre régional et de transbordement pour la région », ajoute le site fièrement. «
3 100 navires passaient par là par an. Le port de Beyrouth est relié aux marchés d’Asie, d’Europe et d’Afrique et travaille avec 300 ports à travers le monde », précise Qamar Mohamad, chercheuse économique selon laquelle la première urgence actuellement est de sécuriser les produits alimentaires et médicaux à travers d’autres ports. En effet, la grande majorité des produits de base entraient dans le pays par ce port, que ce soit les denrées alimentaires ou les produits médicaux, sans compter l’ensemble des marchandises importées, le Liban étant un pays qui importe beaucoup : Containers, automobiles, gaz, pétrole, céréales, bétail. Huit millions de tonnes de marchandises étaient échangées chaque année dans le port de Beyrouth, avec ses 4 bassins, qui s’étend sur plus de 1,2 km
2. En 2018, plus de 7,05 millions de tonnes de marchandises sont entrées dans le port et 1 million de tonnes en sont sorties. Les revenus ont enregistré 313 millions de dollars avant de tomber à 200 millions de dollars en 2019.
« Pas de craintes immédiates de pénurie »
Mais le plus grave est aujourd’hui que sa destruction menace surtout la sécurité alimentaire. 80 % des céréales qui sont consommées au Liban transitent par les quais de Beyrouth. Ses silos à grains permettaient de stocker plus de 120 000 tonnes de céréales. Après l’explosion, tout a été soufflé. Néanmoins, les silos nationaux, loin d’être pleins en cette saison, ne contenaient que quelque 15 000 tonnes de blé pour une capacité de 120 000 tonnes. Le ministre de l’Economie, Raoul Nehmé, a affirmé que le Liban « disposait de réserves suffisantes pour un peu moins d’un mois » et qu’il n’y avait « pas de craintes immédiates de pénurie ». Selon lui, 3 bateaux chargés de 28 000 tonnes de blé étaient le 6 août à l’approche du Liban. Le port de Tripoli, qui s’apprêtait à les accueillir, se montre lui aussi rassurant. « Ce que nous devons faire, c’est trouver d’autres moyens de stockage, silos ou entrepôts plus petits », a affirmé le ministre. « Nous avons suffisamment de stocks et de bateaux en route pour couvrir les besoins du Liban à long terme », a-t-il ajouté. Mais avec la disparition des principaux silos, le gouvernement a besoin d’alternatives. « Nous recherchons actuellement des zones de stockage », a déclaré M. Nehmé. Ahmad Tamer, directeur du port de Tripoli, la deuxième plus grande installation du Liban, a déclaré que son port ne disposait pas de stockage de céréales mais que les cargaisons pouvaient être acheminées vers des entrepôts à 2 km. En effet, suite à l’explosion, le gouvernement libanais a décidé d’utiliser les ports de Tripoli au nord et les plus petits ports de Sidon et Tyr au sud. Tripoli, en tant que deuxième plus grand centre logistique du pays, devrait récupérer la majorité des expéditions redirigées.
Par ailleurs, la destruction du port aura des conséquences directes sur les revenus du Liban en devises étrangères ainsi que sur l’inflation. « La baisse du volume du commerce va réduire les revenus en devises étrangères du Liban en conséquence de la baisse du volume du commerce, des tarifs de passage, des revenus douaniers ainsi que de l’exportation et de la réexportation de marchandises », énumère Qamar Mohamad, affirmant que la baisse des importations pourrait conduire à une hausse des prix des produits alimentaires et d’autres produits, à cause de la baisse de l’offre et des éventuelles pénuries.
Pour ce qui est de la reconstruction, le gouverneur de Beyrouth, Marwan Abboud, a déclaré que le coût pourrait s’élever à 3, voire 5 milliards de dollars. Ce qui, selon le ministre de l’Economie, ne pourra se faire sans l’aide internationale. Plusieurs pays, dont la France, l’Arabie saoudite et le Royaume-Uni, ont déjà offert leur aide. « Mais il est peu probable que ces pays offrent le financement nécessaire pour aider le Liban à surmonter ses graves problèmes économiques sans un engagement plus fort en faveur des réformes économiques et politiques », souligne un rapport du cabinet de conseil en recherche économique, Capital Economics. C’est donc un retour à la case départ.
Lien court: